Saviez-vous que les policiers américains ont accès sur leurs tableaux de bord à des prédictions d’infractions ? Que le syndicat des juges français s’est récemment indigné de l’utilisation d’algorithmes dans le traitement des données liées aux décisions de justice? Dans de nombreux domaines les algorithmes et leurs applications progressent sans cesse. On entend dans la bouche des ingénieurs de la R&D de Google ou d’IBM de curieux discours aux accents prophétiques, que l’on croirait tirés des romans d’Asimov ou de Philip K.Dick sur ce que sera le monde et l’humain du futur.
Mais tout ceci est bien sérieux, et nul besoin de s’en convaincre quand on sait que ces pitchs exaltés sont prononcés devant des parterres d’investisseurs aux portefeuilles gonflés. Et ces avancées concernent tout aussi bien le domaine public.
À la racine de ces projets, on trouve souvent une utilisation d’algorithmes complexes. La clé de l’utilisation de ces formules réside dans l’analyse réussie d’un ou plusieurs ensembles de données permettant de déterminer un choix ou préconiser une action. Bienvenue dans l’univers des predictive analytics, un domaine où l’algorithme est roi. Ci dessous, 6 exemples de prédictions algorithmiques.
1. Optimiser les trajets en voiture
Cette idée n’est certes pas nouvelle, mais continue à progresser et constitue la pierre angulaire de logiciels comme Uber ou Lyft, qui espèrent se différencier de la concurrence en fournissant une assistance toujours meilleure aux conducteurs.
En se basant sur les données publiques de trajets de taxis en ville entre 2010 et 2013, une équipe de chercheurs du MIT a développé un algorithme permettant d’améliorer la circulation des voitures dans les villes américaines. Application : une flotte de 3 000 véhicules partagés pourraient techniquement remplacer les 14 000 taxis new-yorkais et véhiculer plus rapidement les usagers. Daniela Rus, professeure qui a dirigé l’équipe, a indiqué que le système permettrait aux conducteurs de « travailler moins, en diminuant le trafic, en améliorant la qualité de l’air et en diminuant la durée et le stress des trajets quotidiens ».
2. Détecter la formation des virus
Plusieurs laboratoires dans le monde, tels qu’IBM ou Fastgenes, ont eu l’idée de mettre la technologie de la miniaturisation au service de la santé – un domaine extrêmement lucratif.
On sait que plus une maladie est détectée tôt, meilleures sont les chances de guérison. C’est dans cette optique qu’a germé l’idée d’un « laboratoire sur puce ». Objectif : mettre au point une puce électronique capable de gérer un ensemble d’analyses pratiquées d’ordinaire par différents instruments. Les ingénieurs d’IBM assurent qu’ils pourraient, à l’avenir, permettre à ces puces d’isoler des particules de 20 nanomètres de diamètres, soit l’échelle des virus. Ainsi, l’apparition de certaines maladies telles que Parkinson, Alzheimer, Huntington ou le virus Zika pourraît être traitées avant même l’apparition des premiers symptômes. D’après Jean-Louis Viovy, directeur d’une équipe du CNRS dédiée aux études portant sur les Macromolécules et microsystèmes en biologie et médecine, « Ces systèmes peuvent aider à mieux comprendre comment les neurones traitent l’information, mais aussi à élucider les mécanismes de certaines maladies neurologiques« .
3.Prédire un crime
Dans Minority Report, nouvelle de science fiction écrite par Phillip K.Dick et porté à l’écran avec Tom Cruise dans le rôle vedette, un policier utilise un système permettant de voir les crimes futurs en analysant les émotions humaines.
Loin du Washington des années 2054, on trouve une version « réelle » de ce système, développé à Cergy Pontoise par la division analyse et investigation criminelle au service central du renseignement criminel (SCRC).
« À la différence du film dans lequel les autorités ciblent les individus, nous nous attachons uniquement de façon massive aux faits et aux actes criminels », a indiqué Patrick Perrot, qui dirige le service. Pour « décongestionner les tribunaux », son équipe s’est servie de données recueillies entre 2008 et 2013 pour construire un modèle capable de prévoir les tentatives de cambriolages. Avec une marge d’erreur de 5 à 7%, d’après Patrick Perrot.
L’algorithme cible principalement les vols, les agressions sexuelles et les viols, les cambriolages ou encore les trafics de stupéfiants – et exclut les homicides, d’une nature moins prévisible. Il utilise la même méthode que celle du secteur marchand, le lissage exponentiel. Si le système n’en est qu’à ses débuts dans la banlieue parisienne, les policiers américains utilisent déjà un même type de logiciel, nommé PredPol, dans plusieurs grandes villes américaines.
4. Gérer une entreprise
Le projet s’appelle « Livre du futur », il est signé par le milliardaire Ray Dalio, co-fondateur de Bridgewater Associates. À l’âge de 67 ans, cet excentrique PDG, à la tête d’un hedge fund de 160 milliards, entend laisser les clés de son entreprise à un algorithme.
Celui-ci pourrait prendre 75% des décisions du groupe, saurait décider de l’embauche ou du licenciement d’un salarié, du comportement d’un salarié passant un coup de téléphone. David Ferrucci, ancien d’IBM, est aux commandes d’une armée d’ingénieurs pour réaliser le désir du magnat.
Moins que de prévoir les résultats de son entreprise, l’algorithme se propose surtout d’imposer aux employés la meilleure conduite professionnelle pour arriver aux objectifs de l’entreprise.
5. Prédire l’issue d’un procès
La mise en ligne d’un grand nombre de verdicts devraient bientôt permettre de décrypter les éléments en jeu lors des procès. Quels arguments sont les plus efficaces, combien peut-on obtenir d’indemnités, quelles chances de succès… Le barreau lillois est le premier en Europe à travailler dessus.
En partenariat avec une startup, il développe un logiciel permettant d’ « enrichir la stratégie judiciaire ». « Jusqu’alors, un avocat faisait des estimations en fonction de son expérience et un peu au pifomètre. Mais là, c’est la rencontre des mathématiques et du droit », explique Stéphane Dhonte, bâtonnier au barreau de Lille. Cependant, il précise qu’un algorithme ne remplacera jamais un juge ou un avocat. Il est en effet peu envisageable de confier l’issue d’un jugement à une machine.
6. Éviter les nanards américains
Selon Nadira Azermai, économiste et créatrice de la startup Scriptbook, « Hollywood rêve de pouvoir éviter les flops ». En passant au crible 400 scénarios et 10 000 films, elle a tenté d’isoler les paramètres omniprésents des échecs commerciaux – et en a trouvé au passage 220. Il est néanmoins difficile de comprendre ce qui fait un bon scénario ; s’il est logique de retrouver des lieux communs comme la bataille du bien et du mal, un héros attachant ou, qui sait, une invasion de zombies, il est plus dur de faire preuve de créativité.
L’économiste, qui s’est lancé dans un étrange exercice de psychanalyse, a indiqué avoir rencontré des obstacles en disséquant le caractère de John McClane, un personnage joué par Bruce Willis dans les Die Hard, une série à succès. « Le héros n’est pas une ordure mais c’est le flic râleur et cynique donc on a dû recruter une équipe pour annoter les données et répondre à des questions pour indiquer si le héros était attachant », a-t-elle déclaré. On ne rigole pas à Hollywood.
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