Mars et Avril

Impression vive et fugitive

Écrit par Mathieu Côté-Desjardins, Epoch Times
09.10.2012
  • Robert Lepage est Eugène Spaak, un savant extravagant à la tête holographique dans le film Mars et Avril. À gauche, Jacques Languirand sous les traits de Jacob Obus. (Alliance Vivafilm)

Ayant travaillé pendant trois années comme directeur artistique au sein de l'agence Sid Lee, en particulier pour le Cirque du Soleil, Martin Villeneuve lance son premier long métrage en tant que scénariste, réalisateur et producteur.

Mars et Avril met en vedette Jacques Languirand, Caroline Dhavernas, Robert Lepage et Paul Ahmarani. Le film de science-fiction a été présenté en première mondiale au prestigieux festival international du film de Karlovy Vary (République tchèque) le 2 juillet dernier ainsi que dans le cadre de l’ouverture de la section Focus du Festival du nouveau cinéma (FNC), il y a quelques jours (11 octobre), au cinéma Impérial de Montréal. Bien que Mars et Avril ruissèle de beau et d'exploits, il n'arrive pas à balancer force visuelle et durée émotionnelle, qualités que l'on peut attribuer aux classiques de science-fiction.

La musique de Jacob Obus (Jacques Languirand) demeure un incontournable dans le domaine. Il ne serait pas considéré comme une légende sans l'aide de ses amis Arthur (Paul Ahmarani), celui qui dessine les instruments aux formes féminines, et Eugène Spaak (Robert Lepage), celui qui les concrétise. Leur univers connaît quelques turbulences alors qu'une photographe nommée Avril (Caroline Dhavernas) s'approche de plus en plus d'eux. En plein centre d'un Montréal du futur, on suit l'Homme qui s'apprête à marcher sur la planète Mars, mais aussi la vie de chacun des personnages qui se prépare à prendre un important tournant.

Au lieu de parler de Mars et Avril comme s'il possédait un scénario béton, il serait plus approprié de faire référence à une enfilade poétique de scènes, à l'occasion sans trop de cohésion et un moyen de justifier de la science-fiction qui demeure un peu trop souvent esthétique. C'est à se demander si Villeneuve a sacrifié une grande part du dialogue (écrit avec une plume brillante) de ses deux photoromans éponymes ou si ces derniers (publiés par Sid Lee et la Pastèque) reposaient volontairement sur un flou inventif, vaporeux et énigmatique. Villeneuve propose à ses personnages un français international de type théâtral particulièrement accrocheur. Certains feront le lien entre le film Mars et Avril et Mr. Nobody, qui nageait dans les mêmes eaux troublées. Évanescent, Mars et Avril s'est doté d'une distribution plastique, mais fiable et éprouvée, tout en étant de seconde importance.

Jacques Languirand (L'Odyssée d'Alice Tremblay, J'en suis) était plus sculptural que saisissant dans son rôle de Jacob Obus. C'est un peu le même sort qui est réservé, autant à Caroline Dhavernas (De père en flic, Cry of the Owl) que pour Robert Lepage (La face cachée de la lune, La belle empoisonneuse). La perruque de l'acteur Paul Ahmarani (Congorama, Le Marais, La vie avec mon père), même étant dans un Montréal futuriste, dépare au charme du film, un peu comme celle de Patrice Robitaille dans Cheech. Était-ce une des suggestions de l'acteur et conseiller artistique Robert Lepage? Outre sa tête en bataille, Ahmarani offrait une performance basique, conforme à la norme Mars et Avril.

La vision futuriste de Montréal ne peut que valoir de bonnes critiques. La tête de Robert Lepage figure à la liste des effets bien réussis. Villeneuve offre malheureusement peu de «temps-belvédère» pour apprécier tout le travail investi dans son projet.

  • Dans Mars et Avril, Caroline Dhavernas interprète Avril, une photographe scrutatrice et séduisante. (Alliance Vivafilm)

Le film bénéficie de la collaboration du bédéiste belge François Schuiten, célèbre pour sa série-culte Les Cités obscures publiée chez Casterman, qui signe la conception visuelle. Majoritairement tourné sur écran vert, Mars et Avril comporte pas moins de 550 plans d’effets visuels d’un calibre impressionnant, réalisés par la société montréalaise Vision Globale.

Ce film-évènement assure au Québec une place au temple des créateurs de films de science-fiction à l'international. Mars et Avril compte à bord François Schuiten, concepteur visuel, entre autres, du film The Golden Compass (de Chris Weitz en 2007) et plus récemment, Mr. Nobody de Jaco Van Dormael (2009). Il ne faut pas oublier la participation de Carlos Monzon, superviseur d'effets visuels qui a touché aux films Avatar, Transformers, Transformers: Rise of the Fallen, Star Trek, Indiana Jones and the Kingdom of the Crystal Skull, Pirates of the Caribbean et Wall-E. Pour ennoblir cette équipe impériale se fond une trame sonore du compositeur Benoît Charest, en nomination aux Oscars en 2004 pour Les Triplettes de Belleville et le soutien du Cirque du Soleil qui a financé la création des instruments de musique, nécessaires au tournage.