Duceppe nous invite à une autre rencontre familiale au sommet avec l'ultime pièce d'Anton Tchekhov, La Cerisaie. Yves Desgagnés mettait en scène la fratrie composée de Maude Guérin, Pierre Collin, Normand D'Amour, Michel Dumont, Gérard Poirier, Catherine Trudeau et bien d'autres.

Russie 1904. On sent que la révolution approche. Malgré cela, bien des gens résistent tant bien que mal à ces changements inévitables qui se préparent. Un domaine, célèbre pour son jardin planté de cerisiers, sera vendu aux enchères. L'insouciance et la sereine indifférence ont consommé la ruine des propriétaires. À force de procrastination, ils devront brutalement faire face à une réalité dont ils sont désormais impuissants à repousser ses limites.

Sans héros véritable, sans dichotomie entre les braves et les vilains et souvent sans action exceptionnelle, le théâtre de Tchekhov est celui des relations entre les personnages, des liens créés et brisés, de la complexité humaine et de la finesse de la pensée dissimulée

sous un enchaînement de scènes et de répliques aux apparences légères. Dans sa pièce La Cerisaie, on y trouve le long coup de pinceau brossant le passé dont les personnages ne peuvent se départir. Tantôt représentés intensivement par certains personnages secondaires quasi statiques, tantôt habités par certains accessoires fétiches, l'attachement à ce qui était sait toujours remplir une place bien précise dans le tableau, entre autres, par cette fameuse armoire sans fond.

Des personnages, placés comme sur un échiquier de l'inconscient, viennent, chacun à leur tour, jouer une instance de la personnalité. Certains représentent une structure morale et judiciaire, alors que d'autres laissent carte blanche aux pulsions. Maude Guérin, ne pouvant se dissocier du sublime de son jeu, porte les couleurs d'une mère gérant un doux règne.  Steve Laplante joue magnifiquement l’éternel étudiant, venant secouer La Cerisaie par sa vision du monde. Il a été très amusant de retrouver Catherine Trudeau en version quasi religieuse. Quant à Gérard Poirier, il gagne le cœur du public par son personnage isolé, attachant et bien peu bavard.

Duceppe a organisé des festivités pour les 150 ans de Tchekhov : causerie avec Yves Desgagnés et les comédiens Maude Guérin et Michel Dumont (directeur artistique de Duceppe), dégustation de thé, chant romantique russe d'Olga Bassalaeva (régulièrement sollicité pour les concerts de l'OSM), duo de guitare balalaïka et de piano Dmitri Nassyrov et Victoria Khramova. Même un ballet traditionnel de la compagnie Rousskiye Ouzory sera exceptionnellement offert au métro Place-des-Arts, suivi d'un tirage au sort de billets pour venir assister à La Cerisaie. Rendez-vous à ne pas manquer entre 16 h 15 et 17 h 30 le 9 novembre.