Corruption du secteur public: «Indignez-vous!»

Écrit par Affaires-stratégiques.info
06.12.2011

  • Carte graduée selon l'indice de perception de corruption.(攝影: / 大紀元)

Le dernier rapport de Transparency International, intitulé Corruption Perception Index 2011, nous informe que le fléau de la corruption du secteur public touche tous les continents. La corruption est globalement perçue comme plus significative dans les pays du Sud. Il n’en reste pas moins que les pays occidentaux, souffrant de la crise et voyant les légitimités de leurs gouvernements remises en question par des scandales financiers et des affaires de mœurs, ont obtenu des notes qui peuvent être ressenties comme des avertissements, à l’image de la 25e place de la France. Les printemps arabes ou le mouvement des Indignés sont autant de preuves de l’augmentation de la vigilance des citoyens à l’égard de la corruption de leurs régimes.

Transparency International, l’organisation civile internationale ayant pour vocation de mener et de coordonner la lutte contre la corruption au niveau mondial, a publié ce rapport le 1er décembre  2011; 183 pays et territoires se voient ainsi attribuer un Indice de perception de la corruption (IPC). Il correspond à une note décroissant avec l’augmentation de la perception de la corruption dans le secteur public, c’est-à-dire impliquant des fonctionnaires ou des politiciens. Une note de 10 indique que le pays est perçu comme complètement transparent, alors qu’un 0 est révélateur d’une corruption systémique. Il est également considéré qu’une note en dessous de 3 témoigne d’un très haut niveau de corruption. Les pays sont ensuite classés par rapport à cette note.

La corruption est définie, dans le cadre de ce rapport, comme «l’abus d’un pouvoir accordé, à des fins privées», et par conséquent comme l’atteinte à la vie, au bien-être ou au bonheur d’êtres humains par des personnes en position d’autorité. L’IPC est un indice composite basé sur des résultats d’enquêtes et sondages, ou des données collectées par 13 institutions jugées «de bonnes réputations». Les données ont été rassemblées entre 2009 et 2011 et portent principalement sur les aspects suivants : les pots-de-vin prélevés par les fonctionnaires, les détournements d’argent, les malversations ainsi que l’existence et l’efficacité de mesures anticorruption en vigueur ou non dans le pays considéré.

Cependant, la corruption du secteur public est généralement étroitement associée à des activités illégales, révélées suite aux scandales médiatiques qu’elles engendreraient occasionnellement. Le terme «perception» (de la corruption) est de ce fait approprié, l’IPC n’étant pas une mesure définitive et exacte de la corruption. Il ne s’agit donc pas d’une science exacte, comme la forme d’un classement avec une note aurait pu le laisser croire, mais bien d’une estimation avec des marges d’erreur.

Transparency International nous avertit également que la comparaison du classement d’un pays sur l’échelle du temps n’est pas une démarche rigoureuse. Elle ne doit donc pas permettre aux lecteurs de tirer des conclusions significatives sur l’évolution de la perception de la corruption dans un pays, et ce, pour plusieurs raisons. Le nombre de pays inclus dans le classement évolue avec une tendance à la hausse : celui-ci comportait ainsi 178 pays en 2010 et 133 en 2003. La relativité du classement implique que la perception de la corruption régnant dans un pays donné est dépendante de l’évolution de la perception de cette corruption dans un autre pays. Transparency International nous invite à compléter nos conclusions, suite à la lecture de ce rapport, avec d’autres de ses publications, notamment National Integrity System assessments (NIS) : un ensemble d’études locales, par pays, qui évalue de manière critique le fonctionnement des institutions supposées établir le respect du droit et du principe de la bonne gouvernance.

On constate que les pays du Nord affichent globalement un meilleur classement que les pays du Sud. Force est de constater que peu de pays présentent une note suffisamment élevée pour se prétendre épargnés du fléau de la corruption qui sévit sur tous les continents. La Nouvelle-Zélande atteint la première place, avec une note de 9,5. Elle est suivie par le Danemark, ex-æquo avec la Finlande, qui a obtenu une note de 9,4. Les notes décroissent à un rythme relativement soutenu : l’Allemagne qui occupe la 14e place, ex-æquo avec le Japon, n’a acquis qu’une note de 8. La France est positionnée à la 25e place, juste après les États-Unis, avec une note de 7. Daniel Lebègue, le président de Transparency International France, a attribué ce résultat aux poids de certaines «affaires» comme Clearstream, Karachi, Guérini ou encore aux emplois fictifs de la mairie de Paris : «Même si l’administration française est plutôt intègre, ces affaires ont donné une mauvaise image de la classe politique, vue de la France comme de l’étranger.»

La note de 3 obtenue par l’Indonésie laisse entendre que la situation actuelle est très loin des objectifs du gouvernement qui souhaiterait atteindre un 5 en 2014. Les progrès sont encore trop peu visibles et Transparency International appelle à des réformes générales de l’ensemble de la bureaucratie indonésienne.

L’Inde qui occupe la 95e place se situe bien en dessous de la Chine, autre puissance asiatique émergente, située à la 75e place. Le gouvernement de Taiwan (32e place) se voit recommandé le lancement de campagnes dans le but de faire connaître à sa population les caractéristiques et les valeurs fondamentales d’une bonne gouvernance.

Les pays du Golfe ont obtenu «de bonnes notes», par exemple avec Bahreïn (48e), les Émirats arabes unis (28e) et la Qatar (22e). Transparency International considère que le royaume de Bahreïn répond aux standards internationaux en ce qui concerne l’amélioration de la compétitivité du secteur public, à l’échelle comptable aussi bien qu’au niveau de la gestion des ressources naturelles et énergétiques. La responsable d’International Transparency à Moscou, Elena Pamfilova, a commenté la 143e place de la Russie : «Il faut absolument que la volonté politique d’adopter des lois se transforme en volonté politique d’appliquer ces lois, parce que la société commence à poser des questions.»

Ce serait davantage la vigilance des citoyens vis-à-vis de la corruption qui aurait augmenté ces dernières années que la corruption en elle-même. On peut donner l’exemple des manifestations dans les pays arabes. Parmi les revendications des manifestants, du Qatar au Maroc, se trouvait invariablement une forme de contestation de la corruption. La Libye et l’Égypte ont respectivement obtenu les notes de 2 et de 2,9. On peut constater un phénomène similaire à travers l’analyse des causes à la base du mouvement des Indignés en Occident. De nombreux manifestants ont critiqué les mesures de rigueur imposées à la population, alors que le montant des évasions fiscales effectuées par les plus aisés est considérable, et serait estimé à presque 30 milliards de dollars en France.

SourceAffaires-stratégiques.info

Sources : Transparency International CPI 2011, Transparency International, Direct Matin, News.am, IndiaRealTime, Ghana Business News, , Taipei Times, Bahreïn News Agency, Jakarta Post, Huffington Post