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L'enfant prodige

Écrit par Mathieu Côté-Desjardins
03.06.2010
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  • Guillaume LeBon incarnant le jeune André Mathieu (Unit Photographer: Jan Thijs / FOR EDITORIAL USE ONLY-- NOT FOR RESALE -- DO NOT ARCHIVE)

Nous pouvons tenir pour acquis, avec humilité, qu'il se fait du grand cinéma québécois. Au-delà de ce constat de plus en plus évident, certaines catégories de films d'ici sont particulièrement de haute volée. L'enfant prodige, dernier film de Luc Dionne, confirme que le Québec excelle, entre autres, en ce qui a trait aux drames biographiques mettant en scène la musique.

L'enfant prodige est un impressionnant hommage cinématographique qui nous permet de deviner la pression que le réalisateur devait avoir pour tenter d'accoter le degré de sublimité que possédait André Mathieu lui-même. Il peut être bien périlleux de choisir de faire un film sur un icône culturel, mais Dionne se révèle un homme de défi et il a prouvé, encore une fois, qu'il sait comment en relever avec virtuosité, sans doute inspiré par le protagoniste.

La vie d'André Mathieu, surnommé aussi le «Mozart canadien», s'apparente évidemment au caractère des grands génies de la musique et du romantisme : vive, ténébreuse et courte. Bien sûr, pour garder une constance avec l'immensité du talent de Mathieu, il fallait primordialement avoir une distribution de haut calibre. Marc Labrèche, figure paternelle imposant le respect, Macha Grenon, mère poule calculatrice et aux principes étroits, Karine Vanasse, sobre et isolée. Comment passer sous silence André Mathieu, enfant et adulte, Guillaume LeBon et Patrick Drolet, brûlant tous deux de vérité. Patrick Drolet, ayant joué un rôle des plus convaincants dans la comédie Tel père, tel flic, revient avec un rôle tout aussi bouillant. Quant à Guillaume LeBon, le choix fut sans conteste judicieux. Ce tremplin était tout indiqué pour l'émergence d'un jeune acteur, plutôt que de faire apparaître sans cesse toujours les mêmes (fâcheux défaut du cinéma québécois).

À travers tout cela, il n'y a pas de «surjeu». Chacun des personnages ne sortait pas du jet de lumière qui lui était attribué. Même l'apparition de Mitsou dans la peau de Vivianne Jobin était tout à fait crédible et a sans doute donné quelques frissons aux spectateurs. Le montage, élément clé du film, était au diapason. Cela nous permettait de voguer aisément sur les compositions d'André Mathieu, au point de nous permettre d'entrer dans des états d'ivresse musicale. J'étais sur le point d'applaudir après un des morceaux, brillamment interprété par Alain Lefèvre, pour me rendre compte que j'étais au cinéma. L'enfant prodige est le genre de film qui peut s'étaler pendant encore longtemps grâce à une trame sonore tout aussi fameuse. Ce film pourrait facilement conquérir le marché étranger.

Luc Dionne, aussi scénariste, a mis de l'avant l'aspect destructeur et dilapidateur de l'homme par rapport à certains éléments des plus précieux de la vie humaine comme l'enfance et le talent. Il a certainement aussi voulu témoigner de l'ignorance et du supplice qui est sans cesse infligé au beau. Par exemple, une séquence montre André Mathieu bottant des poubelles vides qui dégringolent dans des escaliers et baptise la cacophonie tout comme on le ferait pour de la musique moderne...

C'est aussi un hymne à l'intégrité, au respect de ce qui se trame en nous, comme le confirme les propos sages de la légende musicale et spectateur de Mathieu à Paris, Sergueï Rachmaninov. Dionne démontre à travers Mathieu que même si nous sommes dotés d'une grande sensibilité, bien des qualités du cœur et un fond rebelle, cela demande du courage afin de survivre dans ce monde.

Un film qui saura sûrement inspirer les artistes cherchant l'étincelle qu'il leur manquait pour arriver à avoir confiance en leur apport au monde, mais aussi pour les parents ou éducateurs ayant un rôle crucial dans le développement ou dans l'extinction du potentiel des enfants.

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