Menace croissante des femmes kamikazes

Écrit par Stephen Jones, La Grande Époque
17.02.2010
  • Des femmes vêtues de burqa, destinées à commettre des attentats suicides(攝影: / 大紀元)

Les pèlerins avaient déjà marché pendant une semaine.

Certains avaient voyagé jusqu’à 425 km à pied de Basra, une ville portuaire du Sud, et étaient près de leur destination de Karbala, la ville sainte.

Exténués, ils se sont arrêtés à l’une des nombreuses tentes servant d’hébergement en bordure de la route, appelées mawkeb (ou caravane), dans la ville de Bab al Shams.

L'hôte du mawkeb leur a offert de la nourriture et de l’eau, et un bref répit dans leur pèlerinage annuel que font jusqu’à 10 millions de musulmans chiites.

Leur but était d’atteindre le sanctuaire de Hussein (petit-fils du prophète Mahomet) avant le festival d’Arba'een le 5 février.

Cependant, tandis qu’ils mangeaient des dattes et envisageaient le voyage à venir, quelque chose d’inimaginable s’est produit.

Un pilier de flammes a jailli sous l’abaya (le vêtement traditionnel noir couvrant le corps et le visage) d’une femme qui était debout à l’intérieur de la tente. Le son de l’explosion a ensuite fait place aux lamentations des survivants de l’attaque.

«J’ai vu le corps d’une femme et d’un enfant, des sacs ainsi que des sandales éparpillés tout autour dans des mares de sang», a révélé aux médias internationaux un chauffeur de taxi de 30 ans, Ahmad Najem, un témoin de l’attentat suicide du 8 février

Cinquante-quatre pèlerins sont décédés à la suite de l’attaque.

L’identité de la femme qui s’est suicidée avec la bombe, de même que ses motifs, ont été perdus dans les décombres du mawkeb.

Elle a réussi son plan de ne pas attirer des soupçons comme quoi elle était une femme capable de commettre un attentat d’une telle ampleur. En effet, parmi les personnes tuées, il y avait cinq employées assignées à la fouille des femmes en pèlerinage pour vérifier si des bombes étaient dissimulées.

L’ex-conseiller de la Maison-Blanche, Richard Clarke, affirme que le rapport des services de renseignements suggère qu’Al-Qaïda a entraîné des femmes moudjahidines et des combattants du jihad pour saboter des avions.

«Ils ont formé des femmes», a-t-il déclaré à la fin de janvier. «Il y en a d’autres qui sont encore là-bas, qui ont reçu un entraînement et montrent patte blanche – c'est-à-dire des personnes qui ne figurent pas dans nos dossiers.»

«Ces personnes n’ont pas nécessairement l’air de faire partie d’Al-Qaïda, elles ne sont peut-être pas arabes, et ne sont peut-être pas des hommes.»

La déclaration est venue au même moment où le niveau de menace terroriste aux Royaume-Uni a grimpé de «substantiel» à «sévère».

Mais ce n’est pas la première fois qu’on apprend que des femmes sont systématiquement recrutées par Al-Qaïda.

En 2003, le journal saoudien Asharq Al-Awsat a publié une interview par courriel avec celle qui est à la tête des femmes moudjahidines d’Al-Qaïda.

La femme a annoncé que l’organisation préparait un attentat nouveau qui ferait oublier, aux États-Unis, celui du 11 septembre et que l’idée était venue des opérations martyres menées par des Palestiniennes.

Le nombre de istish-hadiyat (femmes martyres) a augmenté considérablement ces dernières années au sein des groupes de militants islamistes, particulièrement en Palestine.

L’experte en terrorisme, Mia Bloom, rapporte que 34 % des attentats suicides dans le monde ont été perpétrés, entre 1985 et 2005, par des femmes.

Bien que les politiques de recrutement de militants islamistes puissent accroître le nombre d'attentats à la bombe commis par des femmes ces dernières années, il n’en demeure pas moins que le phénomène a ses racines dans des organisations terroristes laïques.

Le quart des auteurs d’attentats suicides employés par le groupe de rebelles sri lankais, les Tigres tamouls, étaient des femmes, affirment les analystes.

En effet, c'était une femme qui avait mis à exécution l'assassinat de l'ancien premier ministre indien, Rajiv Gandhi, en mai 1991.

Durant les années 1980, le Parti communiste libanais avait commencé cette tactique contre les forces israéliennes.

Cependant, le recrutement massif de femmes pour effectuer des attentats suicides est un phénomène nouveau.

Une analyste qui a approfondi sa recherche sur la question, Lindsey O'Rourke, affirme que le nombre des attentats suicides des femmes est passé de huit dans les années 1980 à plus de cent depuis 2000.

Elle prétend que les tabous entourant les femmes martyres se sont estompés ces dernières années à cause de l'effet dévastateur que les femmes peuvent avoir.

Dans une étude récente, elle a soutenu que le nombre moyen de victimes résultant d'une attaque par une femme est de 8,4, contre 5,3 tués par un homme kamikaze.

Ce sont les préjugés qui visent traditionnellement les femmes, combinés aux longs abayas, généralement portés par les femmes dans la région, qui leur donnent plus de facilité à exécuter avec succès des attaques, affirme Mme O'Rourke.

«Étant donné qu’elles sont considérées comme des citoyennes de deuxième classe dans beaucoup de ces pays, ces femmes génèrent moins de soupçons et dissimulent mieux les explosifs», a-t-elle expliqué dans un article du New York Times.

De plus, particulièrement en Irak où l'insurrection est vue comme un conflit contre une Amérique hostile, un tel engagement par des femmes dans la voie de l'istish-hadayat est de plus en plus considéré comme un devoir religieux.

En août 2004, le premier cybermagazine de langue arabe destiné aux femmes, nommé al-Khansa, a été lancé.

La première édition mentionnait que le but des femmes musulmanes devrait être le martyr pour l'amour d’Allah, ainsi que l'obtention du bonheur d’Allah et son paradis.

Juste un peu plus d'une année plus tard, Muriel Degauque, 38 ans, ancienne vendeuse dans une boulangerie, issue d'une famille de classe moyenne près de Bruxelles, s'est fait exploser lors d’une attaque sur un convoi américain en Irak.

Première auteure européenne d'un attentat suicide, Mme Degauque s’était convertie à l’Islam depuis peu. Elle avait épousé un Belge de descendance marocaine qui était devenu militant. Il l'a emmenée en Irak pour combattre les Américains.

Le gouvernement américain a mis sur pied un programme de formation, Daughters of Iraq, destiné aux femmes iraquiennes pour qu’elles sachent comment repérer des femmes kamikazes.

Cependant, moins de 100 d’entre elles ont jusqu'ici terminé leurs cours, et et il est prévu qu’elles travaillent seulement quelques jours par mois.

Selon Mme O'Rourke, la fréquence des attentats suicides par des femmes kamikazes va probablement augmenter au lieu de diminuer.

«Étant donné l’avantage stratégique d’avoir des attaquantes», a-t-elle écrit dans l’article du Times, «nous allons probablement voir un nombre croissant de femmes irakiennes se tuant elles-mêmes ainsi que leurs compatriotes dans le but de mettre un terme à ce qui est perçu comme l’occupation de leur nation.»