La persécution avant la persécution

Écrit par Matthew Robertson, La Grande Époque
26.04.2011
  • À travers la Chine: Un site de pratique dans le nord-est de la Chine au milieu des années 90. (Avec l’acord de Minghui.net)(攝影: / 大紀元)

 

Les pratiquants de Falun Gong en Chine étaient fichés avant le rassemblement du 25 avril

 

Le 25 Avril 1999, le plus “sérieux incident politique” depuis 1989 se produisit en chine. Plus de 10 000 pratiquants de Falun Gong, une pratique spirituelle, se sont tranquillement rassemblés dans les rues de Pékin et restèrent debout ou assis du matin jusqu’à la nuit. Ces derniers cherchaient à être autorisés de pratiquer leur foi librement et sans harcèlement.

L’incident est souvent vu comme le catalyseur de ce qui s’est produit ensuite: une persécution impliquant le pays entier utilisant le modèle culturel de la révolution où figure une propagande incessante, une violence cruelle, des camps de travaux forcés, et des campagnes de rééducation de la pensée qui continuent jusqu’à aujourd’hui. Mais en regardant les trois années qui ont précédées, cet incident montre que plutôt d’être le catalyseur de la persécution, il a été le dernier grand effort des pratiquants pour éliminer une ligne « dure » du parti communiste chinois (PCC) qui avait commencée à éclore en 1996.

Le Falun Gong est une pratique spirituelle chinoise comprenant cinq exercices de méditation; il enseigne à se comporter selon les trois principes de Vérité, Compassion et Tolérance. Depuis son introduction en Chine en 1992 jusqu’à sa répression en 1999, 70 à 100 millions de personnes ont suivi cette méthode.

La campagne contre le Falun Gong a commencé en 1996. Pendant les trois années suivantes, jusqu’à la persécution de masse deviennent officielle, il y a eu déjà des tentatives pour stopper l’influence du Falun Gong en Chine, en répandant une propagande négative, en infiltrant des groupes de pratique, en émettant des étiquettes politiquement chargées, et en posant les fondements d’une plus importante répression.

Durant cette période, les pratiquants de Falun Gong à l’intérieur et l’extérieur du Parti et de l’Etat tentèrent d’éviter la répression, et cela jusqu’en 1999 où toutes les tactiques visant le Falun Gong étaient épuisées. Le parti communiste s’est alors disposé à « éradiquer » la pratique de Falun Gong.

  • Aujourd’hui : Ye Hao, un coordinateur de la communauté du Falun Gong en Chine avant la persécution et fonctionnaire du Bureau de la Sécurité Publique. Il médite ici à New York en 2009. (Avec l’accord de Minghui.net)(攝影: / 大紀元)

Propagande

En juillet 1996, les autorités ont commencé à se positionner contre le Falun Gong dans un article, en attaquant durement le livre d’enseignement, le Zhuan Falun, qui à cette époque, était un best-seller national.

L'article est apparu dans une des publications du journal standard du parti communiste chinois, le quotidien Guangming. Il a été écrit par Pan Guoyan, qui était alors député à la tête de l’Administration général de la presse et  de la publication, l'agence chargée de la propagande et de la censure des livres publiés dans le pays.

Ye Hao était à la tête de la Société de Recherche sur le Falun Gong — organisme en charge de la communication sur le Falun Gong en Chine — il était aussi directeur dans le Bureau de la Sécurité Publique. Maintenant il est dans sa 70ième année, mais déjà en ce temps-là  il était considéré comme un "vieux camarade” s’étant d'abord approché du qi gong par la lentille du matérialisme dialectique. Ye connaissait les conversations intérieures du parti à propos du qi gong et du Falun Gong. Il a dit que c'était Xu Guangchun, alors vice ministre du Département Central  de Propagande, qui avait organisé la diffamation dans les journaux pour attaquer le Falun Gong.

Les rougeurs de la propagande ont contaminé plus de 20 journaux importants qui ont publiés l’article du quotidien  Guangming,  et le Département Central de la Propagande a interdit le droit de publication du Zhuan Falun.

L’interdiction du livre fut la première parmi beaucoup d’autres mesures. Les autorités ont utilisé les quelques années qui suivirent pour essayer de diminuer la croissance du Falun Gong et défaire son influence sur la société chinoise. Pourtant le livre continua d’être imprimé, même dans les presses officielles, parce que les gens dans le système pensaient que le Falun Gong était bon.

Une autre tentative, selon Ye, avait été instiguée par le Département Central du Front du Travail Unifié lors d’une grande réunion du parti en 1996. Il a été dit aux «huit partis mineurs »- les fronts politiques du parti communiste- que le Falun Gong était une « religion hérétique » et serait déclaré illégal. Mais cela n'avait cependant pas causé de répression nationale.

Cependant les calomnies de la presse continuaient.

M. Qing Yang, une personne en contact avec le Falun Gong en Chine à cette époque et qui vit actuellement aux États-Unis, a dit que lorsque le parti lançait des campagnes politiques, « la première chose qu’il  faisait était la propagande. La deuxième chose était de créer une enquête et de fabriquer des preuves. »

  • Plus de 10 000 pratiquants de Falun Gong se sont rassemblés lors d’une pratique en groupe dans la Ville Shengyang, en mai 1998. (Avec l’accord de Minghui.net)(攝影: / 大紀元)

Enquêtes

Mme Wang est une pratiquante de 65 ans qui était en Chine à cette époque. Elle a vu un jeune homme venir pour apprendre les exercices un jour  et ensuite commencer  à  poser beaucoup de questions. « Quel est votre nom ? Où vivez-vous ? Quelle est votre unité de travail ? », lui arrivait il de demander.

« Normalement les personnes pratiquant le Falun Gong viennent juste pour lire le livre ou pratiquer, ils ne posent pas autant de questions détaillées comme ça » a-t-elle dit.

Deux enquêtes nationales ont été ordonnées par le Ministère de la Sécurité Publique, en janvier et juillet  1997, pour obtenir la preuve que le Falun Gong était engagé dans des « activités religieuses illégales ». Le résultat annoncé des agents secrets était, «aucun problème n'a été trouvé». La Police infiltrait facilement les groupes de pratique car le principe du Falun Gong est d’être ouvert à chacun.

Une année plus tard, le 21 Juillet 1998, le ministère a lancé une autre enquête, cette fois en déclarant directement le Falun Gong comme «religion hérétique» (xiejiao) dans une note interne. On a ordonné que les postes de police aillent interroger les pratiquants pour obtenir la preuve des méfaits.

Cette étiquette fut  plus tard réactualisée, et traduite en anglais par « the evil cult » (le culte diabolique), ce qui fut le soutien principal de la propagande anti-Falun-Gong pendant quatre mois qui ont suivi le début officiel de la persécution en juillet  1999.

Les spécialistes occidentaux comme Yu Hao dans son interview,  indiquèrent que les enquêtes successives du Bureau de la Sécurité Publique, suivies par l'ordre final d’étiqueter le Falun Gong comme une religion hérétique, ont provoqué une lutte interne dans le département entre les adversaires idéologiques et les partisans.

Wang Bin, qui à ce moment était un coordinateur volontaire du Falun Gong dans le District de Haidian de Pékin, a dit que la situation s’était tendue après que la méthode fut étiquetée  de « religion hérétique ». « Ils battent les gens, des amendes sont données [et] les maisons fouillées ».  Il a ajouté que les incidents les plus extrêmes sont survenus dans les régions les plus éloignées.

Wang Bin a accentué sur la complexité des événements. Des personnes dans l'appareil d’état du Parti cherchaient à créer des campagnes contre le Falun Gong, pendant que les protecteurs et les pratiquants essayaient de les éviter. « Il y avait beaucoup de gens pratiquant le Falun Gong aux plus hauts niveaux du gouvernement en ce temps-là, » a-t-il dit dans une interview téléphonique, en écrivant très rapidement une liste de noms. « Beaucoup de gens pensaient que le Falun Gong ne devait pas  être interdit. »

  • Un site de pratique en groupe au Temple Jietai à Pékin en 1996 (Avec l’accord de Minghui.net)(攝影: / 大紀元)

Contre enquêtes

Après les deux enquêtes du Bureau de la Sécurité Publique, la commission des sports a également lancé sa propre enquête. C'était une institution qui, bien que faisant partie du gouvernement, avait des relations relativement amicales avec le Falun Gong.

L'équipe dirigée par un professeur qui pratiquait Falun Gong a étudié les effets de la pratique sur plus de 12 000 personnes dans la province du Guangdong. Elle a rapporté que 97,9 % des personnes ayant répondu affirmaient que leur santé s'était améliorée et que cette pratique permettrait de faire des économies immenses en termes de soins de santé.

Une autre enquête a été menée par Qiao Shi, l'ancien président du Congrès national du peuple et un cadre supérieur ayant effectué une longue carrière dans le système de la sécurité publique. Il avait pris à plusieurs reprises la défense du Falun Gong et dans une enquête terminée dans la seconde moitié de l'année 1998, il a rapporté au Bureau des affaires légales et politiques du Comité central du parti communiste : « le Falun Gong apporte des bienfaits innombrables à la nation et au peuple, sans causer aucun tort. »

 

Xu Yu était professeur en ingénierie civile à l'Université Tsinhua à l'époque et avait volontairement organisé un club de Falun Gong dans cette université. Il avait organisé des campagnes d'écriture de lettres rassemblant des centaines d'intellectuels connus qui pratiquaient également le Falun Gong.

 

La propagation de la pratique et le statut social diversifié des pratiquants inquiétaient les autorités communistes. De la même façon qu'il attirait les paysans et les personnes âgées, le Falun Gong avait trouvé de nouveaux pratiquants dans l'armée, la police, les services de renseignement et jusqu'au sein du Parti communiste. Plus d'un cinquième des pratiquants étaient des diplômés universitaires, une proportion relativement plus élevée que la moyenne de la population chinoise.

Résistance

Ai Weiwei, cet artiste dissident récemment arrêté (qui ne pratique pas le Falun Gong) avait un jour déclaré : « Si vous n'agissez pas, le danger devient plus fort. »

Les pratiquants de Falun Gong en Chine ont affirmé lors d'entretiens que leur choix de résister fermement à la pression croissante était la seule chose qui avait empêché la persécution de se déclencher plus tôt. Entre juin 1996 et avril 1999, les pratiquants ont répondu activement aux déclarations négatives des médias et ont organisé des manifestations pacifiques contre les articles qu'ils considéraient comme diffamants.

Les manifestations étaient vues comme une marque d'insolence en Chine, un pays où les groupes indépendants ne sont pas censés faire valoir leurs droits civiques ni chercher une reconnaissance positive en public. Les pratiquants ont adressé aux différents médias leurs propres histoires racontant comment le Falun Gong les avait aidés ou transformés et les journalistes et éditeurs étaient alors, selon les pratiquants, souvent compréhensifs et réceptifs.

Les pratiquants ont également expliqué dans des entretiens qu'ils négociaient aussi le futur de leur foi en Chine.

Ye Hao a expliqué la logique derrière les appels : « Lorsqu'ils sont traités de manière injuste, ils sortent et crient : « Falun Dafa est bon. J'en ai bénéficié. Avant, j'étais gravement malade et Falun Dafa m'a donné une nouvelle vie. » Ils ne disent rien d'autre, ils parlent simplement de leur propre expérience.

Ils espéraient que de simples témoignages de ce genre convaincraient le Parti communiste de ne pas « prendre la mauvaise décision. »

Ye Hao explique que le parti était déterminé : « S'ils veulent vous persécuter, ils vont le faire. Nous ne pouvions qu'essayer d'adoucir la persécution. »

Xu Yin, professeur à l'Université Tsinghua, a réfléchi sur les débuts de la campagne de propagande et ce qui a suivi. « Notre sort était joué, ils nous avaient déjà visé», explique-t-il. « Nous avons essayé de nous confronter au Parti avec prudence. Si nous n'avions rien fait, cela aurait été pire. »

Version originale: http://www.theepochtimes.com/n2/china/falun-gong-the-persecution-before-the-persecution-54998.html