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Dubaï s'attaque à la traite des personnes

Écrit par Stephen Jones, La Grande Époque
02.03.2010
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  • Le prince héritier d’Abu Dhabi, Sheikh Mohammed bin Zayed al-Nahyan (droite)(Staff: KARIM SAHIB / 2010 AFP)

DUBAÏ – Pendant plus d’une décennie, malgré leur apparente adhésion aux codes islamiques austères, les autorités ont fermé les yeux sur le Cyclone Club – décrit par les habitués comme un disneyland pour hommes.

En effet, à son apogée, les billets d’entrée dans une des plus importantes maisons closes de Dubaï avaient reçu l’estampe officielle du bureau local de tourisme.

Aujourd’hui, cependant, l’édifice qui abritait autrefois le notoire Cyclone Club a été vidé et remplacé par un restaurant familial – un signe de la répression plus active des autorités de Dubaï contre la prostitution et la traite des personnes.

En janvier dernier, la Cour centrale criminelle dans la capitale d’Abu Dhabi a émis un jugement qui fera jurisprudence, dans lequel sept hommes ont reçu une sentence à vie pour des crimes de trafic d'êtres humains, alors que six autres ont reçu des peines de dix ans.

De plus, deux cas de traite de personnes étaient devant les tribunaux de Dubaï en février, et un réseau de contrebande composé de huit hommes a été démantelé dans l’émirat nordique de Ras Al Khaimah.

«Nous avons remarqué une plus grande prise de conscience [de ce qui se passe] et de grands changements dans la compréhension de la traite des personnes auprès de la police et des tribunaux», a déclaré à un média local Sarah Shuhail, qui gère un refuge pour femmes ayant fui la prostitution forcée.

L’organisme de Mme Shuhai, les Refuges Ewaa pour femmes et enfants, a ouvert il y a un peu plus d'un an et prévoit déjà ouvrir deux nouveaux refuges dans les émirats de Sharjah et de Ras Al Khaimah.

En 2009, le Département d’État américain a fait passer les Émirats arabes unis (É.U.A.) au deuxième palier de sa liste de pays surveillés en raison de la traite.

Avec la menace américaine de sanctions advenant qu’ils retombent dans le troisième palier (la cote la plus basse), les Émirats se sont empressés de s'attaquer au problème de front; ce qui inclut la censure des reportages des médias étrangers qui soulignent la piètre performance du pays dans son traitement du trafic.

Dernièrement, un fonctionnaire du ministère de l'Intérieur a critiqué le contenu d'un rapport de Human Rights Watch sur l'affaire de la traite, le qualifiant de «sensationnel» et d'«inexact».

Les Émirats arabes unis sont un récent signataire du protocole des Nations Unies pour empêcher, supprimer et punir la traite des personnes, a affirmé le fonctionnaire, et ont mis sur pied un groupe de travail composé de procureurs formés pour s'attaquer au problème.

Le refuge Ewaa est financé par Sheik Mohammed bin Zayed, le prince héritier d'Abu Dhabi.

Les É.A.U., et surtout l'émirat de Dubaï, ont été particulièrement vulnérables aux bandes criminelles impliquées dans la traite, en raison de leur emplacement géographique et de leur administration peu rigoureuse.

Ils sont situés au carrefour entre l'Est et l'Ouest et les groupes criminels, tant de l'Asie du Sud-Est que de l'Europe de l'Est, ont été séduits par le pouvoir d'achat des expatriés hédonistes.

Selon les statistiques de 2006 du Département d'État américain, il y aurait à peu près 10 000 travailleuses du sexe à Dubaï uniquement. Les défenseurs des droits de la personne estiment que le nombre a augmenté depuis.

Plusieurs de ces femmes ont été attirées au pays par des promesses d'offres d'emplois comme domestiques, mais à leur arrivée, leurs passeports ont été confisqués par leurs employeurs et elles ont été forcées de se prostituer.

Le groupe de trafiquants qui a été condamné en janvier dernier avait asservi 14 femmes marocaines. Plusieurs d'entre elles avaient consenti à venir pour occuper des emplois de femme de ménage. Une fois arrivées à l'aéroport, elles ont été séquestrées.

«Ils ont commencé à nous battre et ont menacé de nous brûler avec des cigarettes», a affirmé une victime dans un entretien avec le quotidien émirati The National.

«Ils nous ont dit que si nous parlions à la police ils nous couperaient les mains et les pieds, et nous jetteraient dans le désert pour que personne ne nous trouve.»

Malgré la fermeture du Cyclone Club, des douzaines d'autres lieux plus modestes sont apparus à Dubaï et la prostitution est aussi omniprésente que jamais.

Des forums en ligne donnent des astuces aux touristes pour trouver la plus grande concentration de prostituées. Peu, sinon aucun de ces «consommateurs» sont désireux de considérer les circonstances dans lesquelles ces femmes sont devenues des prostituées.

Plusieurs préfèrent simplement fermer les yeux sur la triste réalité de cet esclavage moderne. «Quand vous la voyez disparaître dans le taxi», écrit un utilisateur d'un forum en ligne, «le mieux c'est d'entrer dans le mode “loin des yeux, loin du cœur”.»

«Ce n’est pas agréable de penser à ce que vit cette personne lorsqu’elle n’est pas avec vous.»

Plus de 204 720 362 personnes ont démissionné du PCC et de ses organisations.