À Sassay dans le Loir-et-Cher, chevaux et moutons font leur retour dans les vignes où ils aident les sols à mieux respirer et les préservent des tassements, même s’il est toujours inenvisageable de se passer du tracteur.
Urbanie tire avec aisance une lame de désherbage entre les rangs centenaires du Domaine de l’Affût, en Sologne. Malgré sa tonne, la petite Ardennaise file sans rien abîmer des très vieux pieds, ni maltraiter le sol boueux.
Isabelle Pangault, installée à Sassay, observe de loin son prestataire, spécialisé dans la traction animale.
« On est sur une parcelle d’un gamay plus que centenaire, plantée en 1894. C’est pour ça que je fais appel au cheval », explique la vigneronne. « Ce sont des vieux ceps tout tortueux qui ont tendance à courir un peu au sol. Si je passais le tracteur pour travailler je risquerais de tout arracher ».
Autre avantage, « on va moins tasser les sols, puisque même si Urbanie est d’un bon gabarit, elle n’est pas si lourde. Et surtout, son poids est bien mieux réparti sur le sol que celui d’un tracteur. Je sais que mes sols vont plus respirer. (…) Les racines vont trouver plus d’oxygène, d’eau et d’éléments minéraux », continue-t-elle.
« Un vigneron qui veut respecter son sol va éviter tout phénomène de tassement », abonde Olivier Humbrecht, président du syndicat Biodyvin, qui regroupe des domaines en biodynamie.
Avec le tassement, les viticulteurs constatent « des phénomènes d’asphyxie ». « Le vigneron doit avoir des sols aérés et légers », explique l’Alsacien, qui regrette que le poids des tracteurs fruitiers modernes approche les trois tonnes.
Alors, idéal le cheval de trait? Pas vraiment. Certes, avec un coût de 6.000 euros maximum pour une bête formée, il est bien moins cher qu’un tracteur (environ 100.000 euros). Mais la machine reste bien plus efficace… et exige moins de soin.
« Le cheval demande un entretien 365 jours par an pour cinq ou six heures de travail par jour. (…) Comme un sportif, il faut qu’il ait une hygiène de vie » et il a aussi ses humeurs, détaille Olivier Humbrecht.
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— Agence France-Presse (@afpfr) February 10, 2020
L’animal est « intéressant dans des parcelles difficiles d’accès, (pentues, NDLR), ou biscornues, ou dans de très vieilles parcelles. Le cheval est alors une solution viable » même s’il « augmente de beaucoup le coût d’entretien d’une parcelle », conclut-il.
Dans le Saumurois, Thierry Germain a lui aussi fait le choix de l’équidé, mais il en mesure les limites. « On ne peut pas tout faire au cheval. Le cheval c’est énormément de travail (…) C’est joli mais il faut voir tout ce qu’il y a derrière. C’est aussi pour ça que les gens ne l’utilisent plus. Mais on le voit revenir, on a envie de reprendre du temps, plutôt que courir. »
A Sassay, pour un peu moins de 250 euros, Urbanie va travailler une demi-journée pour venir à bout des 38 ares de gamay. « Au tracteur, j’aurais mis deux fois moins de temps. Financièrement, je ne peux pas me permettre de le faire partout », confie Isabelle Pangault. Le cher cheval ne peut donc intervenir que sur des productions de qualité, dont le prix intègre aussi le coût de l’animal.
?? Le cheval et le mouton pour désherber certaines parcelles de vignes en Sologne (AFP) https://t.co/UTJP3V4lP1
— Gilles Klein (@GillesKLEIN) February 9, 2020
Si le cheval n’est pas près de supplanter le tracteur, le mouton, lui, est une solution peu coûteuse de désherbage. Et sans grand inconvénient… à condition de ne pas y avoir recours au moment de l’apparition des très tendres feuilles de vigne.
« Dès que les vendanges sont finies, il y a six mois dans l’année où on peut les mettre », explique Olivier Humbrecht. « Si l’enherbement est relativement maîtrisé, le mouton fait un très beau travail. Cela entretient très bien et ses crottes amènent de la matière organique dans la vigne. »
A Cour-Cheverny (Loir-et-Cher), le Domaine des Huards laisse paître un petit troupeau, qui rend de fiers services.
« Dans une parcelle nouvellement plantée, l’herbe avait tellement poussé qu’on ne voyait plus les pieds », raconte Alexandre Gendrier. « On a mis les moutons dedans et en une semaine le problème était réglé. Alors que physiquement, à la débroussailleuse, c’est insupportable. »
Autant laisser faire les professionnels.
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