Trait marquant du cinéma d'animation

Écrit par Mathieu Côté-Desjardins, La Grande Époque
09.02.2011

  • Scène du film L'Illusionniste(攝影: / 大紀元)

  L'Illusionniste

C'est pendant le trajet de train en direction de Cannes, pour la première mondiale de son film Les triplettes de Belleville, que le dessinateur, auteur et réalisateur Sylvain Chomet a commencé à voir L'Illusionniste défiler devant les yeux. Portant une œuvre saluée unanimement dans le monde entier, Chomet avait, pendant la création des Triplettes, un intérêt grandissant pour l'acteur et réalisateur français Jacques Tati, entre autres, à propos d’un scénario qu'il avait laissé choir pendant les années de sa gloire.

Un magicien, maîtrisant toujours son art malgré son âge avancé, vagabonde à travers l'Europe dans la seule quête de gagner sa croûte avec dignité. Une jeune femme, en transition de fille à femme, s'immisce dans son quotidien tout en faisant la découverte de la vie urbaine.

  • Scène du film L'Illusionniste(攝影: / 大紀元)

Avec L'Illusionniste, le réalisateur a décidé de mettre en relief un type de récit inhabituel. Chomet n'avait pas l'intention d'errer dans les sentiers battus, mais sans trop être bigarré. «[L'Illusionniste] ne suivait pas non plus la règle de base des longs métrages animés, puisqu'il était clairement destiné aux adultes. Il fallait aussi trouver le moyen de rendre ce dessin animé attractif pour les enfants», explique l’auteur sur le site du film.

Marée haute, marée basse

«Si Les Triplettes de Belleville racontait simplement une histoire complexe, L'Illusionniste est l'exact contraire. L'histoire était si faussement simple que sa narration était extrêmement compliquée à concevoir», confie Chomet.

Le film parvient à nous faire vivre la fibre impénétrable de ses personnages par sa cadence flegmatique et intime, ce qui n'est pas imposé de façon flagrante aux cinéphiles. Traitant des passages de la vie, L'Illusionniste amène aussi à l'avant-plan toute la question de la finitude, de la désuétude, mais aussi l'intérêt des gens qui s'effrite pour la simplicité des petites choses.

  • Les personnages (攝影: / 大紀元)

Comprimés de bonheur

Les rebondissements se font rares si on les attend les bras ouverts. Ils sont plutôt rétractables et encapsulés dans les détails, dans les instants de folie tempérée. À travers une Europe esthétique, détaillée et sérieuse, L'Illusionniste provoque son lot d'invraisemblances désarmantes pour déséquilibrer le spectateur.

Quasi muet, L'Illusionniste captive à sa façon. Comme les silences et la solitude jouent les plus grands rôles, il n'en reste pas moins que l'artiste de music-hall et Alice, les deux protagonistes, sont des personnages taillés dans le roc.

Rehausseurs de bon goût

Quelques effets 3D sont si délicats qu’ils enrichissent les dessins faits à la main avec légèreté. La bande sonore de circonstance nous ramène dans les années 1950; elle est beaucoup plus en retrait que celle des Triplettes de Belleville qui constituait le cœur du long métrage.

Des bulles d'humour pétillent ici et là quand on s'y attend le moins. Le lapin de l'artiste a souvent le mandat de nous faire rire.

L'Illusionniste n'a pas de destination, et c'est justement ce qui le rend unique. Il s'agit d'une œuvre vulnérable et ingénue berçant notre humanité et esquivant à coup sûr une vieillesse qui pourrait l'enlaidir. À voir avec une personne chère.