Pour la troisième fois, vous commencez à décharger le lave-vaisselle. Quelques assiettes supplémentaires trouvent leur place dans le placard avant que les cris de l’enfant en bas âge dans l’autre pièce ne viennent briser le silence que vous aviez bêtement tenté de vous créer. Encore une fois.
Vous vous précipitez dans la pièce voisine. Sa tour de blocs s’est encore effondrée tout comme vos espoirs de terminer le moindre travail ménager. Que faire ?
Des scénarios comme celui-ci sont familiers à tous les parents. L’une des joies des jeunes enfants est leur désir de passer du temps avec vous, leur besoin d’attention, de réconfort et d’amour. Le problème se pose lorsque d’autres choses réclament votre attention : la vaisselle sale, le filtre à huile de la voiture, le jardin envahi par les mauvaises herbes, le linge qui traîne dans le couloir.
Il n’est pas toujours possible de concilier ces exigences contradictoires, mais une stratégie souvent négligée pour les harmoniser consiste à intégrer autant que possible vos enfants dans votre routine de travail. En faisant preuve de créativité, vous pouvez combiner le besoin d’attention de votre enfant et la nécessité d’accomplir les tâches ménagères en l’associant à votre travail.
En plus de vous aider à accomplir davantage de tâches, cette stratégie enseigne aux enfants, dès leur plus jeune âge, les joies d’un travail utile et les aide à développer une solide éthique du travail. De plus, la plupart des enfants aiment avoir l’impression de faire quelque chose d’important et d’utile.
De petits enfants dans un grand monde
Souvent, nous nous efforçons de modeler le monde des adultes sur celui de nos enfants, en répondant à leurs besoins et à leurs désirs et en reléguant les tâches des adultes au second plan. C’est parfois nécessaire. Mais à long terme, les enfants doivent apprendre à s’adapter au monde des adultes dans lequel ils vivront un jour et auquel ils contribueront. Pourquoi ne pas commencer tôt, d’une manière adaptée à l’âge de l’enfant ? Intégrer les enfants dans les tâches ménagères d’une manière amusante et créative est un moyen d’y parvenir.
Comme l’a écrit la psychologue Laurie Hollman : « Nous voulons tous que nos enfants participent aux tâches ménagères, fassent leur lit, apportent leur assiette jusqu’à l’évier, ramassent les serviettes par terre et organisent leur sac à dos. Cela nous aide, mais plus important encore, nous enseignons la valeur du travail collaboratif partagé. L’enseignement de l’éthique du travail commence tôt. »
À quoi cela ressemble-t-il concrètement chez les plus jeunes ? Permettez-moi de vous donner un exemple tiré de ma propre expérience. Dès son plus jeune âge, ma fille de deux ans s’est intéressée au lave-vaisselle. Chaque fois que nous l’ouvrions, elle voulait grimper sur la porte ouverte et en sortir des objets. Maintenant qu’elle est en âge de comprendre les instructions de base, ma femme a transformé ce rituel en un jeu qui l’aide au lieu de l’entraver dans son travail.
Elle sort le plateau à couverts du tiroir et le pose sur le sol. Elle demande ensuite à notre fille de prendre les couverts propres dans le lave-vaisselle et de les ranger dans les emplacements appropriés du plateau à couverts (uniquement les objets non tranchants, bien sûr).
Notre fille s’empresse de faire correspondre les fourchettes et les cuillères du lave-vaisselle avec celles du plateau, en triant tout et en le plaçant au bon endroit. Ma femme a créé un jeu d’association gratuit pour les tout-petits qui accélère le processus de lavage de la vaisselle au lieu de l’entraver. De plus, elle apprend à notre fille qu’elle joue un rôle dans le fonctionnement de notre foyer. Notre fille apprendra que nous attendons d’elle qu’elle assume des responsabilités qui grandiront avec son âge.
Une autre situation : j’ai récemment abattu un arbre mort sur ma propriété. Le fait d’abattre un arbre et de le couper pour en faire du bois de chauffage laisse beaucoup de branches, de brindilles et d’écorces dans l’herbe. Le nettoyage peut prendre beaucoup de temps. Plutôt que de laisser la fillette avec mon épouse pour que je puisse ramasser, je l’ai emmenée avec moi et je lui ai expliqué ce que nous devions faire : ramasser des brindilles et les mettre dans le chariot. Elle a bien compris l’idée et s’est amusée à se promener dans le jardin et à ramasser des petits bouts de bois et d’écorce pour les mettre dans le chariot. Elle était particulièrement heureuse de « pousser » le chariot pendant que je le tirais vers le tas de petites branches.
L’aide de ma fille a-t-elle permis de réduire considérablement le temps nécessaire pour nettoyer le jardin ? Non. Mais cela ne m’a certainement pas ralenti et, plus important encore, cela lui a appris qu’elle a un rôle à jouer, même s’il est minime, dans le monde du travail des adultes, dans l’accomplissement de tâches utiles. Cela lui a appris que nous pouvons nous lier par le travail, et pas seulement par le jeu, et que le sort humain qui consiste à gagner son pain « à la sueur de son front » peut être une réalité agréable avec un sens et qui nous unit. Il s’agissait d’un petit exemple, mais nous pouvons continuer à nous appuyer sur de telles expériences au fur et à mesure qu’elle grandit.
Les enfants peuvent assumer des rôles de plus en plus importants au sein du foyer à mesure qu’ils grandissent. S’ils ont commencé par des tâches simples lorsqu’ils étaient tout-petits, on peut raisonnablement s’attendre à ce qu’ils aident à tout faire, de la cuisine au ménage en passant par l’entretien de la voiture, la tonte de la pelouse, les réparations de la maison et les soins aux animaux.
Le travail est utile
En plus de faire l’expérience de l’importance de contribuer à quelque chose de plus grand que soi, ils apprendront également la dure réalité qu’il faut travailler pour obtenir quelque chose dans la vie. Selon un article de Hammond Psychology & Associates : « Il est important de faire comprendre à nos enfants que rien n’est gratuit dans la vie. […] C’est pourquoi le fait d’enseigner cela aux enfants le plus tôt possible peut contribuer à leur inculquer une solide éthique du travail. Pour certains parents, cela se traduira par l’obligation de faire des corvées pour « gagner » du temps de jeu. […] Voici un exemple que j’ai souvent entendu : tu dois faire tes devoirs avant de pouvoir jouer aux jeux vidéo. Croyez-le ou non, c’est un excellent moyen d’inculquer à vos enfants une éthique de travail positive. »
L’épanouissement général d’un enfant peut être favorisé par des responsabilités ménagères adaptées à son âge. En effet, l’épanouissement consiste, dans une large mesure, à assumer des responsabilités. Comme toute vertu humaine, cette capacité se construit lentement et progressivement au fil du temps, par des actions répétées qui forment des habitudes. Nous devons commencer modestement et construire à partir de là.
Les jeunes adultes auront du mal à assumer la responsabilité de fonder leur propre famille et de s’en occuper s’ils ne se sont pas d’abord occupés de leurs jeunes frères et sœurs, de leurs animaux ou, au moins, de certains aspects du bon fonctionnement d’un foyer. On ne peut pas s’attendre à ce qu’ils assument ces responsabilités s’ils n’ont pas d’abord appris à s’occuper de leur propre chambre à coucher, à faire leur lit, à nettoyer leur propre désordre, etc. Même ces tâches seront plus faciles à accomplir s’ils ont réussi des tâches plus simples comme trier les couverts ou ramasser des petites branches. En plus de préparer les enfants à la vie, ces pratiques simples renforceront leur estime d’eux-mêmes et leur sens de l’autonomie.
Selon Mme Hollman, le sentiment de réussite que les enfants éprouvent lorsqu’ils accomplissent une tâche qui leur a été confiée les met sur la voie d’une vie positive. « Lorsque les enfants ont le sentiment de réussir à l’âge de deux ou trois ans, cela devient un mode de vie. Même un enfant de deux ans peut ramasser une serviette sur le sol de la salle de bains et être remercié pour son aide. N’oubliez pas les remerciements », écrit-elle.
Notez que je ne suggère pas que les enfants doivent « s’élever eux-mêmes » ou être alourdis par des responsabilités excessives qui appartiennent en réalité à leurs parents. Ce sont les parents qui doivent s’occuper d’eux, et non l’inverse. Je suggère plutôt que les enfants de tous âges participent à leurs propres soins et à ceux de la maison dans son ensemble, et que cette participation augmente avec le temps pour les préparer à l’âge adulte.
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