Les villages chinois disparaissent ainsi que les agriculteurs forcés de s’installer ailleurs

Écrit par Chen Yilian, La Grande Époque
31.12.2010

  • eleveur de canards(攝影: / 大紀元)

La Chine a incontestablement deux biens en immense quantité: les gens et la terre.

Au cours des dernières années, les fonctionnaires locaux du régime se sont assidûment engagés dans une manipulation créative des ces  deux biens: confisquer la terre aux fermiers dans les régions rurales les moins denses, tout en les convainquant qu’il est temps de vivre une « grande vie » dans un complexe d’appartements tout en hauteur, comprenant toutes les commodités. Tout comme dans les grandes villes congestionnées de Chine.

Zhou Wenhui ne savait pas ce qu’il perdrait dans ce mouvement vers le « haut ». Maintenant, il apparait comme une statistique,  n’est plus qu’un chiffre statistique dans la campagne de  relocalisation rurale généralisée, intitulée «  amener le fermier en haut de l’escalier. » Un an plus tôt, le fermier d’un village de la province de Jiangsu appelait fièrement maison, un logement, une cour et quelques acres de terres. Sa  famille et lui  faisaient pousser des légumes et élevaient de la volaille, ce qui représentait une source supplémentaire de revenu et un moyen plaisant de créer des liens avec entre les membres de la famille et les autres fermiers.

Mais les fonctionnaires les ont expropriés de leurs terres, déracinant la famille de Zhou et les plaçant dans un immeuble de plusieurs étages. Maintenant, la famille doit payer des frais de gestions de propriétés d’un montant de plus de 200 yuans (approximativement 23 euros) chaque mois, sans compter d’autres dépenses auparavant inutiles. Il n’y a pas de cour pour faire pousser les légumes et ils n’entendent plus les gloussements paresseux des poulets.

Avant de réclamer la terre et les locaux d’hébergements à Zhou et aux autres villageois, les fonctionnaires du gouvernement local leur avaient assurés que le déménagement améliorerait leur qualité de vie, ce qui semblait stupide de refuser. « Mais nos vies ne se sont pas améliorées, » a expliqué Zhou à l’Hebdomadaire New Epoch. « Ce n’est plus aussi bon qu’auparavant. » 

Rentabilité de l’exploitation des terres

Le village de Zhou n’est seulement qu’un des nombreux villages en Chine,  dans lesquels les familles ont été renvoyées de leur précieuse terre pour être transposées dans le monde des appartements verticaux, sans privilèges de terre. La campagne de « déplacer le fermier en haut de l’escalier» avec son ascension littérale et le statut que cela implique, a, au cours des dernières années, affecté 26 provinces et agglomérations dans tout le pays. Alors que les gouvernements locaux se vantent de réinventer les espaces ruraux, les interminables projets de construction sont motivés par la conduite insatiable du régime à satisfaire des quotas ambitieux de terre dans les zones urbaines.

Un règlement de 2006 du Ministère de la terre et des ressources stipule que les zones de constructions urbaines peuvent être agrandies si plus de terres cultivées sont créées dans les zones rurales d’un district. Alors que la vente de la terre est devenue une source rapide et majeure de revenus pour de nombreux gouvernements locaux, les fonctionnaires ont été prompts à réaliser qu’empiler des familles agraires dans des appartements était un moyen expéditif de générer plus de terres agricoles.  

Selon l’Hebdomadaire du Sud, un haut fonctionnaire de l’agglomération s’est vanté auprès d’une équipe rurale du gouvernement central, que son gouvernement local gagnerait l’équivalent de plus de 80 milliards d’euros au cours des trois à cinq ans suivants, simplement en déplaçant un million de fermiers locaux dans des appartements.

« Un million de fermiers résident sur au moins un million d’acres de terre. S’ils sont tous déplacés dans des appartements, cela libérera au moins 0,7 million d’acres. Si une acre se vend l’équivalent de prés de 150 000 euros, cela fera plus de 80 milliards d’euros. Que peut-on faire avec 80 milliards d’euros ? »  a-t-il déclaré. 

Fermiers frustrés

Alors que cette campagne promettait d’améliorer la qualité de vie des fermiers,  un fermier du Shandong a rejeté ces allégations grâce à quelques calculs mathématiques simples.

« Ils nous ont expropriés de nos maisons de hautes qualités pour l’équivalent de 18 à 63 euros le mètre carré, puis nous ont fait acheter des appartements coûtant entre  92 et  115 euros le mètre carré, » a exprimé à l’Hebdomadaire New Epoch le fermier du village de Shaozhuangsi. « Actuellement, nous sommes endettés jusqu’au cou. Est-ce une amélioration ou une détérioration de nos vies ? »

Un fermier de la province de Shandong, nommé Xu, a expliqué à l’hebdomadaire New Epoch que les villageois n’ont même pas de place dans les nouveaux appartements pour sécher leurs cacahuètes fraichement cueillies.

« Chaque famille avait un cellier dans la cour pour y stocker les pommes, puisqu’elles constituent un produit majeur de notre région », a t-il ajouté. « Où allons-nous stocker les pommes maintenant?» . Ne plus pouvoir garder le bétail ou faire pousser des légumes l’attriste profondément, a t-il précisé.

Les dépenses supplémentaires pour l’énergie et l’eau nécessaires dans un appartement ont été un fardeau financier supplémentaire. Un fermier nommé Fan a expliqué à l’Hebdomadaire New Epoch que certains villageois dorment entre avec deux couvertures électriques dans le but de ne pas consommer de gaz naturel. Il a ajouté que d’autres ont eu recours à la pratique risquée de faire un trou dans le mur de l’appartement pour utiliser du charbon de poêle et chauffer la pièce.

 

{mospagebreak}Ceux à qui a été attribué un appartement où ils ont pu emménager font partie de quelques privilégiés. La plupart des fermiers expropriés attendent toujours d'être relogés. Gu Rongmei, un agriculteur du Jiangsu, a raconté à l'hebdomadaire « New Epoch » que l'expropriation et la démolition avaient commencé en 2007, mais aujourd'hui, les nouveaux appartements promis ne sont toujours pas disponibles.

« Ils nous donnent seulement 5 yuans (60 cents d'euro) par acre de terre et par mois en guise de compensation, » affirme Gu. « Certains villageois vivent encore sous des tentes. »

De semblables scénarios se déroulent dans le canton de Fengyang, province d’Anhui, avec des conséquences plus tragiques. Les habitants de la région déclarent que sur les 11 fermiers âgés de plus de 60 ans qui vivaient sous des tentes, après que leurs domiciles aient été démolis en 2008, 10 sont morts de froid ou de maladie et le onzième s'est pendu de désespoir.

À Jining, province du Shandong, plus de 10.000 maisons de plus de 500.000 fermiers ont été démolies l'année dernière, forçant la majorité des habitants déplacés à vivre sous des tentes.

Dai, agriculteur, vient d'un village à la périphérie de Chongqing. Il a décrit, à l'hebdomadaire « New Epoch », la façon dont l'exploitation toujours plus rapide des terrains frustre les agriculteurs partout : les fermiers privés de leurs terres n'ont quasiment plus aucun moyen de subsistance.

Son village vivait de la culture de champignons, un commerce rentable dont dépendait financièrement chaque foyer. Aujourd'hui, tout le village a été déplacé dans des immeubles en appartements et ils n'ont plus aucun endroit où planter leurs champignons.

 

« Aujourd'hui, nous n'avons plus rien à faire et passons toutes nos journées à jouer au poker et au Majhong, » explique Dai. « Un villageois a un jour expliqué à un fonctionnaire que nous serions obligés de voler avant deux ans. » Les promesses d'une vie meilleure n'étaient que des mensonges du gouvernement local, ajoute-t-il.

Aucun changement

Face à l'indignation croissante du peuple et aux critiques des médias, le régime a reconnu que la politique d'échange de terres posait des problèmes. En août dernier, à Haikou, Chen Xiwen, un fonctionnaire du parti central, reconnaissait, lors d'une session de discussion sur l'intégration des paysans dans les villes qu'il « n'existait aucun précédent dans l'histoire mondiale de déplacements de villages à grande échelle en temps de paix. »

Il a précisé : « La nature de la campagne de déplacement des fermiers est d'utiliser les terres cultivables à des fins urbaines. Les villages connaissent une désorganisation sans nom. » Il a mis en garde : « Si une telle chose n'est pas contrôlée efficacement, quelque chose de grave pourrait se produire. »

Chen a accusé les gouvernements locaux. La politique de transformer les terrains de campagnes en terrains de ville devait être une expérience ne touchant que quelques régions, mais les institutions gouvernementales ont abusé de cette politique au niveau local, a-t-il expliqué.

Des rapports des médias d'état indiquent que la politique d'échange de terrain doit rester où elle en est actuellement.

L'article original, en chinois, a été publié dans le « New Epoch Weekly », magazine hebdomadaire en couleur édité par la version chinoise du journal « Epoch Times ».

Version originale: Chinese Villages Disappear as Farmers Forced to ‘Move Upstairs’