Ciel orageux lors du 14 juillet franco-africain

Écrit par Laurent Gey, La Grande Époque
14.07.2010
  • Des étudiants français de l'École Polytechnique, l'une des plus prestigieuses des grandes écoles françaises, participent sous la pluie à la parade annuelle de la Fête Nationale militaire à Paris le 14 Juillet 2010. (BERTRAND LANGLOIS/AFP/Getty Images)(Stringer: BERTRAND LANGLOIS / 2010 AFP)

C’est dans un climat orageux que s’est déroulée la Fête Nationale française ce 14 juillet 2010. En effet, la cérémonie a été perturbée par de très fortes averses de pluie jusqu’à ce qu’éclatent des pluies torrentielles à la fin de la commémoration. Aux couleurs de l’Afrique cette année, le Président Nicolas Sarkozy a invité les chefs d'Etats et dirigeants africains de treize pays francophones à participer au défilé militaire. Situation orageuse également, quand de nombreuses associations des droits de l’homme font savoir que dans ces délégations se trouvent des dictateurs et des responsables de crimes contre l’humanité. Polémique en vue avec cette invitation controversée à la table de la République.  

 

Une fête nationale sous la pluie

Pour célébrer les 50 ans de leur indépendance octroyée par le Général De Gaulle, les armées africaines de treize anciennes colonies françaises ont défilé pour la première fois sur les Champs-Elysées ce 14 Juillet. Nicolas Sarkozy a tenu à inviter les dirigeants des treize pays d’Afrique francophone : le Bénin, le Burkina Faso, le Cameroun, le Centrafrique, le Congo, la Côte d'Ivoire, le Gabon, le Mali, la Mauritanie, le Niger, le Sénégal, le Tchad et le Togo, pour rendre hommage selon lui «à la contribution des troupes africaines à la défense et à la libération de la France».

Le premier orage a été provoqué par plus 80 associations des droits de l’homme, qui se sont inquiétées de la possible présence parmi les détachements africains de militaires cités dans des procédures pour crimes de guerre. En effet, ces organisations affirment que les troupes qui ont défilées ce 14 juillet sur les Champs Elysées ont participé aux massacres de leurs propres peuples. Elles critiquent notamment l'accueil fait par l’Elysée à «des dictateurs de pays comme le Tchad, le Togo, le Centrafrique, le Congo, le Gabon, le Burkina Faso ou le Cameroun». Une information que l’Elysée dit avoir vérifiée, Hervé Morin, Ministre de la Défense, affirmant qu'il n'y avait «aucune indication de la sorte». De son côté, le Parti socialiste dit regretter «l'ambiguïté du choix d'un défilé militaire» pour cette célébration.

Le deuxième orage a eu lieu pendant la cérémonie. Après que les premières trombes d’eau aient commencé une heure après le début du défilé. Plus 35 litres d’eau, par mètres carrés, sont tombés sur l’Ile de France, fait exceptionnel pour un 14 juillet. C’est en tout 28 départements du Centre et de l’Est de la France qui ont été placées en alerte orange par Météo France pour risque d’orages et de vents violents.

Un hommage contesté

S’il est vrai qu’il peut exister une dette morale envers l’Afrique, il est vrai aussi que Nicolas Sarkozy voulait marquer les liens qu’entretiennent la France et l’Afrique. Des liens ambigus quand on énumère les composantes présentes lors de cette cérémonie.

Il y a effectivement une valeur historique dans l’indépendance des pays africains par rapport au temps des colonies. Il y a également une certaine valeur morale à reconnaître les droits de pensions militaires aux soldats africains ayant combattu aux côtés de l’Armée Française pendant la Seconde Guerre Mondiale. Mais on connaît aussi les intérêts économiques que la France entretient avec l’Afrique, notamment au niveau de ses matières premières et la concurrence des autres pays tel que la Chine. Enfin la dernière composante est la présence lors de cette cérémonie, symbole de la République Française, de dirigeants de pays africains réputés pour des politiques autocratiques et violentes.  

Ainsi avec l’invitation de Kadhafi à l’Elysée en 2007 ou l’accord de coopération entre l’UMP et le parti communiste chinois en 2009, on peut se demander le but poursuivi par la diplomatie française, au nom d'intérêts économiques. Le peuple français historiquement défenseur des Droits de l’Homme et de la Démocratie, qui, le 14 juillet 1789, s’est soulevé à Paris contre l’ancien Régime, peut être étonné de ce mélange de genre dont il semble difficile de comprendre le vrai sens moral et politique.