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Alibaba et les millions de copieurs: la Chine, paradis en ligne de la contrefaçon

novembre 11, 2018 7:32, Last Updated: novembre 11, 2018 7:40
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Parfum « Gogo Chenale », chaussures « Ababis »ou boxers « Caiwen Kani » copiés sur Calvin Klein: malgré les efforts du géant chinois de l’e-commerce Alibaba, organisateur dimanche de la plus grande opération de soldes au monde, les contrefaçons pullulent toujours sur ses plateformes. Aux prises avec des sanctions économiques américaines, la Chine assure renforcer sa protection de la propriété intellectuelle des entreprises, un dossier crucial dans la guerre commerciale entre Washington et Pékin.

Le président Xi Jinping a réaffirmé lundi sa volonté de « sanctionner résolument » les vendeurs de contrefaçons. Et une nouvelle loi obligera bientôt les géants de la vente en ligne, dont Alibaba, à expurger leurs sites des produits litigieux. Comme chaque 11 novembre, le groupe organise une journée de promotions monstres. A l’image du « Black Friday » américain, cet événement surnommé la « Fête des célibataires » en raison de la succession de « 1 » dans la date (11/11)  est l’occasion de doper les ventes.

L’an passé, Alibaba avait enregistré en 24 heures quelque 25 milliards de dollars (22 milliards d’euros) de transactions… soit davantage que le PIB de l’Islande. Présente sur pratiquement tous les smartphones en Chine, son application Taobao est l’une des plus grandes plateformes mondiales de commerce en ligne (634 millions d’utilisateurs actifs mensuels). Mais si la grande majorité des produits vendus sont authentiques, beaucoup sont des contrefaçons ou des imitations.

On y trouve par exemple des chaussures de sport « Ababis », qui reprennent le logo et les bandes caractéristiques d’Adidas. Prix imbattable: 39 yuans (5 euros). Des souliers « Balenciaca » s’écoulent pour 128 yuans (16 euros). Le site regorge de faux sacs à main Louis Vuitton, vendus dès 118 yuans (15 euros). Son concurrent Longchamp n’est pas épargné: des copies de son sac phare Nylon s’achètent pour un prix similaire sous la marque « Long Chang ».

De faux polos Lacoste se trouvent dès 68 yuans (9 euros), avec en logo un crocodile caractéristique parfaitement brodé. Dans les rues de Pékin, des consommateurs avouent à l’AFP avoir du mal à distinguer le vrai du faux. « Je ne vois pas vraiment la différence », confie un homme de 26 ans devant un slip « Caiwen Kani ». « Ça semble authentique. C’est original »« Je pourrais l’acheter », admet Wang Yu, 37 ans, devant une boîte de jeu de construction « Lepin » (copié sur Lego) et floqué du nom de la saga galactique « Star Wnrs » (sic), vendue 15 yuans (1,90 euro). « Je pense que tous les produits se copient les uns les autres », philosophe-t-elle. « Ça ne me dérange pas tant que ça convient aux enfants. Mais à condition que ce soit de bonne qualité ».

Au rayon alcools, on trouve du whisky « Jack David ». Ou encore des vins présentés comme des Bordeaux, mais aux noms farfelus fleurant davantage les ersatz que les vignes du Médoc: « The Heart of Freedom », « Bravespirit », « Dragon Were General », un rouge qui vante son « impression de sincérité » en français dans le texte… Tous sont vendus moins de 2,50 euros TTC la bouteille. Les Etats-Unis ont de nouveau placé fin 2016 Taobao sur leur liste noire des « marchés notoirement réputés » pour vendre des biens contrefaits et violer la propriété intellectuelle.

Selon l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), la contrefaçon ferait perdre 434.000 emplois en Europe, ainsi que 60 milliards d’euros chaque année. Dans un communiqué transmis à l’AFP, Alibaba assure que ses méthodes de protection de la propriété intellectuelle sont « parmi les meilleures du secteur » et dit être « en permanence à la recherche de moyens de les améliorer ». Le groupe assure avoir engagé 48 poursuites judiciaires durant l’année écoulée contre des vendeurs de contrefaçons.

« Une entreprise sur deux en est victime. Elles engagent des frais gigantesques pour lutter contre ce fléau, qui peuvent atteindre 10% de leur chiffre d’affaires », indique à l’AFP Delphine Sarfati-Sobreira, directrice générale à Paris de l’association Unifab, qui regroupe les industries engagées dans la lutte contre la contrefaçon. « Les PME sont souvent mises à mal car elles n’ont pas le budget adéquat pour se structurer et se défendre. Elles font face à des difficultés qui parfois les poussent à abandonner, ou pire, à mettre la clé sous la porte. »

Mais l’impunité pourrait bientôt cesser. Une nouvelle loi chinoise sur le commerce en ligne entrera en vigueur le 1er janvier 2019. Elle rendra les géants du web responsables en cas de présence de contrefaçons sur leurs plateformes. « Mettre la responsabilité sur les sites est de l’hypocrisie pure », estime cependant Hubert Ricard, conseiller export de la société « La Guyennoise »   dont « 5 millions de bouteilles » de Bordeaux sont copiées chaque année en Chine. Selon lui, les autorités dans certaines provinces du centre et de l’est du pays font « très souvent partie des réseaux de fabrication et de distribution des copies de vins. »

D.C avec AFP

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