Les banques françaises sont-elles solides?

Écrit par Lauren Smith, La Grande Epoque
17.10.2011

  • Les actions de BNP Paris, Société Générale et Crédit Agricole ont perdu entre 45% et 50% de leur valeur en trois mois. (Damien Meyer/AFP/Getty Images)(攝影: / 大紀元)

Officiellement, les autorités bancaires et régulatrices ont rejeté l’idée d’un besoin urgent de recapitalisation des banques françaises. En dépit de ces affirmations, les trois principales banques hexagonales continuent d’être malmenées sur les marchés et la défiance s’exacerbe à la moindre rumeur de nationalisation de l’une d’entre elles. Les actions de BNP Paris, Société Générale et Crédit Agricole ont perdu entre 45% et 50% de leur valeur sur le troisième trimestre 2011 avec des baisses allant jusqu’à plus de 60% si l’on considère les valeurs extrêmes de la période.

Fin août dernier, la directrice générale du Fonds Monétaire International, Christine Lagarde, a fait appel à une «recapitalisation urgente» des banques européennes, afin qu’elles soient «suffisamment solides pour faire face aux risques que représentent les dettes publiques et la faiblesse de la croissance». «C’est essentiel pour mette fin à la contagion», a-t-elle estimé. Cette annonce sans plus de précisions a renforcé la défiance des marchés envers les banques françaises en particulier parce que l’ex-ministre française de l’Economie et des Finances a une connaissance précise de la situation du secteur bancaire français.

Une recapitalisation est-elle nécessaire?

À la mi-septembre, les rumeurs sur un plan de recapitalisation des banques françaises à hauteur de 10 à 15 milliards d’euros qui aurait été proposé à la direction du Trésor lors de la réunion de crise le 11 septembre, ont été démenties. «Il n’y a aucun plan», a déclaré le gouverneur de la Banque de France, Christian Noyer, dans un entretien au Journal du Dimanche. Les banques françaises «ont une base de capital importante, comparable à celles des autres banques européennes, et elles sont rentables», a-t-il précisé. La ministre du Budget et porte-parole du gouvernement, Valérie Pécresse, a également assuré lors de l’émission Le Grand Jury sur RTL qu’ «il n’y a pas de plan de recapitalisation des banques», en ajoutant que «l’Etat évidemment travaille la main dans la main avec les banques, parce que l’Etat est aux côtés des banques». Elle a réitéré sa confiance le 28 septembre lors de l’entretien à la radio Europe 1, en confirmant que «aujourd’hui, nos banques restent solides».

La dégradation des notations par les agences de rating

Ces déclarations n’ont pas empêché la dégradation des notes des banques françaises par l’agence de notation financière Moody’s le 14 septembre. L’abaissement de la note est pour l’instant d’un cran de «medium» à «faible» AA pour la Société Générale et de «fort» à «medium» AA pour le Crédit Agricole. Ces nouvelles notations sont assorties d’une surveillance ou d’une perspective négative ce qui signifie que dans quelques temps elles risquent d’être revues à la baisse à nouveau. Les raisons de déclassement de la notation pour la Société Générale sont liées à la réévaluation par Moody’s de l’aide que le pouvoir public pourrait apporter en cas de crise grave, et pour le Crédit Agricole, de la prise en compte de son exposition à la crise grecque, surtout via son prêt de 8 milliards d’euros à sa filliale Emporiki Bank of Greece. La note de BNP Paris est restée inchangée à «medium» AA. Toutefois la surveillance négative a été reconduite compte tenu des implications de la fragilité du refinancement pour les banques sur les marchés.

Les pressions sur la liquidité à court terme

Parallèlement, les inquiétudes sont apparues sur les retraits de liquidités de grands groupes européens auprès des banques françaises. La confirmation durant septembre que le conglomérat allemand Siemens a retiré début juillet des fonds de 500 millions d’euros auprès de la Société Générale, même si officiellement la raison était la sous-performance d’un investissement, cette nouvelle a renforcé la méfiance des marchés.

Aussi, la réduction de l’exposition des fonds monétaires américains (MMF- Money Market Funds) à la dette émise par les banques européennes, et en particulier françaises, très dépendantes du financement court terme en dollars, a fait apparaître un risque d’assèchement des liquidités en dollars et suscite des réserves de la part des intervenants d’outre-Atlantique sur la solidité des banques face à la crise de la dette souveraine. Cette réduction de l’exposition aux banques françaises est estimée à 19% en août sur un mois et de 34% depuis fin mai, selon une étude de l’agence de notation Ficht Ratings réalisée auprès des dix plus grands MMF et publiée fin septembre. Par ailleurs, ces MMF ont réduit également la maturité de leur exposition en augmentant la part des prêts à sept jours, ce qui contraindra les banques françaises à ajuster leur business modèle, diminuant leur refinancement à court terme et diversifiant leurs sources de financement.

L’incapacité des politiques de la zone euro à apporter une solution à la crise contribue à la méfiance des marchés envers les banques françaises exposées aux pays en difficulté (Grèce, Espagne, Italie...). Les inquiétudes sur leur solvabilité et leur liquidité traduisent une perte de confiance et débouchent sur des tensions sur les marchés. La forte volatilité des valeurs bancaires françaises devrait se poursuivre dans les mois à venir.