Une alliance entre les États-Unis et la Russie est peu probable

6 décembre 2016 09:04 Mis à jour: 6 décembre 2016 09:04

Peu de temps après l’annonce de l’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis le 9 novembre, le président russe Vladimir Poutine l’a félicité et a partagé son espoir qu’ils puissent « travailler ensemble pour sortir la relation États-Unis-Russie de la crise actuelle. »

Quelques jours plus tard, le 14 novembre, Trump et Poutine avaient une conversation téléphonique, au cours de laquelle ils ont « exprimé leur souhait de vigoureux efforts conjoints pour normaliser les relations et poursuivre une coopération constructive sur la plus large gamme possible de problèmes », selon un communiqué du Kremlin.

Bien que Trump et Poutine puissent partager le souhait de réparer les liens entre leurs pays, ce sera probablement un processus difficile et délicat.

« Les risques d’erreurs ou de mauvais jugement dans les relations États-Unis-Russie et OTAN-Russie sont inacceptables », a déclaré Sir Adam Thomson, directeur du European Leadership Network, un groupe de réflexion londonien axé sur les questions de défense et de sécurité.

M. Thomson, ancien ambassadeur britannique de l’OTAN, estime que l’amélioration des relations américano-russes pourrait, pour les deux parties, « accroître la prospérité, diminuer les coûts de défense, améliorer la collaboration sur les problèmes régionaux communs et réduire les tensions entre l’OTAN et la Russie ».

Il a dit dans un courriel que cette question est pressante parce que « la confrontation depuis que la Russie a annexé la Crimée est sans doute plus dangereuse qu’à n’importe quel moment depuis les années 1960 ».

« Mais ça dépend de la façon dont ça se fait », dit-il. « Les alliés européens nerveux ne remercieront pas le futur président Trump de décider des questions touchant l’OTAN sur leurs dos. Les Russes voudraient des restrictions sur ce qu’ils perçoivent comme de l’interventionnisme américain. »

La situation diplomatique pour les deux pays pourrait facilement revenir au point où elle en était dans les années 2000, a déclaré Thomson, mais il y a un grand écart entre ce que chaque partie considère comme un «  comportement acceptable ».

« Les personnes qu’il nomme ne sont pas nécessairement en ligne avec son point de vue [sur la Russie]. 
– Sir Adam Thomson, directeur, European Leadership Network

« Il n’y a pas de baguette magique pour mieux faire et pas d’alternative à la reconstruction minutieuse de la confiance, de la transparence et de la responsabilité », a-t-il rappelé. « La diplomatie superficielle à court terme ne pourrait que conduire à un plus grand malheur mutuel dans l’avenir. »

Selon James Carden, rédacteur en chef du Comité américain pour l’Accord Est-Ouest, même si Trump et Poutine partagent l’espoir de réparer les relations et d’établir des liens plus étroits, plusieurs facteurs externes pourraient facilement faire échouer leurs efforts.

« Je pense qu’il n’est pas réaliste de penser que Trump sera en mesure de conduire seul la détente avec la Russie », a déclaré dans un courriel Carden, qui est également un ancien conseiller de la Commission présidentielle américano-russe au Département d’État américain.

Beaucoup de gens au sein de l’équipe de Trump, y compris son chef de la CIA, le représentant Michael Pompeo, son conseiller à la sécurité nationale, le général Michael Flynn, et son conseiller national adjoint en matière de sécurité, K.T. McFarland – semblent être en faveur du rejet de l’accord nucléaire iranien.

Cela pourrait « grandement bouleverser le gouvernement russe, qui a des liens étroits avec l’Iran et qui est un des signataires de l’accord », a déclaré Carden, tout en notant que certains membres de l’équipe de Trump, comme Flynn, pourraient également soutenir des liens plus étroits entre les États-Unis et la Russie.

Selon Fred Harrison, un économiste et auteur qui a travaillé à la transition de la Russie vers une économie libre après la chute de l’Union soviétique, les vues de Trump « ne sont pas alignées avec ce que ses conseillers proches semblent préférer … qui sont hostiles à la Russie et à la plupart de ses alliés au Moyen-Orient. »

« Il n’y a pas de baguette magique pour mieux faire et pas d’alternative à la reconstruction minutieuse de la confiance, de la transparence et de la responsabilité » – Sir Adam Thomson, directeur, European Leadership Network

Cela est lié à un problème plus profond, que Thomson, Carden et Harrison ont souligné: les États-Unis et la Russie ont des positions différentes dans les alliances mondiales. Par exemple, les États-Unis appuient le déploiement de troupes de l’OTAN le long de la frontière russe, ont beaucoup de différends avec l’Iran et soutiennent les forces rebelles en Syrie. La Russie, quant à elle, s’oppose aux troupes de l’OTAN déployées le long de sa frontière, entretient des liens étroits avec l’Iran et soutient les forces gouvernementales syriennes qui combattent les rebelles.

Les efforts entre Trump et Poutine pour établir des liens plus étroits seront probablement affectés par les politiques de chaque partie avec les autres nations sur des points très sensibles.

Carden croit que Trump aura du mal à sortir des engagements lancés sous la présidence de Barack Obama, comme fermer la prison de Guantanamo Bay, tout comme Obama s’est retrouvé coincé avec les engagements lancés par l’ancien président George W. Bush, comme les guerres en Irak et en Afghanistan.nPendant ce temps, des médias, des groupes de réflexion, des lobbies du Congrès, l’opinion publique, et des partenaires internationaux font pression sur la politique gouvernementale.

Obama a du composer prudemment avec ces divers intérêts, a rappelé Carden, en citant l’exemple de la guerre ukrainienne.

« L’OTAN et le Général [Philip] Breedlove ont travaillé sans relâche en coulisse pour faire pression sur Obama afin d’internationaliser la guerre civile là-bas en s’impliquant de plus en plus », a-t-il déclaré.

« L’OTAN sera l’un des principaux adversaire du président Trump s’il tente d’atténuer les tensions avec la Russie. » Déjà la pression monte pour empêcher cet élan, dit-il.

« Il semble y avoir un mouvement de préemption à la base qui cherche à empêcher une politique de détente avec la Russie avant même qu’elle ne sorte de terre ».

Lien version anglaise : US–Russia Alliance Is Unlikely

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