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L’agriculture intensive favorise l’érosion des sols et la contamination des affluents

Écrit par Patrice-Hans Perrier, Collaboration spéciale
15.10.2007
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Cercle vicieux 

  • Une ferme agricole près de cours d'eau(攝影: / 大紀元)

Les activités de l’agrobusiness sont responsables, dans une large part, de la contamination d’un grand nombre de bassins versants du Québec. Qui plus est, l’agriculture intensive appauvrit les terres arables, provoque l’érosion des sols en bordure des cours d’eau et répand plusieurs produits hautement toxiques dans l’environnement. À l’heure des dictats de l’OMC, les puissants conglomérats agroalimentaires favorisent une intégration verticale des pratiques agricoles. Les conséquences sont alarmantes pour l’état de nos écosystèmes.

Les bassins versants des rivières Yamaska, l’Assomption et Chaudière – dans le centre du Québec – sont hautement contaminés par les cultures et les élevages intensifs, selon certaines études récentes du ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs (MDDEP). C’est la production porcine qui serait la plus susceptible de nuire à l’environnement. Le lancement de l’ouvrage Porcheries!, le mois dernier, aux Éditions Écosociété, a provoqué bien des remous au sein de l’opinion publique. Il faut dire que les groupes environnementalistes ont carrément jeté l’opprobre sur ce type de production qui s’est industrialisé au maximum depuis que les produits agricoles ont été pris en compte dans les ententes sur le libre échange en 1993.

Les auteurs de cet ouvrage de référence accusent l’industrie porcine d’être responsable d’une kyrielle de problèmes environnementaux et socioéconomiques. Ils vont jusqu’à comparer la prolifération des mégaporcheries à une forme de cancer menaçant la qualité de vie des communautés agricoles. C’est le modèle de gouvernance néolibérale qui est remis en cause par les auteurs de cette véritable série noire sur les méandres d’une industrie agroalimentaire qui aurait manifestement perdu le contrôle.

De véritables usines à viande

Véritable pavé, Porcheries! ne laisse personne indifférent et les débats vont bon train au moment de mettre cet article sous presse. Les signataires de cette étude vont jusqu’à comparer les fermes porcines à de véritables «usines à viande» qui destinent le plus gros de leur production à l’exportation et qui sont responsables de la déjection de «flots de lisier qui engorgent nos campagnes». Ce n’est un secret pour personne : une partie du lisier liquide de porc est épandue sur les sols à l’automne et au printemps, un temps de l’année où les pluies causent un phénomène d’érosion important. Le surplus de ces importantes déjections ruisselle à la surface des terres et finit par atteindre les cours d’eau et, même, la nappe phréatique. Chemin faisant, l’eau est contaminée par le phosphate et l’azote contenus dans ce fameux lisier qui fait aussi couler … beaucoup d’encre dans les médias écrits!

Si un moratoire a bel et bien été décrété, histoire de mettre un terme à la multiplication des mégaporcheries, la tendance s’est malgré tout maintenue. Et au rythme où vont les choses, le sous-bassin de la rivière Yamaska contiendrait un des plus hauts taux de fertilisants de toute la région. Il serait utile, à ce chapitre, de rappeler aux lecteurs que les fertilisants proviennent autant des déjections animales que des engrais minéraux qui contiennent des quantités astronomiques d’azote et de phosphore. Le phénomène de l’accroissement des plantes aquatiques et des algues est directement imputable à cette incurie en matière de gestion des activités agricoles. Ce phénomène d’eutrophisation contribue à menacer les fragiles écosystèmes aquatiques et fait en sorte que le traitement de l’eau potable devienne problématique. La contamination de l’eau peut aussi avoir des incidences sur la fécondité et la santé des populations limitrophes.

Une agriculture gonflée aux stéroïdes

Les producteurs de porc ne sont pas les seuls à être montrés du doigt. En fait, c’est tout l’agrobusiness qui est remis en cause en vertu de ses pratiques controversées. Certaines cultures, à l’instar du maïs ou du soya, nécessitent une très forte irrigation et l’emploi de quantités impressionnantes d’insecticides et de pesticides. Ce type de culture monopoliserait jusqu’au trois quarts des pesticides vendus dans la région de la rivière Yamaska! Le sous-bassin de la rivière Chibouet, laquelle se jette dans la rivière Yamaska, contiendrait de fortes concentrations d’atrazine et de métolachlore, deux herbicides utilisés pour la culture du maïs. Ce type de culture intensive fait que les sols sont laissés à nu, après les récoltes, une bonne partie de l’année, ce qui les rendrait d’autant plus sensibles au phénomène de l’érosion causé par l’eau ou le vent.

Qui plus est, nombre d’agriculteurs utilisent la technique du drainage artificiel afin de mousser la productivité des terres agricoles. Une étude du MDDEP indique clairement que cette technique bousille carrément certains écosystèmes naturels de grande valeur et pourrait entraîner, par la suite, des problèmes d’érosion. Ce phénomène d’érosion fait en sorte de diminuer la productivité des sols et d’entraîner une contamination subséquente des cours d’eau par le biais des matières en suspension qui ruissellent sous l’action de la pluie.

L’aménagement de cours d’eau à des fins agricoles peut avoir un effet nocif sur les écosystèmes aquatiques qui caractérisent les milieux humides en périphérie des terres arables. En outre, l’agriculture intensive consomme énormément d’eau douce, certains parlent même de 70 % des ressources en eau de surface dans le monde. Certains producteurs, situés loin des cours d’eau, vont jusqu’à creuser afin de s’alimenter à même les nappes souterraines, ce qui n’est pas sans inquiéter certains scientifiques. C’est ainsi que des régions désertiques, à l’instar de l’Arizona, aux États-Unis, pompent des volumes du précieux liquide qui correspondent au double de la quantité d’eau alimentée par la pluie. Ce qui n’est pas peu dire!

Autre temps, autres mœurs

Mais les temps changent, et certaines pratiques pourraient permettre de mettre un terme à cette spoliation sans scrupules de nos écosystèmes en région. Certains recommandent le retour aux pratiques de culture en jachère (rotation des cultures), un système qui permet de faire alterner les surfaces cultivées. Ainsi, la superficie non employée aura le temps de se régénérer pour quelques années, le temps de se regarnir en nutriments et minéraux naturels. Toutefois, les observateurs du secteur agricole affirment qu’un demi-siècle d’agriculture intensive a été suffisant pour dévitaliser notre terre mère.

La fameuse «révolution verte» des années 1950 aura contribué à faire en sorte que le sol devienne «un réservoir de minéraux morts», pour reprendre les termes du chercheur Marcel Roy. Ainsi donc, les producteurs sont pris en otage par l’agrobusiness qui leur fournit des produits chimiques afin de redonner de la vitalité artificielle à des terres arables qui peuvent mettre des milliers d’années à se reconstituer.

Un autre chercheur, André Mathieu, affirme même que «le sol arable est une ressource pratiquement non renouvelable» … qui est mise en péril par l’érosion ou la contamination chimique causée par les engrais et autres pesticides. D’autres chercheurs préconisent un travail minimal du sol, la rotation des cultures (jachère) ou le recours à des cultures couvre-sol afin de minimiser l’effet de l’érosion attribuable au vent ou à l’eau. C’est la culture en bande des champs qui serait la plus indiquée de l’avis de nombreux experts. C’est ainsi qu’une bande sur deux serait ensemencée, pendant que les autres seraient mises en jachère pour une période de deux ans, dans le cas des céréales. En plus de permettre à la terre de se reposer, une telle pratique peut aussi s’avérer un moyen efficace pour lutter contre l’érosion.

L’agriculture intensive fait en sorte de priver le sol de ses matières organiques, ce qui peut mener à des phénomènes inquiétants, tels que l’érosion, la baisse de fertilité ou, même, la désertification. Nous vous reviendrons avec un article sur la question de la dévitalisation des sols au gré d’une industrialisation forcenée de nos pratiques agricoles.

Sources :

Équiterre – États généraux de l’agriculture du Québec (2004) – Greenpeace – Ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs – Statistique Canada – Éditions Écosociété.

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