Baccarat, l’histoire d’une rencontre entre l’homme et les éléments

Écrit par Edwige Ansah, Epoch Times
28.10.2012
  • Les verres en cristal de Baccarat mettent en valeur la robe du vin. (Baccarat)

Le cristal de Baccarat est synonyme de luxe à la française, mais aussi de passion. Passion des hommes qui consacrent des heures de travail à cet art séculaire pour donner naissance à une pièce unique. Mais aussi passion des grands de ce monde qui, de l’Europe à la Russie, de l’Inde au Japon jusqu’aux Amériques, ont aimé ou aiment encore ces pièces, toutes uniques, qui mettent en avant ce cristal brillant comme un diamant.

Mais d’où provient ce cristal si particulier qui, depuis l’Exposition Universelle de Paris en 1855, a su rayonner à travers le monde et rayonne encore aujourd’hui, tant au niveau des arts de la table, avec ses célèbres verres, chandeliers, ou  vases et ses flacons de parfum dont le dernier accompagne la fragrance d’un célèbre parfum signé Dior, qu’au niveau du monde des arts en général qui voit des designers, comme Philippe Starck, associer leur nom pour porter encore plus haut une créativité sans cesse réinventée.

Petite histoire du cristal

Dès la fin du XVe siècle en Allemagne était produit dans la région de la Bohême un verre plus résistant qui tirait son origine du verre vénitien. Mais c’est surtout en Angleterre, dès le XVIIe siècle, que les verriers, en utilisant le charbon à la place du bois pour chauffer les fours, obtiennent en introduisant de l’oxyde de plomb, un verre d’une brillance et d’un éclat tout particulier qui émet un son reconnaissable entre tous.

En France, il est admis que les verreries existent depuis l’époque gallo-romaine. La région des Vosges semble être un lieu de prédilection pour ces ateliers. Cette région a toujours été riche en matières premières indispensables à la fabrication du verre, comme le bois, le sable, les fougères et l’eau. On pouvait voir des petites huttes installées à la lisière des forêts et les verriers se déplacer en fonction de leurs besoins.

La petite histoire nous apprend qu’une requête fut présentée par l’évêque de Metz, Monseigneur de Montmorency de Laval (1761-1802), à Louis XV dans laquelle il était mis en avant le manque de verreries en France et l’obligation faite à la France d’acheter du verre de Bohême : d’où une fuite importante des deniers, alors que le pays en avait bien besoin. Cette requête est agréée par le roi le 16 octobre 1764 et la verrerie de Sainte-Anne est installée par Antoine Renaut. La Compagnie des cristalleries de Baccarat produit à cette époque essentiellement des carreaux à vitres et des services de verres. La Révolution française voit le déclin de la production de cristal et en 1806, c’est la faillite.

Il faudra attendre 1816 pour que la verrerie renaisse de ses cendres avec son rachat par Aimé-Gabriel d’Artigues (1773-1848). C’est à cette période que le premier four à cristal fait son apparition dans la fabrique. Suite à l’autorisation du roi Louis XVIII, quatre fours verront le jour et permettront la fabrication du cristal au plomb. La verrerie de Sainte-Anne prend le nom d’Établissement de Vonêche à Baccarat. La première commande sera faite par le roi Louis XVIII et par la suite, les rois Charles X et Louis-Philippe maintiendront cette tradition de la commande royale qui s’étendra aux maharadjas, à la Cour impériale de Russie ou du Japon ou encore à l’Empire ottoman.

Cette époque marque la vraie ascension des cristalleries de Baccarat. Les grandes Expositions universelles permettront à sa renommée de s’établir et elle obtiendra une médaille d’or à l’Exposition universelle de Paris en 1855. En 1860, elle signe sa marque sur toutes ses pièces.

La métamorphose des éléments

Le cristal de Baccarat est composé de silice qui est un sable d’une grande finesse, d’oxyde de plomb qui contribue à la luminosité et à la sonorité du verre, de carbonate de potassium ou potasse qui apporte son brillant au cristal et du groisil obtenu de la casse des pièces de cristal refusées. Cet élément refondu « favorise la fusion du cristal ». Par ailleurs, la manufacture de Baccarat utilise divers produits qui, comme pour les maîtres verriers d’autrefois, constituent encore un secret bien gardé. Mais éléments importants, toutes les matières font l’objet d’une sélection plus que rigoureuse garante de la pureté du produit fini.

Toute la magie du cristal se situe à 1.450 °C, température à laquelle les divers éléments passent de l’état solide à l’état liquide. Ainsi ce qui se produit dans les profondeurs du four repose sur la longue expérience de maîtres verriers qui, tels des alchimistes, ont su dompter le sable, le plomb, le bois, l’air et le feu pour arriver à une telle union.

Ensuite entrent en action la main et le souffle de l’homme. Ouvrier de la perfection, souvent meilleur ouvrier de France, l’artisan va travailler cet élément liquéfié, à chaud à 850 °C. Quand on le regarde œuvrer, la première impression est la tranquillité, ce mélange de force et de détente qui émane de sa personne. Cet artisan utilise un savoir ancestral que les meilleurs ont su lui transmettre et qui aboutit à un savoir-faire et à une créativité semblant aller de soi. Il manie avec dextérité divers outils dont les castagnettes. Il procède à la taille, au matage ou satinage, ou à la gravure pour produire une pièce de toute beauté.

Jonglant avec le feu, l’air, le bois et l’eau, il façonne son objet d’art. La patience, la précision, la concentration mais surtout la maîtrise de tous les muscles de son corps permettent, qu’au moment présent, au cours de cet instant suspendu dans le temps, se joue un ballet minutieux où les gestes ancestraux se répètent pour produire cet objet unique. Chaque pièce nécessite des heures de travail.

Cette harmonie est saluée par l’architecte designer Ettore Sottsass Jr. qui a dessiné une collection pour Baccarat en 2002. Il compare le labeur de ces artisans de la perfection à «un combat religieux pour sauver leur vie, la dignité de leur vie même, tel un moment héroïque de leur propre vie».

Baccarat aujourd’hui

Aujourd’hui, Baccarat est toujours et encore synonyme de luxe, mais aussi de «perfection, de beauté et de lumière». Sa richesse repose sur les hommes. Cet atelier du luxe peut se réjouir de compter parmi son personnel les vingt-cinq meilleurs ouvriers de France: un record national pour une maison consacrée au luxe.

L’esprit social développé dès la fin du XIXe siècle continue de régner dans cette entreprise où la prévention du risque du saturnisme reste une préoccupation de tous les instants. Par ailleurs, les 715 salariés de l’entreprise sont toujours fiers d’appartenir à cette manufacture et à l’élite de la cristallerie.

La société du Louvre en est l’actionnaire majoritaire, mais depuis peu, le fonds d’investissement Catterton Partners, détenteur de 22% du capital, est devenu l’un des partenaires avec lequel l’entreprise doit compter, car il est de fait le deuxième actionnaire de Baccarat.

Des projets, dont un budget de plus de huit millions d’euros, devraient permettre au groupe tout d’abord de rassurer ses salariés, de répondre aux demandes qui sont actuellement en hausse, mais surtout de développer une politique vers de nouveaux marchés économiques à l’international.

Ces informations rassurantes ne pourront que combler ceux et celles pour qui, vivre en Baccarat reste la seule manière d’envisager «une certaine idée du bonheur et de la perfection… Un dialogue intense avec des objets qui ont une âme»

Pour en savoir plus:

Office du tourisme de Baccarat

Brochure Baccarat Lumière et création

Article «Baccarat investit en Lorraine pour répondre à la demande» paru le 30/09/12 sur lefigaro.fr économie