GUERRE HAMAS-ISRAËL

A Gaza, la poterie pour faire face aux pénuries de la guerre

novembre 24, 2024 14:30, Last Updated: novembre 24, 2024 14:45
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Perdue, oubliée ou cassée dans la panique des déplacements au gré des ordres d’évacuation : la vaisselle est l’un des nombreux objets qui font cruellement défaut aux Gazaouis après plus d’un an de guerre, entraînant un regain d’activité pour les potiers du territoire palestinien.

« Aujourd’hui, il y a une demande exceptionnelle d’assiettes car rien n’entre dans la bande de Gaza », explique à l’AFP Jafar Atallah, un potier de 26 ans.

L’un des fils du potier palestinien Sid Atallah porte des pots de fleurs en argile dans l’atelier familial à Deir al-Balah, dans le centre de la bande de Gaza, le 11 février 2021. (Photo SAID KHATIB/AFP via Getty Images)

Pour répondre à la demande, ses mains ne quittent plus son four. Il affirme confectionner une centaine de pièces par jour, principalement des assiettes creuses et des timbales – loin des 1.500 unités produites par son usine du nord de la bande de Gaza avant la guerre.

Indice de la popularité de ces biens, M. Atallah dit désormais vendre chaque objet 10 shekels (environ 2,50 euros), une valeur presque quintuplée.

L’un des fils du potier palestinien Sid Atallah étale des pots d’argile pour les faire sécher, dans l’atelier familial à Deir al-Balah, dans le centre de la bande de Gaza, le 11 février 2021. (Photo SAID KHATIB/AFP via Getty Images)

Si la bande de Gaza est soumise à un blocus israélien depuis plus de 15 ans, à la suite de la prise du pouvoir par le Hamas, la situation s’est encore détériorée depuis le 7 octobre 2023, jour de l’attaque sans précédent du mouvement terroriste islamiste contre Israël, qui a déclenché les représailles de l’armée israélienne.

Les organisations d’aide internationale soulignent chaque jour à quel point il leur est difficile de faire entrer et distribuer des biens de première nécessité dans le territoire à cause de contraintes imposées par les autorités israéliennes et d’une situation sécuritaire catastrophique.

Des pans entiers de l’activité de Gaza paralysés

Quant aux sites de production à l’intérieur de la bande de Gaza, ils sont à l’arrêt soit parce que les bâtiments ont été détruits ou rendus inaccessibles par les combats et les bombardements, soit par manque de matière première ou d’électricité.

La guerre paralyse des pans entiers de l’activité de Gaza, et même les hôpitaux peinent à trouver le carburant nécessaire pour faire tourner leurs générateurs.

M. Atallah a donc reproduit un atelier sommaire, à l’abri d’une bâche bleue, maniant l’argile à la force de ses mains et faisant sécher ses réalisations au soleil.

L’un des fils du potier palestinien Sid Atallah prépare de l’argile dans l’atelier familial à Deir al-Balah, dans le centre de la bande de Gaza, le 11 février 2021. (Photo by SAID KHATIB/AFP via Getty Images)

« Plus du double » du prix d’avant la guerre

« Après 13 mois de guerre, je suis allée au marché pour acheter des assiettes et des couverts pour pouvoir manger, je n’ai trouvé que ce pot en terre cuite », raconte Lura al-Turk, une mère de famille vivant dans un abri de fortune de Nousseirat (centre).

« J’ai été obligée de l’acheter pour nourrir mes enfants », poursuit-elle en notant que cet objet était particulièrement onéreux – « plus du double » du prix d’avant la guerre.

Sur les marchés improvisés au bord des rues, la seule autre possibilité serait d’opter pour des assiettes jetables, quand les vendeurs en proposent.

Conserver l’eau dans un semblant de fraîcheur 

Dans la bande de Gaza où le réseau de distribution d’eau ne fonctionne plus, largement endommagé par les combats, ces poteries avaient déjà connu un regain de popularité à l’été, permettant de conserver dans un semblant de fraîcheur l’eau distribuée aux points de collecte.

Des pots d’argile sont étendus pour sécher dans l’atelier du potier palestinien Sid Atallah, à Deir al-Balah dans le centre de la bande de Gaza, le 11 février 2021. (Photo SAID KHATIB/AFP via Getty Images)

L’attachement à la terre et aux pratiques traditionnelles occupant une place importante dans la culture palestinienne, le pis-aller de la vaisselle artisanale semble s’imposer comme l’une des solutions pour le quotidien de très nombreux déplacés.

Près de la totalité de la population a dû quitter son logement au moins une fois depuis le début de la guerre selon l’ONU, beaucoup vivent dans des tentes ou des abris publics, certains à même les trottoirs.

A chaque ordre d’évacuation émis par l’armée israélienne, des centaines de personnes prennent la route, le plus souvent à pied, emportant avec elles leurs affaires parmi lesquelles on devine souvent un fait-tout en aluminium.

L’impression d’être renvoyés des siècles en arrière, avant même l’âge de pierre

Au fil des mois et des vagues de mouvements de population, les sacs semblent de plus en plus petits.

Fidèles à leur réputation de peuple ayant développé une singulière résilience après plusieurs guerres, les Gazaouis recourent à de nombreuses astuces pour pallier leur précarisation accélérée, des moyens de transport à l’habillement, en passant par la scolarité des enfants. Dans les entretiens accordés à l’AFP, les Gazaouis notent toutefois régulièrement que ces bricolages leur donnent l’impression d’être renvoyés des siècles en arrière, et avec ces assiettes de terre, avant même l’âge de pierre.

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