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A Hong Kong, un scientifique veut ressusciter la « Perle de l’Orient »

juin 6, 2019 14:53, Last Updated: juillet 13, 2019 12:27
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Sur un radeau au large des côtes orientales hongkongaises, un ancien banquier devenu scientifique gratte patiemment les coquilles de ses 2.000 huîtres, une tâche pénible mais cruciale s’il veut faire revivre la culture des perles dans l’ancienne colonie britannique.

« Cette espèce était autrefois abondante à Hong Kong », souligne Yan Wa-tat, 58 ans. « La pêche à la perle est vieille de plus de mille ans mais à cause de la surpêche à Hong Kong, il n’en reste que quelques-unes ». Yan Wa-tat cultive les perles Akoya, de petite taille, très prisées des joailliers. Il espère démontrer par ses recherches que cette activité peut être viable.

Le métier nécessite de la patience: il faut environ un an au mollusque pour produire une perle de culture. La technique consiste à introduire un corps étranger dans la coquille du mollusque, afin d’imiter le processus naturel, quand un grain de sable ou un fragment de roche s’immisce à l’intérieur puis est recouvert, au fil des mois, par des couches de nacre finissant par former une perle.

M. Yan doit régulièrement gratter ses huîtres pour les débarrasser des coquillages qui pourraient leur faire une concurrence alimentaire. Le savoir-faire de la culture des perles était autrefois généralisé dans cette région du Sud de la Chine, longtemps l’une des plus densément peuplées du monde, et dont le delta s’appelle d’ailleurs « delta de la Rivière des Perles ».

La plus grosse perle d’eau douce du monde, qui appartint un temps à l’impératrice Catherine II de Russie, s’est probablement formée dans la Rivière des Perles. La « Sleeping lion » (Lion qui dort), perle naturelle qui doit son nom à sa forme étrange, avait été transportée à la fin du 18e siècle jusqu’à Batavia, l’actuelle Jakarta, par un marchand hollandais.

Hong Kong, que ses anciens maîtres coloniaux avaient baptisée Perle de l’Orient, reste le plus grand importateur et exportateur de perles au monde. En 2016, les exportations ont pesé environ 1,8 milliard de dollars (1,6 milliard d’euros), selon les données de l’ONU. Mais aucune perle n’est produite localement: la surpêche et la concurrence de l’étranger ont depuis longtemps eu raison des perles naturelles à Hong Kong.

La culture des huîtres perlières est une industrie relativement moderne. Dans les années 1950, certains aquaculteurs entreprenants s’étaient lancés à Hong Kong, mais ils ont vite été victimes de la concurrence japonaise, qui domine le secteur. La dernière ferme hongkongaise d’élevage d’huîtres perlières a fermé en 1981. Aujourd’hui, M. Yan tente de renverser la vapeur aux côtés d’une poignée de pêcheurs du cru qui se diversifient en élevant aussi des huîtres perlières, mêlant savoir-faire traditionnel et technologies ultra-modernes.

Il y a quelques années, M. Yan travaillait encore dans le lucratif secteur bancaire. Mais il a eu envie « de faire quelque chose de plus intéressant et de plus productif pour notre société » et a entamé un doctorat à l’école des sciences biologiques de l’Université de Hong Kong, avec l’idée de ressusciter la culture perlière à Hong Kong. Dans son laboratoire universitaire, il cherche le meilleur moyen d’insérer une puce de radio-identification dans le nucléus introduit dans le mollusque et à partir duquel la nacre est secrétée. Le mécanisme exact est toutefois jalousement gardé par son auteur.

M. Yan passe un scanner devant une de ses huîtres. On entend un bip léger avant qu’une série de numéros n’apparaissent sur une application de son smartphone.  Les bénéfices de ses recherches sont multiples. Entre 10 et 20% des nucléi sont rejetés par les huîtres mais les éleveurs ne découvrent l’absence de perle qu’en ouvrant les mollusques. Une puce leur permettrait de savoir si une huître en contient bien une.

Grâce aux numéros d’identification, les acheteurs pourraient connaître la provenance exacte de leurs joyaux, ce qui réduirait le risque d’arnaques en termes de qualité. En mars, un groupe de pêcheurs inspirés par M. Yan ont récolté des perles Akoya pour la première fois à Hong Kong depuis très longtemps. « Je crois que la culture des perles a de l’avenir à Hong Kong », explique Leung Kam-ming, qui cultive des Akoya sur un radeau au large de Sai Kung, région rurale de l’est de la mégapole. « J’ai commencé cela pour gagner de l’argent supplémentaire. »

Il a à peu près 30.000 huîtres. Chaque perle se vend environ 100 dollars de Hong Kong (11 euros). Celles qui ne répondent pas aux exigences de la joaillerie peuvent être revendues  de même que les coquilles  aux secteurs de la médecine chinoise et des cosmétiques.  M. Leung espère que sa récolte réussie en inspirera d’autres.

Chose rare à Hong Kong, ce n’est pas la place qui manque: d’après l’Université de Hong Kong, environ 90% du millier de radeaux de pêche amarrés dans les eaux de la ville sont inutilisés car peu de jeunes veulent se lancer aujourd’hui dans cette activité. « Si je peux montrer aux pêcheurs qu’on peut vivre de la pêche, qu’on peut diversifier ses revenus, alors je crois qu’ils seront intéressés », prédit le chercheur Yan Wa-tat.

D.C avec AFP

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