Islam-Occident: la difficile entente

Écrit par Affaires-stratégiques.info
28.07.2011

  • Des étudiants pakistanais brulent un drapeau américain dans la capitale Islamabad.(Stringer: SAJJAD QAYYUM / 2011 AFP)

Musulmans et Occidentaux semblent s’accorder à dire que les relations entre leurs deux communautés sont loin d’être au beau fixe, et se reprochent mutuellement leur fanatisme supposé; les musulmans ne respecteraient pas les droits des femmes et les Occidentaux seraient égoïstes, amoraux et avares. L’institut de sondage américain Pew Research Center (PRC) s’est intéressé à la manière dont chacune des deux communautés perçoit l’autre, et compare certains de ses résultats avec ceux d’un précédent sondage sur la même thématique publié en 2006. Les stéréotypes semblent avoir la peau bien dure.

En tête des peuples musulmans considérant que leurs relations avec les Occidentaux sont mauvaises, la Palestine avec 72 %, la Turquie et le Liban avec 62 %, l’Égypte avec 60 % et la Jordanie avec 58 %. Du côté occidental, la France tient le haut du classement avec 62 % des interrogés jugeant ses rapports avec les musulmans défectueux. S’ensuivent l’Allemagne      (61 %), l’Espagne (58 %) et la Grande-Bretagne (52 %). Étonnamment, les États-Unis ne sont qu’en quatrième position, et moins de la moitié (48 %) des Américains partagent ce point du vue.

Le PRC insiste cependant sur l’évolution des opinions sur cette thématique : si l’on compare avec les chiffres de 2006, un plus grand pourcentage d’Occidentaux considère aujourd’hui les relations avec les musulmans convenables. À l’inverse, les chiffres n’ont pas changé du côté des peuples musulmans, pour qui la qualité des relations avec l’Occident n’a pas évolué depuis 2006. En cause, les politiques occidentales, qui sont pour 53 % des musulmans interrogés l’explication à la faible prospérité des nations musulmanes. De leur côté, 32 % des Occidentaux considèrent que c’est l’islamisme fondamentaliste qui est la cause de ce retard. Les deux parties s’accordent tout de même à dire que la corruption ainsi que le manque de démocratie et d’éducation y tiennent une grande part de responsabilité.

La crainte de l’extrémisme islamiste demeure très répandue, tant dans les nations occidentales que musulmanes. Le territoire palestinien arrive en haut du classement avec 78 % de sa population inquiète de l’expansion de l’islamisme, suivi de très près par Israël (77 %). Dans le camp occidental, la tête de liste est inattendue ; il ne s’agit ni des États-Unis, ni de la Grande-Bretagne, de l’Espagne ni même de la France, mais bel et bien de la Russie, dont les trois quarts de la population avouent être préoccupés par le développement de l’islamisme intégriste.

Le sondage du PRC a par la suite dressé un tableau qui compare le taux d’opinions favorables envers chacune des trois grandes religions monothéistes selon les zones géographiques. Aux États-Unis, seuls 57 % des interrogés ont une opinion favorable des musulmans, contre 82 % pour les Juifs et 89 % pour les Chrétiens. Quatre des six nations occidentales présentes dans le classement ont une opinion majoritairement favorable aux musulmans, à savoir donc les États-Unis, la Grande-Bretagne, la France et la Russie, mais les deux autres sont bien plus réservées (l’Allemagne avec 45 % d’opinion favorable et l’Espagne avec 37 %).

L’opinion des musulmans sur les chrétiens varie considérablement selon les pays. Au Liban, où vit une grande communauté chrétienne, quasiment tous les musulmans (96 %) ont une appréciation positive des chrétiens, tout comme une majorité de Jordaniens (57 %) et d’Indonésiens (52 %). Cependant, très peu de musulmans pakistanais (16 %) ou turcs (6 %) ont une opinion favorable des chrétiens.

Le pourcentage d’opinions favorable sur les Juifs demeure uniformément bas dans les pays du classement à prédominance musulmane. Dans ces sept nations, entre 2 % et 4 % de la population a à l’endroit des Juifs une opinion favorable (à l’exception de l’Indonésie avec        9 %).

La dernière partie du sondage mené par le PRC tend à savoir dans quels pays la nationalité prime sur la religion. Du côté occidental, seuls les Américains se sentent autant Américains que chrétiens (46 %), alors que dans les cinq autres pays, les sondés se sentent très largement plus citoyens de leur pays que chrétiens (70 % contre 23 % pour l’Allemagne, 90 % contre 8 % pour la France).

Dans les territoires et pays musulmans, la situation est tout à fait différente : pour une grande majorité de musulmans, la religion prime sur la nationalité (94 % contre 3 % au Pakistan, 65 % contre 24 % en Jordanie). Deux exceptions toutefois : la Palestine, et le Liban, où     respectivement 43 % contre 40 % et 36 % contre 28 % des interrogés se sentent plus citoyens de leur pays que musulmans.

Source : Pew Research Center