Airbus s’attaque « aux pointages laser » qui frappent l’aviation

8 décembre 2015 10:02 Mis à jour: 8 décembre 2015 12:17

Les incidents rencontrés avec des individus isolés qui utilisent des lasers à 5 $ sur les avions sont devenus un danger croissant pour les pilotes. C’est aussi un épineux problème qui, jusqu’ici, a tenu les experts en sécurité en échec.

Pour la Fédération de l’Aviation (FAA), même un faisceau de lumière de taille sténopé (de petit diamètre) lorsqu’il atteint l’œil peut être un danger pour les avions volant sous les 11 700 pieds. Dans un cockpit, le petit faisceau devient un éclair aveuglant de grand diamètre.

Malgré les différentes mises en garde des gouvernements et des associations de pilotes, ainsi que les sanctions brandies contre les délinquants, le problème n’a fait qu’empirer. Toutefois, le constructeur d’avions Airbus a peut être trouvé une solution qui pourrait mettre tout le monde d’accord.

Déviation du faisceau laser

Depuis l’année dernière, le siège français d’Airbus a établi un partenariat avec la société canadienne d’ingénierie et de matériel optique Lamda Garde pour développer un film transparent applicable sur les fenêtres du poste de pilotage. Ce film visera à protéger les pilotes contre les faisceaux laser aveuglants.

Le film en cours de développement bloquera des rayons laser de 532 nanomètres (un milliardième de mètre), le type de laser le plus couramment utilisé dans les incidents avec les avions.

En juin 2014, les chercheurs ont complété avec succès les tests du film en laboratoire. En une année, ils ont produit une grande quantité de films qui serviront à couvrir une fenêtre du poste de pilotage.

Les essais en vol ont commencé le 2 novembre, pour déterminer l’impact du film sur la vision et le confort des pilotes. Néanmoins, Mary Anne Greczyn, responsable de la communication auprès d’Airbus Amérique, prévient que les films actuels ne sont pas encore assez au point pour être utilisés dans l’aviation.

Dans un courriel, Greczyn a expliqué : « Nos avancées techniques sur le produit sont en progression, mais au final tout équipement destiné à l’aviation doit passer un processus de certification », avant d’ajouter : « Nous ne contrôlons pas les délais, c’est du domaine des autorités de certification de la navigation».
Jusqu’à présent, les tests n’ont révélé aucun problème majeur, se réjouit Greczyn, et Airbus est déjà tourné vers l’application de sa technologie dans le monde réel.

La compagnie précise que « le filtre sera probablement intégré dans le pare-brise (grâce aux nanotechnologies) des prochains appareils, mais posé comme un film externe sur la flotte actuelle ».
Dans l’idéal, le film doit être imperceptible. Mais étant donné qu’il est conçu pour bloquer la lumière, il est presque impossible de le faire complètement transparent. Néanmoins, Greczyn assure que l’équipe a atteint la presque transparence.

« Puisque le film bloque la lumière en 532 nm, ‘oui’, il pourrait interférer, mais la bande d’atténuation est si « petite » que le film semble tout à fait transparent, même de nuit. C’est un sérieux problème, que nous avons surmonté en 2015 », dit-elle.

Greczyn précise que l’objectif principal est de prouver que les avions peuvent voler en toute sécurité, et dans toutes les conditions et tous les environnements. Elle a ajouté qu’ils sont très optimistes sur ce point.

La menace Laser

Il y a de cela vingt-cinq ans, un laser vert coûtait 100 000 $ et avait la taille d’une grande table de salle à manger. Aujourd’hui, les lasers à bas prix coutent 5 $ et les lasers commerciaux de plus grande puissance entre 20 $ à 1 500 $.
La loi fédérale autorise la vente de lasers de plus de 5 milliwatts tant qu’il sont conformes aux exigences du produit de la FDA et qu’ils ne sont pas vendus comme « pointeur laser ».

Aux États-Unis, les attaques laser ont fortement augmenté au cours de l’année écoulée. En 2010, la FAA avait reçu 2 837 signalements d’attaques aux lasers, 3 894 en 2014, et à la date du 16 octobre dernier, elle est déjà à 5 352 rapports — soit une moyenne de 14 incidents journaliers.
Selon le FBI, les incidents laser ne sont pas coordonnés et dans la plupart des cas, les individus sont des adolescents, voire des hommes dans la trentaine. Les raisons couramment invoquées pour le pointage laser varient, des intentions malveillantes, à la curiosité, voire à l’ignorance.

Une attaque au laser peut perturber et désorienter un pilote et peut provoquer une altération temporaire. Les conséquences peuvent être mortelles, si elles se produisent lors de phases critiques du décollage ou de l’atterrissage.
On n’enregistre pour l’instant aucun accident mortel, mais pour la plupart des experts de l’industrie, ce n’est plus qu’une question de temps. Toutefois, de nombreux pilotes ont subi des dommages à la rétine et autres blessures.

Des campagnes de dissuasion peu dissuasives

Le 14 février 2012, le président Barack Obama a signé une loi, faisant du pointage laser sur un avion un crime fédéral. La peine maximum actuelle pour les coupables est de cinq ans de prison et une amende de 250 000 $. Avec les preuves d’une intention de mettre en danger le pilote, la peine maximale sera de 20 ans, conformément à la loi fédérale.

En février 2014, le FBI a lancé une campagne de dissuasion pour décourager les gens d’actes de pointage lasers sur les avions, y compris en offrant une récompense de 10 000 $ pour toute information menant à une arrestation. La récompense était disponible pendant 60 jours dans 12 agences de terrain du FBI.

Selon un communiqué du FBI, au cours de la période de campagne, les grandes régions métropolitaines, situées aux alentours de ces 12 agences, ont rapporté une baisse des incidents enregistrés de l’ordre de 19 %.

Le mois de juin suivant, la campagne est devenue nationale. Elle a offert une prime de 10 000 $, pendant 90 jours, dans les 56 agences opérationnelles du FBI.

Mais l’impact des campagnes s’est vite résorbé et les attaques au laser sont reparties à la hausse à un rythme effrénée, particulièrement cette année.
Les attaques ont connu une augmentation dans le monde entier, et pas uniquement aux États-Unis. Ainsi, le Canada, l’Australie, l’Europe, le Moyen-Orient, et le Royaume-Uni signalent régulièrement des incidents.
Parmi les villes non-américaines les plus touchées, on cite Londres, Dubaï, Toronto, Melbourne et Glasgow, selon les données de l’Association Internationale du transport aérien.

Ce sont des « attaques », estiment les pilotes

Le Capitaine Craig Hall, président du comité de sécurité de la Fédération Internationale des Pilotes de ligne (IFALPA) a récemment témoigné dans un article du magazine de la Fédération InterPilot. Pour lui, l’expression « attaques au laser » est celle qui convient le mieux pour décrire le pointage délibéré par des auteurs qui devraient être pleinement conscients des graves conséquences de leurs actes.

De son côté, le Capitaine Robert Hamilton, pilote de PSA Airlines et président du conseil de sécurité de l’Association Internationale des Pilotes, relate dans une vidéo de sensibilisation du FBI son expérience d’une attaque au laser.
Après l’attaque, il a connu un aveuglement, une douloureuse sensation de brûlure dans les yeux et de multiples incidents de réfléchissement en plein vol.

Pour Hamilton, « l’attaque provoque une grande perturbation dans le poste de pilotage, c’est un vrai danger pour la sécurité, qui peut occasionner un accident d’avion ».

« Sur le coup, vous vous demandez, comment vous allez pouvoir réussir à terminer votre vol en toute sécurité. Comment atterrir quand on ne voit plus ? En tant que pilote, être capable de voir est un élément critique », a-t-il ajouté. L’industrie aéronautique conseille aux pilotes qui sont exposés aux attaques laser, d’engager le pilote automatique, de se protéger les yeux, de détourner les yeux du faisceau laser, de ne pas se frotter les yeux, et si possible de manoeuvrer de manière à éviter le rayon perturbateur.

Que peut-on faire de plus ?

La FAA teste toute une gamme de stratégies pour lutter contre le problème, mais elle reconnaît être toujours à la recherche de la meilleure option.
Sur son site internet, elle énumère des stratégies comme la sensibilisation du public aux risques du laser, l’incitation à signaler les incidents, et la restriction à la vente de certains dispositifs laser pour le grand public.

Le site présente également de nombreuses mesures, destinées aux fabricants, afin qu’ils apposent des étiquettes d’avertissement sur leurs dispositifs laser ; sur la conduite d’études sur la protection des yeux, et le bien-fondé du déploiement de système de détection et d’enregistrement de laser sur des avions civils.

Étant donné les antécédents de réussite des stratégies de sensibilisation et de dissuasion jusqu’ici, il est peu probable qu’elles puissent avoir un impact majeur. Jusqu’ici, le film défensif développé par Airbus semble être l’option la plus prometteuse pour résoudre le problème une fois pour toutes.

 

Version anglaise : Airbus Pioneers Solution to Combat Airplane Laser Attacks

Soutenez Epoch Times à partir de 1€

Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?

Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.