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Affaires Fillon, Kohler, Sarkozy: le Parquet national financier sous le feu des controverses

juin 30, 2020 14:15, Last Updated: juin 30, 2020 17:41
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Entre soupçons de pressions politiques et doutes sur son impartialité, le Parquet national financier (PNF) s’est retrouvé en quelques jours au cœur de plusieurs controverses, amenant la droite à remettre en cause l’existence même de cette arme majeure et récente de la lutte antifraude.

Les résultats récoltés en six ans – des milliards d’euros d’amendes inédites et de retentissantes condamnations de cols blancs – n’ont jamais fait taire toutes les critiques contre ce parquet spécialisé, parfois décrié comme une juridiction d’exception à la botte du pouvoir.

Mais elles s’étaient raréfiées au fur et à mesure que cette petite mais puissante institution de 18 magistrats, installée en 2014 dans le sillage du scandale Cahuzac, s’imposait comme « fer de lance » de la lutte contre l’évasion fiscale et la corruption internationale.

Une mission confirmée par le gouvernement dans une récente circulaire pénale, afin que la France, réputée à la traîne, retrouve sa « souveraineté judiciaire », à l’image de l’amende record – 2,1 milliards d’euros – infligée à Airbus en janvier, alors que la justice américaine risquait de faire elle-même le ménage.

C’est toutefois sur le terrain des affaires politiques nationales et des « atteintes à la probité », l’un des domaines de compétence du PNF, que les controverses ont repris ce mois-ci.

Il y a deux semaines, Eliane Houlette, première à avoir dirigé le PNF jusqu’à son départ en juin 2019, a affirmé avoir subi des « pressions » procédurales de la part de sa hiérarchie dans la conduite de l’affaire Fillon. Des déclarations interprétées par le camp de l’ex-candidat à la présidentielle comme l’aveu de pressions politiques pour faire tomber leur champion.

Quelques jours plus tard, le PNF a été accusé cette fois d’une indulgence suspecte envers le pouvoir. En cause? Une enquête pour conflit d’intérêts visant le secrétaire général de l’Elysée Alexis Kohler. Celle-ci avait été classée sans suite en août 2019, notamment après une lettre du président Emmanuel Macron qui dédouanait son collaborateur, révélée récemment par l’association Anticor.

A l’époque, le PNF était en plein intérim, deux mois avant l’arrivée du nouveau procureur Jean-François Bohnert.

Une troisième affaire est venue jeudi ébranler le parquet anticorruption, cette fois aussi sous le feu des critiques des avocats. En février 2014, dans les premiers jours de son existence, le PNF a demandé d’éplucher les factures téléphoniques d’une dizaine de ténors du barreau afin de trouver la « taupe » qui aurait pu informer Nicolas Sarkozy et son avocat Thierry Herzog qu’ils étaient sur écoutes dans une autre affaire.

Il faudra presque six ans pour que cette procédure, sans résultat, soit classée sans suite fin 2019.

La ministre de la Justice Nicole Belloubet a demandé vendredi à la procureure générale de Paris un rapport « sur la nature précise » de l’enquête du PNF. En fonction de ce rapport, elle « appréciera si une inspection doit être diligentée ».

Cette dernière polémique a amené plusieurs élus LR, dont leur chef Christian Jacob, à poser « la question de l’existence » du PNF, à la création duquel le parti s’était opposé sous le quinquennat Hollande.

« J’ai l’impression que ce PNF, c’est devenu une officine », a déclaré l’ex-garde des Sceaux Rachida Dati, elle-même visée par une enquête initiée par le PNF, tout comme d’autres personnalités sarkozystes.

« Le PNF ne se dispense jamais de respecter la règle de droit » a réagi M. Bohnert, interrogé par l’AFP, « il se conforme strictement aux exigences du code de procédure pénale et utilise, sans les outrepasser, les prérogatives que la Loi reconnaît aux parquets ».

« Légale ou pas légale, je ne sais pas, mais (l’enquête du PNF) est hors norme et inquiétante », a déclaré à l’AFP le bâtonnier de Paris Olivier Cousi qui prépare une riposte judiciaire.

Pour Marie-Alix Canu-Bernard, un des avocats visés, cette « suspicion constante vis-à-vis des avocats » est incompréhensible.

La méfiance est également nourrie par la propension, spécifique au PNF à privilégier des enquêtes préliminaires qui n’offre presqu’aucune voie de recours aux avocats. Contrairement aux investigations confiées aux juges d’instruction, mais qui s’éternisent souvent en matière financière.

« Les dysfonctionnements structurels du PNF ne doivent pas effacer les progrès accomplis depuis une dizaine d’année en matière de lutte contre la corruption, qui ont permis des procès dans ce domaine qui étaient inenvisageables avant », tempère un avocat familier des dossiers anticorruption.

« Sa dissolution nous ferait revenir à un stade antérieur », estime-t-il. « Il faut au contraire améliorer les processus, affronter la question de l’indépendance du PNF, et en général de tous les parquets, surtout pour les affaires politiques ».

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