10 centimes pour une existence dans la dignité

Écrit par Catherine Keller, La Grande Époque
22.08.2010
  • logo de la campagne(攝影: / 大紀元)

La nouvelle campagne lancée le 4 août 2010 par Clean Clothes Campaign et La Déclaration de Berne, deux ONG qui travaillent pour que les rapports nord-sud soient plus équitables va s’étendre sur dix semaines. Le but est que les ouvrières soient payées dix centimes en plus par T-shirt pour pouvoir vivre décemment.

De quoi s’agit-il ?

Le site http://www.10centimes.ch/fr/ propose une vidéo que vous pouvez envoyer aux entreprises nommées par ces ONG. Cette protestation va permettre de sensibiliser les entreprises au fait que le consommateur souhaite porter des vêtements qui soient produits à un prix équitable.

Ce n’est pas le cas actuellement. Les États du sud dépendent tous des investissements de pays plus riches. Ils fixent un salaire minimum qui  ne suffit pas à faire vivre décemment et bien souvent, les employés ne sont même pas payés à ce prix. Les États doivent se soumettre à la concurrence du marché pour attirer les entreprises dans leur pays. Ils sont donc prêts à brader les salaires, mais pas seulement.

Les heures supplémentaires sont souvent obligatoires et, même quand elles ne le sont pas, les employées sont obligées d’en effectuer si elles veulent assurer la subsistance de leur famille. Elles travaillent alors 13 à 15 heures par jour et cela ne suffit pas pour payer leur logement, la nourriture, les frais médicaux et l’entretien des enfants. Elles devraient toucher plus du double.

Elles ne bénéficient pas de la sécurité sociale. En cas de maladie ou d’accident, elles sont renvoyées sans aucune indemnité et se retrouvent sans revenu. Elles n’ont pas la possibilité de se syndicaliser ou de se défendre. Leurs enfants sont en général élevés par la famille restée au village. Ce sont les esclaves des temps modernes.

Alors, comment un T-shirt fabriqué pour moins d’un franc arrive-t-il sur nos étales 40 fois plus cher ? Le trajet est sinueux. De sous-traitant à sous traitant, chacun veut faire des bénéfices. De plus, si le coton provient d’un endroit, il est tissé à un autre endroit. Le tissu est coupé dans une fabrique, il est cousu dans une autre, l’étiquetage et l’emballage se font souvent en Europe et à chaque passage, quelqu’un se met des sous dans la poche tout en étant sous pression pour fournir au meilleur prix.

Les entreprises occidentales manquent de transparence quant au suivi de leur production.

Elles ne connaissent souvent pas tous les maillons de la chaîne. En fait, elles ne s’occupent pas vraiment de la manière dont sont payées et traitées les employées de ces entreprises sous-traitantes. Elles estiment que c’est du ressort des États et des dites entreprises et qu’elles n’ont pas à s’en préoccuper.

Or, c’est précisément parce qu’elles veulent casser les prix et faire des plus gros bénéfices que chaque intermédiaire répercute la baisse jusqu’au plus petit qui ne peut qu’accepter ce travail.

Les solutions

Les syndicats pourraient informer les employés sur leur droit. Ils pourraient alors se regrouper et demander de meilleures conditions de travail. C’est une action très dangereuse car les syndicats et tous les rassemblements de protestations sont interdits dans ces pays. Comme les ouvriers et les ouvrières gagnent de moins en moins,  - l’indice du coût de la vie n’étant pas répercuté -, ces derniers sont acculés à la lutte simplement pour survivre. Les syndicats s’unissent avec des organisations européennes et états-uniennes au sein de l’Asian Floor Wage Campaign pour atteindre leur objectif : le salaire d’un travail permet de faire vivre une famille de quatre personnes.

Les États ont les moyens de changer la situation en acceptant et en collaborant avec les syndicats pour un salaire minimum décent, une protection sociale suffisante, mais aussi en refusant des zones de non-droit qui permettent aux entreprises étrangères, à la fois de ne pas payer les taxes douanières, mais aussi de traiter leurs employés selon leur bon vouloir.

Les entreprises ont une grande responsabilité dans cette histoire. Il ne suffit pas de dire aux fournisseurs qu’ils doivent respecter les directives sociales, encore faut-il leur en donner la possibilité. Ce sont nos grandes marques qui exigent des prix bas et une livraison en temps record.

Elles doivent payer les articles à prix correct, éviter des commandes tardives qui obligent les fournisseurs à faire des heures supplémentaires et surtout garantir des relations commerciales à long terme. Si elles acceptent de collaborer avec l’Asian Floor Wage Campaign, elles pourraient ancrer, dans leur politique d’entreprise, des conventions collectives et favoriser, en même temps, la mise en place et le respect des conditions cadres pour des négociations libres.

Le consommateur peut privilégier les marques respectueuses des ouvriers. Il trouve la liste sur le site http://www.10centimes.ch/fr. Le prix n’est pas excessif, le salaire des ouvriers représentant seulement 0,5 à 3% du prix vendu. Par contre, un T-shirt vendu moins de 10 francs suisses (7 euros) est à coup sûr produit dans des conditions incorrectes.

On peut aussi estimer ses besoins et choisir des habits que l’on portera régulièrement, qui se marient avec ceux que l’on a déjà. Il est aussi envisageable de privilégier les produits issus du commerce équitable et si possible bio. Le coton est le premier utilisateur de pesticides.  Acheter bio préserve les sols, les nappes phréatiques et la santé des ouvriers.

Le consommateur est le dernier maillon de la chaîne. Sans lui, rien de tout cela n’existe. Il a donc le droit de demander plus de transparence dans la production des habits qu’il achète. Il a le droit de pouvoir choisir la marque en fonction de son engagement social. Cette compagne lui offre la possibilité de le dire haut et fort.