Comprendre les papillons, leur organisation et la génétique

Écrit par Heloise Roc, La Grande Epoque
08.05.2011

  • Les papillons vivant en haute altitude sont moins touchés par l’extinction. (Toru Yamanaka/AFP)(攝影: / 大紀元)

Les papillons représentent environ 10% des espèces animales connues au monde selon l’UICN (l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature). Ainsi, Jane Smart, directrice du groupe de l’UICN indiquait dans un communiqué: «Quand on parle des espèces menacées, les gens ont tendance à penser aux créatures plus grandes et charismatiques telles que les pandas ou les tigres, mais nous ne devons pas oublier que les petites espèces de notre planète sont toutes aussi importantes, et ont également besoin de mesures de conservation. Les papillons, par exemple, jouent un rôle pivot en tant que pollinisateurs dans les écosystèmes dans lesquels ils vivent».

L’association Noé Conservation, avec 165.000 espèces répertoriées dans le monde, indique que les papillons sont indispensables à l’homme. Ils participent aux écosystèmes et jouent un rôle important dans le bon fonctionnement de la nature. Ils sont des agents pollinisateurs. Ils font partie de la chaîne alimentaire et sont des proies pour les oiseaux, les batraciens et les chauves-souris. Du fait de la disparition de leurs habitats, aujourd’hui de nombreuses espèces disparaissent ou se raréfient. En conséquence, en Grande-Bretagne, les populations d’oiseaux ont vu leurs effectifs diminuer.

L’adaptabilité des espèces de papillons et les génomes

Une équipe scientifique, composée de chercheurs venant de Finlande et des États-Unis, a voulu comprendre les mécanismes de la vie dans l’histoire. C’est ainsi qu’une étude s’est concentrée sur les phénomènes de l’infiniment petit, à savoir comment les génomes facilitent l’adaptabilité des espèces. Dès lors les chercheurs du projet découvrent que les descendants des papillons dits «explorateurs», ceux qui aiment coloniser de nouveaux habitats, sont génétiquement différents de leurs cousins plus sédentaires. Cette étude vient d’être publiée dans la revue Molecular Ecology.

Les papillons explorateurs

Les scientifiques qui participent à la recherche sont des chercheurs de l'université de Helsinki en Finlande et du centre de recherche de l’université de Pennsylvanie aux États-Unis, représentés par le professeur Ilkka Hanski de Finlande, et par les chercheurs James Merden et le Dr Christopher Wheat, du Centre des États-Unis. Ils ont évalué que les bases génétiques des papillons explorateurs sont différentes. Ils ont observé que la maturation des œufs des papillons explorateurs est plus rapide, qu’ils ont également une plus grande habilité dans leur vol et que leur métabolisme énergétique est supérieur à celui des autres espèces. Les scientifiques ont identifié, au travers de ces observations, comment la sélection naturelle s’effectuait chez certaines espèces.

L’espèce de papillons diurnes «damier du plantain» a été étudiée plus particulièrement par le professeur Ilkka Hanski. Le damier du plantain vit dans les îles Aland, en Finlande. Pour l’étude, une technologie nouvelle de séquençage génétique a été utilisée. Elle a permis de distinguer, parmi des milliers de gènes de codification protéique, les caractères uniques de chaque groupe. En conséquence, les travaux du professeur Ilkka Hanski ont été primés par le prix Crafoord de l’année, ce prix correspond à la version écologique du prix Nobel.

Le projet Glanville Fritillary, le territoire des insectes

Le projet Glanville Fritillary n’est pas nouveau, il a démarré il y a 20 ans en Finlande en 1991. Il fut appelé Glanville fritillary, autre nom de l’espèce damier du plantain. «Ce projet a joué un rôle important dans le développement de la biologie de la métapopulation», explique le professeur Hanski. Ce terme métapopulation qu’emploie le professeur Hanski indique que la survie d’une population dépend de la taille de son habitat. En effet, si la taille du territoire est trop petite, la population peut être vouée à l’extinction, la perpétuation d’une espèce dépend de la superficie de son habitat et de ses capacités d’adaptation aux lieux.

«Les papillons vivent dans un réseau de 4.000 prairies. Il n'y a pas de grandes populations et la persistance du paysage est basée sur l'équilibre entre les extinctions locales stochastiques et la recolonisation des prairies actuellement inoccupées. Une série d'études a démontré que les femelles qui ont établi de nouvelles populations locales sont plus dispersées que la métapopulation moyenne des femelles et il existe d'autres différences de vie et d’histoire entre les papillons dans les populations plus anciennes et celles relativement nouvelles», a-t-il ajouté.

  • Les papillons dits explorateurs, aiment coloniser de nouveaux habitats. (AFP)(攝影: / 大紀元)

Les papillons sont des spécialistes

Le professeur Marden, de l’université de Pennsylvanie aux États-Unis, explique: «Les papillons, comme d'autres espèces, sont des spécialistes. Ils sont très regardants sur l'endroit où ils vivent. Cette caractéristique donne à l'espèce ce que les écologistes appellent une distribution irrégulière. Dans un environnement, les organismes individuels sont confrontés à un choix fondamental entre celui de rester dans leur environnement de naissance ou celui de s'aventurer pour trouver un nouvel habitat plus adapté». Rester dans un environnement sûr, dans le but d’une survie immédiate, peut exposer la descendance aux parasites, tandis que la dispersion peut sembler dangereuse mais si le nouvel habitat est inoccupé, il offre un avantage potentiellement important.

Ainsi le professeur Marden explique: «Nous voulons mieux comprendre les gènes et la physiologie impliqués dans la détermination de caractéristiques sédentaires, contre les caractéristiques aventureuses». Il ajoute: «Les biologistes sont fascinés par les questions rentables telles que la façon dont la sélection naturelle produit et maintient des variétés sédentaires et aventureuses au sein des espèces».

Des gènes responsables de la libération de protéines stockées

Selon les experts, en raison des changements d'habitat, des évènements hasardeux comme la maladie déclenchent l'extinction des petites populations dans les lieux limités. Le professeur Marden explique: «La persistance des espèces sur une échelle régionale requiert que la vitesse d'établissement de nouvelles populations doit être aussi élevée que la vitesse d'extinction des populations locales». «La dispersion des individus femelles est ce qui détermine la vitesse d'établissement, ainsi que le nombre d'habitats et de distances entre eux».

Les laboratoires Marden et Hanski ont mesuré et comparé l'expression chez les femelles des populations de papillons établies contre les nouvelles populations locales établies par les papillons explorateurs. Une différence importante a été observée dans les populations anciennes et nouvelles, notamment dans la manière dont elles exprimaient certains gènes responsables de la période et la libération de protéines stockées pour la production d'oeufs ainsi que la maintenance des protéines de muscles impliqués dans le vol. L'équipe a découvert des variations au niveau des vitesses métaboliques de vol des papillons. En effet, les chercheurs ont découvert deux sortes de variante génétique bien distinctes, l’une associée à la vitesse et l’autre associée à l’endurance. Le professeur Marden commente: «Il est facile de comprendre pourquoi les caractéristiques et leurs gènes associés seraient plus fréquents dans les nouvelles populations. Une meilleure capacité de vol permet à certains papillons d'atteindre et de s'établir dans de nouveaux habitats».

Le réchauffement climatique et la perte d'habitat des papillons

Selon une étude publiée par le PNAS, le changement climatique et la perte d'habitat seraient à l'origine d'une diminution du nombre de papillons en Californie. Se basant sur des données de terrain, cette étude attire l'attention sur le déclin de ces espèces, indicateurs de la santé générale des différents écosystèmes.

Dirigés par le chercheur Arthur Shapiro, du département d'entomologie de l'université californienne de Davis, ces travaux illustrent comment de larges populations peuvent réagir au réchauffement climatique. Le professeur Shapiro présente des statistiques sur plus de 150 espèces vivant dans des habitats variés, situés à différentes altitudes (comprises entre le niveau de la mer et la limite de la flore arborescente). Globalement, ces données mettent en évidence une diminution de la biodiversité de cet ordre d'insecte sur l'ensemble des sites proches du niveau de la mer. Les papillons vivant dans les zones de plus hautes altitudes seraient moins touchés.

Les papillons des zones urbaines possèdent des capacités adaptatives

D’après les chercheurs, le changement climatique ne peut pas être tenu pour seul responsable de ce déclin. Les données montrent en effet que la diminution du nombre de papillons est plus importante lorsque les habitats ruraux ont été convertis en zones urbaines ou périurbaines. Les espèces propres aux zones urbaines ont montré une capacité d’adaptation plus importante que les espèces ne vivant que dans des habitats spécifiques (type rural). Elles enregistrent un déclin plus important. D'après le professeur Shapiro, ce dernier résultat peut surprendre et révèle l'importance de tenir compte de l'ensemble des variables environnementales.