AFRIQUE

Violences xénophobes en Afrique du Sud : des ressortissants sud-africains ont pillé et saccagé les magasins des expatriés

septembre 4, 2019 17:11, Last Updated: septembre 5, 2019 20:00
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Paul Dihi avance avec précaution près de la façade noircie, pour éviter de tomber dans les débris: de son immeuble de deux étages de Johannesburg, il ne reste qu’une carcasse carbonisée après l’attaque d’émeutiers contre des commerces dimanche soir, dans le quartier de Malvern.

Cet Ivoirien de 51 ans, arrivé en Afrique du Sud en 1996, fait partie des nombreux étrangers victimes des violences xénophobes qui ont enflammé Johannesburg pendant trois jours.

Dans la nuit de dimanche à lundi, « vers 2 heures du matin, un des locataires m’a appelé pour me dire que le bâtiment était en flammes », se rappelle-t-il, se plaignant du manque de réactivité des pompiers.

« Ils se sont pointés ici à 7 heures. Mon bâtiment était déjà réduit en cendres. »

Le bâtiment, que Paul Dihi louait à des commerçants nigérians, sud-africains ou zimbabwéens, était sa principale source de revenus.

L’Afrique du Sud, première puissance industrielle du continent, attire de nombreux Africains en quête d’une nouvelle vie, notamment du Zimbabwe et du Mozambique voisins. Mais dans ce pays à l’économie fragile et au fort taux de chômage (29 %), les étrangers sont devenus les boucs émissaires et les cibles des dernières violences.

Paul Dihi n’avait jamais connu un tel niveau de destruction. « Je veux réparer le bâtiment, le vendre et rentrer dans mon pays ».

De l’autre côté de la rue, une famille se retrouve du jour au lendemain sans ressources.

Dans le garage automobile Salbro Auto, seuls deux véhicules sur 35 ont survécu. Les autres ont été brûlés ou bien volés: dans Jules Street, les pillards ont pris le dessus sur la police.

« Ça représente beaucoup d’argent », explique Abdallah Salajee, qui a repris récemment le garage de son père. « Nous n’avions pas d’assurance. Nous devons repartir à zéro. »

Venus d’Inde, les Salajee vivent dans le pays depuis les années 1980.

« Nous sommes des Sud-Africains, » explique Salajee. « Qu’ont-ils gagné à faire cela? »

Dans Malvern, des hommes en haillons se sont rassemblés autour des restes de voitures incendiées, pour tenter de récupérer des morceaux de métal, dans le but de les revendre.

Un calme tendu est revenu mercredi à Johannesburg, la police a dispersé les manifestants et a renforcé ses patrouilles dans la zone. 289 personnes ont été arrêtées depuis dimanche.

A 5 km des luxueux centres commerciaux de Sandton, l’un des quartiers les plus riches de Johannesburg, des femmes fouillent encore dans un tas de salades abandonnées par les pillards.

Des commerces du township pauvre d’Alexandra ont aussi été pillés et la plupart des boutiques sont restées fermées mercredi de crainte de nouvelles violences.

Enver Lombard, un commerçant sud-africain, a été l’un des seuls à rouvrir après avoir caché son stock pendant la nuit.

« Nous sommes venus à 4 heures du matin et avons rapporté la marchandise de nos dépôts parce que nous devons travailler », explique Lombard, âgé de 80 ans, au milieu d’un stock éclectique de marchandises : appareils DVD, CD et baskets…

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