L’œuvre et la vie de Gérald Godin (1938 à 1994) auront été marquées par son engagement viscéral envers le Québec.

Oubliée ou méconnue, la contribution de son héritage politique et littéraire au patrimoine culturel est inestimable. Figure marquante de la poésie québécoise toute sa vie durant, il aura aussi été un acteur de premier plan dans les grands bouleversements sociopolitiques des 50 dernières années. De Trois-Rivières à Montréal, des années 1960 au Référendum de 1995, en passant par les prisons d’Octobre et les chansons de sa compagne Pauline Julien, le film Godin allie archives et entrevues pour retracer le parcours unique d’un combattant. Un portrait saisissant de celui que l’on surnomme le «député-poète».

Le réalisateur de Godin, Simon Beaulieu, a dû éprouver un plaisir rare à patauger à travers une foule d’archives aussi motivantes les unes que les autres puisque la ferveur de Gérald Godin ne manquait aucune occasion pour retentir. Certaines de ces séquences, aux couleurs et à la qualité renversantes, nous ramènent sans détour au Québec d’il y a quelques décennies.

La symétrie entre le portrait de l’homme et celui du personnage public est enthousiasmante. À plusieurs reprises, on oublie l’allégeance politique compte tenu de la grandeur de l’homme qui transcende le personnage, que ce soit lors d’entrevues plus intimes sur sa vie, lors de la lecture d’extraits de ses poèmes, durant des témoignages de proches ou encore lors de ses rencontres avec les communautés néo-québécoises.

Toute la place laissée aux chansons de Pauline Julien ne sert pas seulement de toile de fond, encore moins de fioriture. Au contraire, elle était partie intégrante de la vie de Gérald Godin autant que Gérald Godin est lié à Pauline Julien. Beaulieu a rendu hommage à leur complicité de grande exception.

Le Québec de Godin et celui d’aujourd’hui comptent autant de contrastes que de similarités. C’est pourquoi autant la nostalgie, la révolte et l’espérance peuvent s’entrecouper pendant le visionnement de Godin.

Godin instille une essence vitale au Québec qu’on pourrait croire perdue. Le réalisateur a réussi à redonner l’appétit à la grande chanson québécoise engagée, à la poésie outre les cours de français du cégep et, par-dessus tout, à un idéal humain qui peut enfanter une politique sans artifice. Documentaire équivalant à de grandes heures de cours d’histoire ou de sciences politiques donnés par les meilleurs ou les pires professeurs.

Godin, en salle au cinéma Beaubien.