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Régions sécessionnistes: toujours l'impasse entre la Russie et la Géorgie

Écrit par Aron Lamm, La Grande Époque
25.10.2011
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  • Le président français, Nicolas Sarkozy, et son homologue géorgien, Mikheil Saakashvili(攝影: / 大紀元)

Les discussions au sujet de l’entrée de la Russie dans l'Organisation mondiale du commerce (OMC) ont bloqué dernièrement, en raison des conflits latents qui affectent le Caucase autrefois sous contrôle soviétique.

Bien que maintenant oubliée par plusieurs, la brève guerre de 2008 entre la Russie et la Géorgie au sujet des régions sécessionnistes d'Ossétie du Sud et d'Abkhazie a laissé des plaies ouvertes dont les conséquences dépassent largement les frontières géorgiennes.

De prime abord, ça ne semble pas être un obstacle insurmontable : la Géorgie, en tant que membre de l'OMC, demande une surveillance internationale et la transparence dans le commerce qui se fait à travers les frontières contestées de l'Abkhazie et de l'Ossétie du Sud pour accepter l'adhésion de la Russie à l'OMC.

Impasse

Toutefois, derrière cette affaire se cache un nœud gordien, avec des questions épineuses telles que l'adhésion possible de la Géorgie à l'OTAN, les relations OTAN/Union européenne-Russie, le débat entourant la légitimité pour un territoire de déclarer l'indépendance et tout le problème de la balance du pouvoir dans la région volatile du Caucase.

Le Caucase, divisé entre des républiques russes autonomes dans le Nord et des États indépendants dans le Sud, abrite plus de 50 ethnies et a été le théâtre de déportations massives et de nettoyages ethniques, autant sous l'empire russe que sous l'Union soviétique. Lorsque cette dernière s'est effondrée, plusieurs conflits envenimés, certains de longue date, ont éclaté, parmi lesquels les guerres de Tchétchénie sont les mieux connues.

Les Ossètes et les Abkhazes sont deux groupes ethniques relativement petits dont les patries étaient des provinces autonomes en Union soviétique. Partiellement en raison des politiques soviétiques sur la population, ces deux régions comptaient de grandes communautés géorgiennes et ont été reconnues sur la scène internationale comme faisant partie de la Géorgie après l'effondrement de l'URSS.

Ces deux régions n'ont jamais été sous le plein contrôle de Tbilissi, malgré les différents moyens utilisés par la Géorgie pour y arriver. Au début des années 1990, dans l'ombre de la guerre des Balkans, une guerre civile a éclaté entre les Géorgiens et les régions sécessionnistes soutenues par Moscou.

En Abkhazie, où d'autres militants du Caucase ont également participé, la violence a atteint des sommets avec ses nettoyages ethniques et autres atrocités. La Géorgie a perdu les deux guerres, des milliers de Géorgiens ont été tués et plus de 250 000 d'entre eux ont été expulsés d'Abkhazie seulement.

À l'été 2008 sont survenus les évènements qui allaient mener aux déclarations d'indépendance de l'Abkhazie et de l'Ossétie du Sud. Qui a vraiment tiré le premier coup et qui a planifié ces gestes demeurent des questions perdues dans le brouillard de la guerre. Grosso modo, des escarmouches entre Géorgiens d'un côté et forces russes du maintien de la paix et milices locales de l'autre ont incité l'armée géorgienne à lancer une opération contre l'Ossétie du Sud le 7 août. La Russie a répliqué en prenant contrôle des régions sécessionnistes et des territoires géorgiens.

L'Union européenne (UE) et l'OTAN soutenaient, et soutiennent encore, la Géorgie et avaient fortement critiqué la Russie pour son invasion d'un pays souverain. La Russie s'est retirée de la Géorgie après une médiation de l'UE, mais elle est demeurée en Ossétie du Sud et en Abkhazie, qui ont toutes deux déclaré leur indépendance. Cependant, seuls la Russie, le Venezuela, le Nicaragua et de petits États insulaires les ont reconnues.

Trois ans plus tard, les régions sont relativement calmes, mais demeurent dans une zone grise, étant grandement dépendantes de la Russie. Les deux ont signé des ententes autorisant le déploiement de troupes russes sur leur sol pour les prochaines décennies et l'actuel président d'Ossétie du Sud, Edouard Kokoïty, a même déclaré qu'il estime que sa région devrait former un genre d'union avec la Russie.

Certains considèrent les régions disputées comme plus ou moins des pions de Moscou, un point de vue partagé par le président français, Nicolas Sarkozy. Ce dernier a récemment déclaré dans un discours depuis la capitale géorgienne que l'Abkhazie et l'Ossétie du Sud doivent se rendre compte que «leur avenir est aux côtés de leurs compatriotes géorgiens dans un pays ouvert et non dans des pseudo États isolés et asservis», selon le site de nouvelles géorgien civil.ge.

Il s'agirait d'une idée fausse, selon le professeur George Hewitt de l'University of London, un spécialiste et ami de l'Abkhazie. Il critique vertement le soutien occidental à la Géorgie.

«Le rôle de la Géorgie [en Abkhazie] a été nul sinon destructeur et désastreux», a-t-il écrit dans un courriel à Époque Times. Il blâme entièrement la Géorgie pour les guerres dans les années 1990 et l'instabilité. Ce n'est pas que la Russie agisse par altruisme en soutenant l'indépendance de l'Abkhazie, c'est plutôt une question d'intérêts mutuels, avance-t-il. L'Abkhazie a besoin de soutien pour son indépendance tandis que la Russie est préoccupée par le maintien de sa zone d'influence.

De plus. M. Hewitt est d'avis que rien de moins que l'indépendance pour la petite, mais relativement prospère, région de la mer Noire est hors de question. Ainsi, le refus de la communauté internationale de reconnaître l'indépendance ne serait pas raisonnable.

«[Il n'y a] absolument aucune chance que l'Abkhazie retourne dans le giron de la Géorgie ou existe d'une quelconque manière au sein de l'État géorgien […] Les Abkhazes n'ont aucune raison de songer à une union avec la Russie et ce n'est certainement pas ce qu'ils veulent ou ce qu'ils ont déjà souhaité depuis l'effondrement de l'URSS», écrit-il.

Tom De Waal, chercheur au Carnegie Endowment for International Peace, affirme dans un courriel à Époque Times que la situation «demeurera à court terme dans une impasse».

«La Russie ne fera pas volte-face sur sa reconnaissance unilatérale des deux territoires, et la Géorgie continuera de maintenir qu'ils sont "occupés". Les deux positions ne reflètent pas la réalité plus nuancée de la situation, mais elles ne changeront pas bientôt», estime-t-il.

En ce qui a trait à l'Ossétie du Sud, qui est moins populeuse et qui se rapproche davantage de la Géorgie sur les plans géographique et démographique, M. De Waal croit qu'il est probable qu'ils en viennent finalement à un type d'entente, mais pas dans un avenir rapproché.

La question de la légitimité des deux régions sécessionnistes peut également être considérée selon l'angle du Kosovo, dont l'indépendance de la Serbie a été appuyée par l'Occident, mais fortement opposée par la Russie.

Selon M. De Waal, le Kosovo n'est pas nécessairement entièrement légitime, tout comme l'Abkhazie et l'Ossétie du Sud ne sont pas nécessairement entièrement illégitimes. Il argue cependant que l'Abkhazie doit au moins prendre au sérieux le droit des Géorgiens déplacés au début des années 1990 de retourner en Abkhazie. Leur droit de retour a déjà été reconnu par une résolution de l'ONU. Toutefois, pour la Russie, l'exemple du Kosovo est quelque chose à utiliser pour justifier son soutien aux régions sécessionnistes.

Outre l'instabilité locale, le conflit a aussi une portée internationale alors que la Géorgie aimerait rejoindre l'OTAN. Mais la Russie verrait ce geste comme un grave affront, une incursion inacceptable dans sa sphère d'influence. Cependant, l'OTAN ne peut accueillir de membres dont les frontières sont disputées, alors l'accession de la Géorgie demeure hautement hypothétique.

Le refus de la Géorgie de laisser la Russie devenir membre de l'OMC, qui a des conséquences potentielles pour tous les membres de l'organisation, pourrait être interprété comme le dernier coup dans cette partie d'échecs complexe dans le Caucase.

Version originale : Russia and Georgia Still in Deadlock Over Breakaway Republics

 

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