Tout ou moins

Écrit par Mélanie Thibault, La Grande Époque
15.02.2010

Neige, caribou, chiens esquimaux, loups, chalet, mariage, nature, accueil, fêtes, patin, chasse-neige, danse folklorique, bûche de Noël, tuque en laine, grivoiseries : une tourtière garnie de clichés sur le Québec en coproduction avec la France. Romaine par moins 30 d’Agnès Obadia déçoit.

Romaine (interprétée par Sandrine Kiberlain), personnage inventé par Agnès Obadia il y a plusieurs années, était attendue en long métrage. Son caractère gaffeur et paumé aurait pu faire d’elle un admirable auguste. L’absurde des situations n’arrive pourtant pas à émouvoir, ni à faire rire. Il y a trop de retenue dans les moments cocasses. Le film semble avoir été tourné pour la télé. Il ne suffit pas de faire un film sympathique, il faut que le concept soit solide et que le délire se manifeste.

Un scénario alambiqué d’où surgissent des évènements qui sortent de nulle part. Le chauffeur de taxi veut marier la voyageuse partie retrouver son amoureux en région éloignée. Puis, retour dans un appartement montréalais. Draguée par un homme fatal pour une histoire sans lendemain, Romaine poursuit ses aventures à moins 30. Pourquoi toute cette mascarade? Parce que le copain de Romaine veut vivre au Canada. Pourquoi sans elle? Parce qu’elle lui avoue qu’il ne l’a jamais fait jouir. Rien de plus incongru et de plus futile pour lancer 1 h 35 de flash hivernaux.

Saturé par l’hiver? Franchement, on est mieux dehors. Les paysages se veulent typiques, mais la direction photo ne rend que très rarement justice à la nature. Les comédiens ne semblent pas enchantés de jouer. Les dialogues manquent de rythme. Les éléments de l’histoire sont menés sans conviction et ne se développent que parcimonieusement.

Le film aurait dû se concentrer sur une histoire plausible et en déloger ensuite des aspects imprévisibles. La distribution est pourtant remplie de potentiel (Pierre-Luc Brillant, Maxim Roy, Gilles Pelletier, etc.). Dommage qu’il n’y ait pas eu de véritable direction d’acteur. L’actrice Kiberlain s’éparpille d’une intrigue à l’autre et semble ne pas réellement se rendre compte de ce qu’elle doit jouer. Le regard fuyant, elle discute d’amour comme si elle faisait son marché. Si cette proposition était pleinement assumée par la réalisatrice Obadia, pourquoi pas, mais ce qui irrite, c’est la nonchalance évidente avec laquelle semblent se faire les choix artistiques.  

Espérons que la France ne se berce pas encore de ces charades populaires sur le Québec. Le film semble avoir été monté comme un vidéoclip pour faire la promotion de notre coin de pays. Nous ressortons frustrés d’une telle méprise sur la façon dont les gens se comportent en France comme au Québec. Pour avoir vécu dans les deux pays, il est temps de dire que les Français ne sont pas tous frileux, bougons, grognards et blasés; que les Québécois ne sont pas tous portés à dévoiler en détail leur vie intime, à vouloir se marier à tout prix, à baiser tout ce qui bouge, à accueillir la première personne descendue d’un avion!