« Paratonnerres d’une société désaxée », premiers mais aussi derniers recours des habitants… Après le choc de la démission du maire de Saint-Brevin, les élus des petites villes réunis en congrès à Millau (Aveyron) questionnent le sens de leur mission.
Avec leurs cortèges particulièrement fournis lors des mobilisations contre la réforme des retraites, les petites villes furent, avec les villes moyennes, aux avant-postes de la contestation contre la politique du gouvernement. Une colère dont les motivations vont « bien au-delà des retraites », assurent les maires de l’Association des petites villes de France (APVF), qui réclament plus de « rééquilibrage territorial ».
« C’est toute une partie de notre territoire, celle qui souffre le plus de la désertification médicale, des conséquences de l’inflation, notamment sur le coût de l’énergie et de l’essence, celle qui souffre de la disparition et de la déshumanisation des services publics (…) qui a manifesté son inquiétude », constatent-ils dans une résolution publiée vendredi.
« Les paratonnerres d’une société déstabilisée, désaxée »
Premier des rendez-vous d’associations d’élus locaux, qui se tiennent traditionnellement à partir de septembre, le congrès de l’APVF, association des villes de 2500 à 25.000 habitants, intervient trois semaines après la démission du maire de Saint-Brevin, victime d’un incendie criminel et devenu le symbole presque malgré lui des violences faites aux élus.
« Les maires croient qu’ils ont été autrefois respectés, intouchables », mais ont aujourd’hui le sentiment d’être « les paratonnerres d’une société déstabilisée, désaxée », a déclaré François Bayrou, haut-commissaire au Plan, lors d’une table ronde. « Nous sommes de plus en plus souvent le premier recours pour nos concitoyens, mais aussi le dernier espoir, ce qui rend d’autant plus difficile la tâche qui est la nôtre », a abondé André Laignel, maire PS d’Issoudun (Indre), pour qui les maires sont « souvent démunis pour répondre aux attentes de (leurs) concitoyens ».
Face à ce sentiment de relégation et de délégitimation, Jo Spiegel, ancien maire de Kingersheim (Haut-Rhin), appelle à renforcer la démocratie participative. « Pour chaque projet structurant, nous aurons une séquence démocratique », « se mettre à l’écoute, débattre, co-construire » pour que cette séquence « soit décisive pour la validation des décisions des élus », a-t-il appelé de ses vœux, à l’inverse de la relation qu’il juge aujourd’hui mortifère entre l’élu « fournisseur, magicien », et l’habitant « client, consommateur ».
Un « rôle incontournable sur l’échiquier territorial »
« Il faut passer d’une démocratie providentielle, descendante, passive, anesthésiante, parfois infantilisante (…) qui ouvre des boulevards d’a-responsabilité, vers une démocratie de construction », a-t-il martelé. Mais pour Romain Colas, maire de Boussy-Saint-Antoine (Essonne), les élus sont déjà tous des « artisans quotidiens de la démocratie participative ».
« Un maire qui prendrait des décisions de façon isolée dans sa mairie aurait des problèmes, ne serait-ce que pour acheter sa baguette », a-t-il relevé. Selon lui, c’est le fonctionnement même de la Ve République qui n’est « plus adapté aux enjeux ». « Je pense que notre démocratie est en train de pourrir par la tête. Nous donnons l’illusion (aux électeurs, ndlr), scrutin présidentiel après scrutin présidentiel, que l’élection d’un homme pourra changer leur vie (…), la vérité, c’est que le monde est plus compliqué », a-t-il estimé.
Revenant sur son expérience de maire de Pau, François Bayrou a reconnu qu’aucun des projets qui lui ont permis de « changer le visage de la ville » n’aurait été approuvé par référendum. « Il est nécessaire, assez souvent, d’aller contre la majorité, simplement pour changer les choses », a affirmé l’élu MoDem.
Laurence Porte, maire Horizons de Montbard (Côte-d’Or), évalue elle « au sourire de (ses) concitoyens dans la rue si ça va ou s’il y a des choses qu’il faut réajuster ». « La slow démocratie, je la respecte, mais je n’ai pas envie d’être simplement une animatrice de territoire. Je le suis, mais j’ai envie que ça avance », plaide-t-elle. Le « désir de petites villes » est devenu « une réalité », rappellent les maires de l’APVF, qui entendent jouer un « rôle incontournable sur l’échiquier territorial » et souhaitent « ne pas être oubliés dans les projets de réformes en préparation ».
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