Politique humanitaire: de la hiérarchie verticale aux réseaux

Écrit par IRIN News
15.06.2011

  • Sean Penn accueille Susan Sarandon en avril 2010 dans un camp pour personnes déplacées à Haïti,(Staff: Kevork Djansezian / 2010 Getty Images)

MEDFORD – L’aide humanitaire est en train de changer : avec l’émergence de bailleurs «non traditionnels» et de travailleurs humanitaires «non professionnels», les décisions inhérentes à la réponse aux crises humanitaires ne sont plus exclusivement élaborées à New York, Genève, Washington ou, plus généralement, en Occident.

Lors de la seconde conférence mondiale sur les études humanitaires à l’Université de Tufts à Medford, aux États-Unis, des analystes débattent pour voir comment ce réseau décentralisé émergent, qui défit le modèle traditionnel hiérarchique des bailleurs, peut être rendu «plus efficace et plus responsable», a dit Michael Barnett, un expert en ce domaine.

D’autres tendances se dessinent. M. Barnett et des analystes comme Taylor Seybolt, directeur du Ford Institute of Human Security à l’université de Pittsburgh, observent les implications du modèle de la gestion économique qui s’applique de plus en plus fréquemment à l’aide humanitaire. D’importantes organisations humanitaires ont commencé à parler du secteur humanitaire en tant qu’«industrie» et des bénéficiaires en tant que «clients».

Les théories autour de «la hiérarchie», «du réseau» et «des marchés» sont tirées de modèles économiques.

Cependant, l’émergence d’une culture d’entreprise au sein du secteur humanitaire ne fait pas bon ménage avec l’apparition d’un nouveau genre de travailleur humanitaire. «Des gens qui étaient heureux de signer des chèques aux organisations humanitaires veulent maintenant sauter dans un avion et livrer personnellement l’aide humanitaire aux communautés affectées, ce qui n’est pas nécessairement dans le meilleur intérêt du bénéficiaire», a dit M. Barnett à IRIN.

Une partie de ses recherches indique que le nombre de ces bons samaritains, agissant principalement pour des organisations confessionnelles et des églises et se rendant dans des pays en développement, dépasse de loin les travailleurs humanitaires professionnels. «Mais, il y a un manque de données fiables pour affirmer cela avec certitude.»

D’un autre côté, M. Seybold affirme qu’une plus grande offre de fournisseurs d’aide humanitaire n’est pas une mauvaise chose pour les bénéficiaires. Il a dit à IRIN que certains de ses étudiants qui effectuaient des recherches à Haïti après le tremblement de terre de 2010 ont trouvé que les gens préféraient aller dans un camp géré par l’acteur Sean Penn plutôt que dans le camp installé par les Nations Unies, car le premier était plus propre et géré plus efficacement.

«Mais ce métier consiste à sauver des vies, et là on ne peut pas faire d’erreurs – on a besoin de responsabilisation et d’un haut niveau de professionnalisme», a dit Peter Walker, le directeur du Centre International Feinstein de l’université de Tufts, l’organisateur de cette conférence de quatre jours sur les études humanitaires.

Normes minimales

M. Barnett et M. Seybold reconnaissent tous les deux qu’il faut que tous ces acteurs émergents adhèrent aux normes minimales et au code humanitaire de conduite.

M. Walker affirme qu’en développant le professionnalisme humanitaire chez des individuels – que ce soit de la part d’un gouvernement donateur ou d’une certaine organisation qui a répondu à une crise – le système pourrait évoluer vers une approche réseau plus responsable. «Chaque individu serait alors responsable et redevable de comptes.»

La conférence de Tufts a débuté le 2 juin et a rassemblé plus de 400 experts pour parler des tendances émergentes dans le système humanitaire et voir comment répondre au mieux aux besoins des gens affectés par des crises, naturelles ou causées par l’homme.

Source : IRIN News