Une nouvelle saison qui commence avec assurance

Écrit par Mathieu Côté-Desjardins, La Grande Époque
25.02.2011

  • Réal Bossé en match à la LNI(攝影: / 大紀元)

Soulevés par la salle comble du Club Soda, les joueurs de la LNI, très reconnaissants de la vibration du public, ont libéré leur talent pour le plus grand plaisir des spectateurs fébriles d’assister à l’aurore de cette saison 2011 remportée par les Jaunes.

Entrevue en compagnie de Réal Bossé, joueur de la LNI depuis 1995, faisant partie de l’équipe des Jaunes cette année. Il a été décoré de récompenses prestigieuses à plusieurs reprises. Il brille aussi à travers le petit écran, entre autres, dans son plus récent projet, 19-2, sur les ondes de Radio-Canada.

Époque Times (ÉT) : Réal Bossé, 16e année à la Ligue nationale d’improvisation. Qu’est-ce qui fait, qu’encore cette année, en plus d’une carrière bien entamée, vous choisissez de revenir à la LNI?

Réal Bossé (R.B.) : Je ne me lasse pas. C’est un banc d’essai. C’est une occasion de rencontrer des gens avec qui je ne travaille jamais. Des rencontres de créateurs, quelques fois magistrales. Des fois, ça fonctionne, d’autres fois non.

ÉT : C’est quoi être dans la peau d’un improvisateur?

R.B. : On jette des lignes à l’eau, on ne sait pas vraiment ce qu’on pêche. Des fois, c’est stimulant pour l’égo et, à d’autres moments, ça peut le démolir complètement! C’est de mettre sa créativité à l’épreuve. On est en représentation. Si c’est nul, c’est nul et il y a 400 personnes qui le savent en même temps que toi. C’est aussi ce partage qui est intéressant avec les gens. C’est toujours indécent. C’est comme si on montrait nos petites culottes de créateur. On a aussi confiance, on sait que le public n’ira pas raconter ce qui s’est passé à personne (rires).

ÉT : Lorsqu’il y a des ratés, le public de la LNI n’est-il pas le meilleur pour vous permettre de vous relever, tandis que c’est l’opposé au théâtre?

R.B. : Au théâtre, tu n’as pas le droit à l’erreur. Tu as pu pratiquer ton texte pendant des mois, c’est un peu normal. Ici, les gens sont au courant du déroulement d’un match. Ils savent que ça peut aller dans un sens comme dans l’autre, dans l’inconnu. On nous pardonne beaucoup de choses. Et, quand c’est bon, le public de la LNI est encore plus étonné de nous voir partir de rien vers quelque chose de bon qu’on aurait finalement pu écrire. C’est définitivement un plus.

ÉT : Est-ce que la structure du spectacle est quelque chose qui vous attire particulièrement?

R.B. : Effectivement, la forme est vraiment la raison qui fait que je reste, le fait de recevoir un thème, de créer à partir de ça, en direct. On est tous de bons improvisateurs, certains sont plus fatigués que d’autres à l’occasion, ce qui fait que tout est potentiellement dangereux. D’un autre côté, on se dit : «Essayons, plongeons dans le vrai vide!»

ÉT : Est-ce que l’improvisation a aussi positivement contaminé votre entourage professionnel, vos collègues?

R.B. : J’ai des amis qui ne feraient pas d’improvisation. Pourtant, ce sont de grands créateurs, avec papier et crayon. Ils peuvent comprendre que c’est risqué. Ça dépend comment tu gères ton égo. Si tu es prêt à le jeter aux vidanges, tu peux faire de l’improvisation. Si tu n’y arrives pas, tu risques de ne pas être capable de dormir pendant quatre ou cinq jours. Si tu as fait un mauvais match, tu ne te le pardonnerais pas. Et dans la même partie d’impro, ça ne doit pas tuer ta vie.

ÉT : Quelle est la condition de l’égo après avoir été forgé par la LNI?

R.B. : Beaucoup de choses sont moins graves que l’on ne pensait. C’est moins grave quand tu te fais dire non à une audition. Quand on te demande de modifier quelque chose dans ton jeu par exemple, dans ton intégrité d’acteur, c’est plus viable. Ça donne beaucoup de latitude et ça développe de l’aisance, de la transformation, du laisser-aller. Et ça, c’est plaisant sur un plateau de tournage, au théâtre, en tout temps. Ça permet à l’acteur d’être résiliant dans tous les sens du terme. Souvent, la «psychorigidité» des acteurs, c’est la crainte de ne pas vouloir aller jouer. On n’est pas en train de changer des vies, mais on améliore notre sort (rire). Il y a toute cette tragédie que les acteurs portent. Il faut enlever ça.

ÉT : Est-ce que l’improvisation est une phase-clé dans le développement d’un acteur?

R.B. : L’impro reste le meilleur médium pour savoir si tu veux faire une carrière dans ce domaine. Personnellement, ça m’a amené au théâtre, d’autres, ça les amène en humour… C’est un projet démocratique, c’est accessible à tout le monde. Ça apporte beaucoup. Je dirais que 80 % des gens qui ont été sur scène ont fait de l’improvisation. C’est fertile, c’est stimulant, c’est une très bonne place pour faire ses premières armes, ça garde jeune.

 

ÉT : À quoi aura-t-on droit pour cette saison 2011 de la LNI?

R.B. : On aimerait beaucoup plus toucher l’aspect théâtral, ramener les débuts de la LNI, moins aller dans la comédie, chercher la fonction expérimentale. Au lieu de chercher le résultat, chercher l’expérimentation qui nous amène au résultat. Retarder le résultat, l’amener plus loin. Tu ne peux faire ça tout seul, même dans une [improvisation] solo. Il y a cette grande complicité qui est nécessaire.

Comme bien des projets sentis, la LNI ne roule pas sur l’or pour offrir une qualité pourtant comparable à ce métal précieux. Leur présence et le goût de transmettre la passion d’improviser s’étendent plus loin que leurs rendez-vous du lundi soir. Durant la semaine de relâche, le mardi 1er mars, les populaires comédiens de Tactik affronteront une équipe de comédiens étoiles de la LNI. Dans le cadre des Rendez-vous du cinéma québécois le 26 février, la LNI présentera un match d’improvisation sur la rue Saint-Denis entre Sainte-Catherine et Maisonneuve à 21 h. François-Étienne Paré, Réal Bossé, Anaïs Favron, Simon Rousseau, Diane Lefrançois et Anne-Élisabeth Bossé improviseront sur des thèmes liés au cinéma québécois.

Surveillez le site officiel de la LNI pour plus de détails : www.lni.ca