Le combat d’un journaliste chinois contre le vol de terrain par les fonctionnaires

Écrit par Matthew Robertson, The Epoch Times
17.01.2012

  • Zhao Yan, dans l’enclave chinoise de Flushing, dans le quartier du Queens à New York. M. Zhao a été la cible des autorités communistes en Chine pour son combat au nom des paysans spoliés. (Ben Chasteen/The Epoch Times)(攝影: / 大紀元)

Depuis son petit appartement de New York, Zhao Yan orchestre les mises en accusation en Chine.

NEW YORK – Zhao Yan, largement connu depuis que, journaliste d’investigation au New York Times, il a été emprisonné en Chine pendant trois ans pour «divulgation de secrets d'État», refait parler de lui. Aujourd'hui réfugié aux États-Unis, il est devenu l’un des champions de la Chine dépossédée. M. Zhao a décidé de se consacrer à des enquêtes sur les vols de terres en Chine et éduque les paysans chinois sur la façon de se battre contre la rapacité des fonctionnaires.

 

D’abord critique d'art, puis policier – il a été expulsé de la police en 1987 lors de la campagne de libéralisation «anti-bourgeoise» – l’homme a commencé à s'intéresser aux droits des agriculteurs en 1997. À l’époque, pour avoir révélé les vols de terres appartenant aux agriculteurs, un de ses amis journalistes, Sheng Xueyou, avait été emprisonné par le secrétaire du parti de Harbin à la suite d’un «procès-spectacle». C’est alors que M. Zhao est venu à son aide.

 

«J'ai dû étudier le droit par moi-même pour l'aider. J'ai travaillé sur cette affaire pendant plus d'un an», explique-t-il. C’est grâce à cette expérience que Zhao Yan a appris ce qu’endurent les Chinois des zones rurales et c’est ce qui a ensuite impacté sa carrière. «Cette expérience a changé ma vie», résume-t’il. Dès lors, il est devenu journaliste et militant.

 

En 2002, sa position de journaliste a été officialisée par un poste au magazine La Réforme, en Chine, journal publié par la Commission de la Réforme et du Développement national, un département du Conseil d'État.

 

«Ils faisaient tous des recherches, mais leurs compétences journalistiques n’étaient pas très élevées. J’ai réalisé des enquêtes plus approfondies pour eux, y compris sur la question de l'accaparement des terres», se souvient-il.

 

Son travail d’enquête au nom des marginalisés de la société chinoise a attiré l'attention du New York Times. «Il n'y avait presque personne dans les médias chinois se concentrant sur la situation des minorités à cette époque», se rappelle M. Zhao.

 

Joseph Kahn, alors chef du bureau du New York Times de Pékin, le prend dans son équipe comme enquêteur lorsque Zhao Yan démissionne de La Réforme, début 2004. La principale mission de Zhao était de réaliser les travaux préliminaires de recherche que M. Kahn ou d'autres pouvaient reprendre, vérifier et utiliser comme base pour rédiger des articles.

 

Il a également mis à profit son réseau de contacts le tenant au fait des rumeurs sur les rivalités à l’intérieur du parti. Une note manuscrite diffusée sur ce sujet lui a valu trois ans de prison, de 2004 à 2007, pour «divulgation de secrets d'État».

 

La peine d'emprisonnement était en réalité une punition de Hu Jintao, pour ses articles précédents, pense M. Zhao. La «divulgation de secrets d’État» n’a été qu’un prétexte.

 

Selon Zhao, le journalisme a toujours soutenu les activistes pour aider les agriculteurs à résister aux saisies forcées de terrains. «En tant que journaliste, je ne peux pas le faire, mais en tant qu'intellectuel avec une conscience, ayant des idées sur la façon de répondre à ce problème si je ne le leur dis pas, qui le fera ?»

 

Il a appris à profiter des failles de la législation pour aider les agriculteurs à résister aux responsables abusant de leur pouvoir, par exemple en leur apprenant comment faire accuser les représentants du peuple, membres du Congrès national du Peuple.

 

«Cela rend le Parti très nerveux, et même furieux», explique-t-il. «Je ne peux pas les dénoncer moi-même, mais nous rassemblons des signatures et les soumettons aux autorités pour les faire accuser. C'est conforme à la loi». Trente personnes vivant dans le district d’un «représentant du peuple» peuvent ainsi signer une déclaration demandant la révocation d’une de ses décisions.

 

«J'utilise la loi pour dénoncer et faire accuser ces responsables corrompus qui prennent les terres des agriculteurs», ajoute-t-il. «Ce n'est pas une incitation à la rébellion.»

 

À côté de ce travail, il écrit et publie pour des revues chinoises, ce qui lui permet de dénoncer la corruption sous des noms d'emprunt. Selon Zhao Yan, les vols des terres des agriculteurs sont les actes les plus destructeurs, les plus déstabilisants actuellement exercés sous le régime du Parti communiste.

Ces saisies de terrains sont la principale cause de centaines de milliers d'«incidents de masse» et des manifestations qui ont été rapportées ces dernières années. Les fermiers voient leurs terres confisquées en ne recevant que peu ou parfois pas de compensation. Classiquement, les responsables régionaux embauchent des équipes de démolition et des hommes de main armés qui ne reculent devant aucune violence pour accélérer le processus des expulsions.

 

Ces violences ont déclenché des campagnes de pétitions et des manifestations partout en Chine. Dans les cas les plus extrêmes, des paysans se sont immolés par le feu ou ont posé des bombes artisanales devant les locaux des gouvernements régionaux.

 

«Prendre leurs terres, c'est prendre leurs revenus et leur seul moyen de survie», explique Zhao Yan. «Donc ils se battent avec leur vie».

 

Les soulèvements paysans ont précipité la chute des dynasties impériales chinoises depuis des siècles. Pour Zhao Yan, le Parti communiste chinois risque de subir le même sort aux mains des masses. Il fait référence à un dicton chinois de l’époque impériale : «L'eau peut porter les bateaux, elle peut aussi les couler.»