Guide en milieu amazonien

Écrit par Frederique Privat, La Grande Epoque
22.01.2011

  • Avec huit millions d’hectares de forêt tropicale humide associée à une biodiversité d’une exceptionnelle richesse (FREDERIQUE PRIVAT)(攝影: / 大紀元)

Un atout pour le tourisme en Guyane

Avec huit millions d’hectares de forêt tropicale humide associée à une biodiversité d’une exceptionnelle richesse, la Guyane Française présente un patrimoine naturel gigantesque et d’autant plus difficile à préserver.

La pression exercée par l’activité humaine est bien présente, l’orpaillage clandestin et la déforestation étant des exemples d’activités d’anéantissement à plus ou moins long terme de cet écosystème.

Des organismes divers sont bien présents afin de surveiller, d’aménager et de gérer ce patrimoine: l’ONF (Office National des Forêts), qui a d’ailleurs instauré un Code forestier spécifique à la Guyane, mais aussi la DIREN (Direction Régionale de l’Environnement) et la DAF (Direction de l’Agriculture et de la Forêt) se concertent avec les Forces Armées afin de limiter les dégâts occasionnés par l’attrait pour ces richesses naturelles.

La compagnie des guides de Guyane

Il est une activité humaine en forêt qui peut permettre, si elle est bien gérée, de mieux comprendre la forêt et donc de l’apprécier à sa juste valeur: le tourisme vert est maintenant en pleine expansion en Guyane, pourtant considérée il y a peu comme «l’enfer vert». Randonnées, bivouacs, observation de la faune et de la flore, remontée des fleuves, mais aussi découverte des modes de vie des populations autochtones amérindiennes et bushinengées... Les possibilités en Guyane sont légion pour tous les passionnés de nature ou plus simplement pour les amateurs de dépaysement authentique.

Face à l’étendue du patrimoine forestier guyanais et de ses spécificités climatiques, il était nécessaire de rassembler, puis de normaliser les activités de tourisme en forêt, les premiers visés étant les guides et animateurs évoluant dans les écosystèmes de Guyane.

C’est donc ainsi que la Compagnie des Guides de Guyane a vu le jour en 1999. Frédéric Auclaire, guide chargé du développement de l’association, en présente les objectifs comme répondant, avant tout, à un besoin de se fédérer derrière un organisme commun mais aussi de motiver la mise en place de formations adaptées. En effet, le métier de guide en Guyane n’a concerné pendant très longtemps que quelques personnes déclarées en tant que guides mais sans reconnaissance ni promotion collective.

Des tentatives de création de diplômes ont été faites: en 2001, un diplôme, basé sur celui d’accompagnateur en montagne, était inadapté. Au niveau national, les diplômes dans ce domaine étant limités – alpiniste, guide de haute montagne avec option neige et option tropicale pour les îles de Guadeloupe, Martinique, Réunion...– une convention est alors établie entre la Direction du Travail, l’AGEFOS* et le Comité du Tourisme de Guyane (CTG) afin de créer un référentiel métier de guide en milieu amazonien. Trois déclinaisons du métier sont donc instaurées.

Selon Frédéric Auclaire, le guide animateur évolue en terrain connu sur des sorties d’une journée. Le public n’est pas le même que sur une sortie de plusieurs jours, les attentes sont différentes. Dans le référentiel, la première déclinaison est celui du guide animateur. Il est question de transmission de savoirs et de connaissances de la culture, de l’histoire, de la faune, de la flore, de l’agriculture, mais toujours à proximité d’un village. Que l’on soit à Cayenne, Maripasoula ou dans un tout petit hameau au fond de la Guyane, le guide se fixera autour d’une ballade d’une journée dans laquelle il parlera un peu de la vie du pays ou du village.

La seconde déclinaison est celle de guide accompagnateur qui n’est pas forcément un niveau supérieur de savoir-faire. La différence tient surtout du niveau d’autonomie des clients. Dans le cas du guide animateur, le client est autonome sur une journée. Dans celui de guide accompagnateur, la personne est autonome sur plusieurs jours avec nuitées, mais toujours sur des parcours connus et reconnus.

Quant à la troisième déclinaison, elle ouvre sur l’aventure. Le guide d’expédition évolue sur tout terrain, connu ou pas. Il suffit de lui indiquer l’endroit, il vous y amènera, même s’il n’y a ni chemin ni route. La différence tient donc dans la maîtrise du risque et non dans la transmission des connaissances, le cœur du métier étant de transmettre à l’autre quelque chose en toute sécurité.

Des guides à la carte?

La demande sera donc différente pour chacun des métiers et sera fonction du temps disponible des visiteurs: un vacancier d’une semaine privilégiera des sorties à la journée ou des circuits organisés de trois jours proposés par les voyagistes, de Saint-Laurent à Saint-Georges, par exemple, en passant par les Marais de Kaw.

Les extras sortent du cadre du référentiel du guide d’expédition et répondent à des demandes particulières, intégrant toute la logistique nécessaire à la réussite de ces missions, comme par exemple «quatre super copains qui souhaitent faire un super ‘trip’ en forêt».

Frédéric Auclaire, passionné de forêt, affectionne certains sites de ballades, «la forêt accidentée avec des rochers, des petites rivières cachées avec cascade...», tout un programme que l’on peut découvrir partout en Guyane si l’on désire sortir des chemins battus. Ce sont des sites magnifiques qu’il faut préserver car ils sont vite pris d’assaut par le grand public qui, malheureusement, laisse des traces de son passage.

C’est aussi le rôle de ces guides de savoir éduquer au respect de cette nature que l’on doit quitter telle qu’on l’a trouvée au départ.

Des sites et des populations à protéger

C’est aussi l’une des raisons de la réglementation mise en place au niveau préfectoral pour la partie sud de la Guyane. Interdite d’accès sans autorisation préfectorale, cette zone qui s’étend de la commune de Camopi (côté brésilien) jusqu’aux abords de Maripasoula (côté Surinamais), a fait l’objet de la création du Parc Amazonien de Guyane (PAG) en février 2007. Avec ses deux millions d’hectares de forêts, le PAG est le plus vaste parc naturel de France et d’Europe, mais c’est aussi un lieu privilégié où s’élèvent les fameux inselbergs, ces «îles rocheuses» impressionnantes au milieu de la forêt, où vivent des populations amérindiennes et bushinengées.

Les guides amazoniens ne font pas exception à la règle. Ils doivent eux aussi obtenir une autorisation afin de pénétrer dans ces lieux protégés. Ils se doivent aussi d’appliquer la Charte Européenne du tourisme durable et participatif, en employant des autochtones de ces régions (piroguiers, artisans, porteurs de charge...). La difficulté reste pour eux de taille afin de gagner la confiance de ces communautés qui ont dû et doivent encore se battre à la fois contre les orpailleurs clandestins et toutes les formes d’exploitation de leur milieu naturel et culturel.

Pérenniser et développer les relations entre les guides et les communautés

«Cette relation passe par la professionnalisation et la certification que nous mettons en place avec ces communautés, par le biais du Parc Amazonien qui est notre partenaire privilégié et l’articulation principale sur ce secteur.

Depuis que la Compagnie des Guides existe, nous avons déjà consulté des personnes ressources dans ces communautés. Nous les formons peu à peu à ces métiers du tourisme, sur place, par la discussion et les rencontres, tout en créant des liens de confiance car la communication par l’information de proximité est importante. Eux parleront de leur culture. Nous, nous apporterons les rouages du métier de guide, mais sans pour autant arriver avec une vérité toute faite car les échanges sont le cœur de notre métier», explique Loïc Massué, responsable de l’accueil chez les Guides.

Ce patrimoine naturel constitue un enjeu mondialement reconnu et est un terrain idéal pour l’approfondissement de la recherche sur le milieu tropical. De plus, il devrait renforcer la dynamique de coopération dans le domaine des aires protégées entre la Guyane et le Brésil.

*il s’agit d’un OPCA (Organisme Paritaire Collecteur Agréé), un organisme collecteur et financeur pour la formation des salariés du particulier employeur.