Le président de la République s’est-il immiscé personnellement dans une affaire judiciaire ? L’exécutif a été accusé le 23 juin d’attenter à la séparation des pouvoirs après la mise au jour d’une note d’Emmanuel Macron dédouanant son bras droit Alexis Kohler alors qu’il était visé en 2019 par une enquête pour prise illégale d’intérêt.
Dans cette attestation, dont l’association anti-corruption Anticor a récemment fait état et qui a été publiée mardi par Mediapart, le chef de l’État assure que M. Kohler n’est jamais intervenu, au moment où il était son directeur de cabinet à Bercy, dans des dossiers liés à l’armateur italo-suisse MSC avec lequel il entretenait d’étroits liens professionnels et familiaux. C’est parce qu’il était soupçonné d’avoir dissimulé ces liens que le parquet national financier (PNF) avait alors ouvert une enquête le 4 juin 2018 pour prise illégale d’intérêts.
« En aucun cas, le président de la République, qui est le garant de l’indépendance de la justice, n’intervient dans le cours d’une procédure judiciaire engagée », a martelé mercredi 24 juin la porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye. Le chef de l’État « considère que ne pas verser ce document aurait été priver (Alexis Kohler) d’un exercice normal et légitime de ses droits de la défense », a-t-elle expliqué.
« L’avocat de M. Kohler a produit en juillet 2019 dans le cadre de l’enquête préliminaire en cours au parquet national financier et dans l’exercice normal des droits de la défense de son client, des notes des différents supérieurs hiérarchiques auxquels l’intéressé, Alexis Kohler, avait indiqué la situation particulière dans laquelle il était vis-à-vis de MSC », a précisé Mme Ndiaye.
« C’est dans ce cadre (…) qu’Emmanuel Macron a effectué une note factuelle portant sur l’exercice par Alexis Kohler de ses fonctions au sein du ministère de l’Économie », a ajouté la porte-parole en soulignant qu’il l’a fait « ès qualités d’ancien ministre de l’Économie et donc supérieur hiérarchique d’Alexis Kohler », a-t-elle encore fait valoir, en précisant que le courrier a été rédigé sur un document libre, « sans en-tête de la présidence de la République ».
Le député LFI Ugo Bernalicis interpelle la garde des Sceaux
Cette enquête avait été finalement classée sans suite en août 2019 peu après que la note du chef de l’État, adressée initialement à Alexis Kohler, a été envoyée par l’avocat de ce dernier au PNF. Pour expliquer l’abandon des poursuites, les magistrats avaient alors assuré ne pas avoir pu « caractériser les infractions initialement suspectées ».
Évoquant « des faits particulièrement troublants » lors des séances de questions à l’Assemblée, le député LFI Ugo Bernalicis a laissé entendre mardi que les conclusions des enquêteurs s’étaient orientées vers un classement sans suite après la note du chef de l’État et a directement interpellé la garde des Sceaux. « Étiez-vous au courant que le président de la République censé être garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire (…) était intervenu directement dans un dossier individuel ?« , a demandé M. Bernalicis alors que le débat sur l’indépendance de la justice a été relancée par des « soupçons » de pression dans l’affaire Fillon.
« Êtes-vous prête à ouvrir une enquête de l’Inspection générale de la justice ? », a-t-il poursuivi. « Votre question englobe plusieurs éléments auxquels il est très difficile ici de répondre en quelques minutes, tant la confusion qui résulte des différents éléments que vous avez amenés rend une réponse claire délicate », a répondu Mme Belloubet, sans s’exprimer directement sur la note de M. Macron.
Anticor dépose plainte
Or, Mediapart a indiqué mardi 23 juin qu’Emmanuel Macron avait à l’époque adressé aux enquêteurs une note dans laquelle il assure que son collaborateur n’est jamais intervenu dans des dossiers liés à MSC du temps de leur passage au ministère de l’Économie.
L’Élysée n’a pas souhaité faire de commentaires. Le PNF et l’avocat de M. Kohler étaient injoignables mardi soir pour commenter ces informations. Mécontent du classement sans suite, Anticor a récemment tenté de relancer l’enquête visant M. Kohler en déposant une plainte avec constitution de partie civile.
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