La participation obligatoire: comment le communisme a changé la Chine

La participation obligatoire: une étude sur «La participation politique dans la Chine communiste», par James Townsend

Écrit par Matthew Robertson, Epoch Times
03.10.2012
  • La couverture de u00abPolitical Participation in Communist China» (La participation politique dans la Chine communiste)» de James Townsend (University of California Press)

Townsend, James. «Political Participation in Communist China» 1967, University of California Press, 247 pp., 49.95 dollars, ISBN: 978-0520012790.

Un regard en arrière sur les études et les reportages sur la Chine communiste de l’époque antérieure peut fournir une base pour des réflexions sur notre époque actuelle: sur ce qui a changé, ce qui n’a pas changé et comment les gens faisaient passer leurs idées.

L’étude de James Townsend est très profonde et fascinante non seulement en raison de son ampleur et ses détails, mais aussi pour la réflexion presque personnelle, au cours de laquelle l’auteur répond à ses propres questions.

En abordant un sujet dont beaucoup d’observateurs modernes tireraient avantage à apprendre une ou deux choses – les changements que le communisme chinois a apporté à l’ordre politique en Chine – James Townsend remet tout d’abord en question cet ordre. Pour le profane sur les questions de la Chine traditionnelle, il y a beaucoup de choses à apprendre même dans ce sommaire.

Par exemple, il s’avère que de nombreux aspects de la société contre lesquels les radicaux et les intellectuels de la fin du 19ème et du début du 20ème siècle se sont révoltés (y compris le communisme dont les propagandistes du Comintern ont réussi à semer largement les graines) n’étaient pas des éléments valables de la culture traditionnelle chinoise. Les choses avaient déjà changé.

 «…l’achat de bureaux pour le gouvernement, la concentration de la propriété foncière, la puissance des militaires et des bandits dans les régions rurales, l’incompétence du gouvernement central et surtout les effets diffus de la présence occidentale elle-même – étaient des symptômes de changement plutôt que des caractéristiques de l’ordre traditionnel. Dans ce sens, le communisme chinois est une révolte contre le traditionnel en mutation plutôt que la tradition comprise correctement.» (p.6)

 (Bien qu’ évidemment, il faudra plus que cela pour arrêter les observateurs incompétents de la Chine nouvelle  à parler de la tradition politique persistante – faisant même  un  lien entre  la tradition confucéenne et les lois féodales d’un coté  et les règlements  du PCC de l’autre. Hélas!)

Le livre de James Townsend est une chronique non seulement des changements que le Parti communiste chinois a apporté, mais il décrit également la manière dont il les a imposés: avec quel degré de succès, face à quelle résistance et les moyens qui permettent de l’évaluer.

Les lecteurs peuvent également avoir leur propres compréhensions des choses que James Townsend passent sous silence.

Par exemple, concernant la Chine traditionnelle nous apprenons que «La légitimité du ‘mandat’ de diriger de l’empereur en théorie se basait sur sa conduite droite, qui se manifestait dans sa capacité à maintenir l’harmonie dans la nature et la société.»

Tandis que la force militaire était nécessaire pour s’emparer du pouvoir, «La tradition chinoise insistait sur la vertu et la moralité comme point déterminant la légitimité de l’autorité politique». Puisque l’autorité de l’empereur se basait sur la moralité, «sa manière de gouverner le peuple devait être un exemple de moralité» (p.11). Comme c’est merveilleux. Faut-il de même parler du contraste entre ceci et le fonctionnement actuel?

Ce n’est pas qu’en mesurant t la gouvernance du PCC sur la toile de fond traditionnelle que l’on peut voir que celle-ci est déformée, mais aussi par les principes de base de la logique, comme le montre James Townsend. Il explique par exemple pourquoi le sens politique des actions doit être déterminé non seulement par la nature des actions elles-mêmes, mais par la motivations des acteurs.

Comme le montre Harold Laswell, lorsqu’un homme tue un roi parce que le monarque a insulté sa sœur, il a commis un crime de passion et non pas un acte politique. Mais s’il pense au meurtre dans le cadre de la lutte révolutionnaire, alors là il s’agit de politique.

Le parti, cependant, ne pense pas à ce genre de nuances. «C’est une tentative du PCC d’attacher un sens réel aux rituels politiques et de donner aux actions ‘privées’ des significations politiques qui explique la politisation extraordinaire de la vie dans la Chine contemporaine», écrit James Townsend.

Ceci explique pourquoi le développement du Falun Gong en Chine a été interprété par le régime comme une menace mortelle: non pas parce que les gens qui méditent en silence donnaient un sens politique à leur pratique, mais parce que pour le PCC, former son propre groupe et réaliser ses  propres affaires à une grande échelle est déjà problématique. C’est la même chose pour la reconnaissance du Dalaï Lama par les Tibétains, ce que le Parti tente sans cesse d’enlever de leurs têtes par un lavage de cerveaux.

Voici quelques réflexions encore plus intéressantes:

-Les associations familiales et locales étaient le fondement de la société traditionnelle chinoise: «le citoyen chinois trouvait son identité sociale, sa sécurité et ses espoirs d’avancement dans ses associations locales et non dans une la communauté politique plus large». Les associations locales telles que la famille, le village, la confrérie étaient souvent une fin en soi. La vie des Chinois consistait à se préoccuper de ses propres affaires et intérêts et les gens étaient en grande partie indifférents aux autres choses. Cet individualisme mettait la famille au centre de la loyauté de l’individu et le sens de la vie se trouvait dans sa propre communauté. (P.17-20)

-Pendant la guerre civile, lorsque le PCC a réalisé que les paysans n’étaient pas tellement intéressés par la doctrine marxiste, il a joué la carte anti-japonaise et nationaliste et a simplement mis de côté la doctrine (bien sûr, uniquement pour la ressortir plus tard avec plus de vigueur). Est-ce que tout le monde le sait? Est-ce que cela vous  semble familier? (p.53)

-La loyauté des érudits était davantage tournée vers la culture chinoise que vers un État chinois particulier. Bien qu’un érudit reconnaissait son obligation à servir la société, il ne croyait pas que la fonction publique était la plus haute forme de service. Personnellement, ses plus grandes récompenses se trouvaient à l’extérieur de la vie publique, «dans les activités intellectuelles pour lesquelles ses études l’avaient préparées» (p.12). Ceci est souvent à l’opposé des préoccupations des apparatchiks contemporains du Parti, pour qui le service en tant que fonctionnaire ne représente rien de plus qu’un moyen de se glorifier et d’accumuler sa propre richesse (on pourrait parfois aussi se demander combien cela diffère des fonctionnaires en Occident).

-Le fait que quelque chose en Chine ne constitue pas officiellement une partie de l’État ne signifie pas qu’il ne s’agit pas de politique ou que le Parti ne le contrôle pas (p.103). On devrait s’en rappeler  quand on pense aux entreprises chinoises qui font des affaires à l’étranger.

«Le formalisme» est un mot amusant utilisé par le PCC pour décrire la paresse des cadres. (p.151)

James Townsend explique parfaitement de quelle manière les organisations de masse dévorent  les gens, et servent les intérêts du Parti à l’étranger et en Chine. (P.172-173)

Une autre observation, trouvée à la page 158: tandis que les organisations de masse comme la Ligue de la jeunesse communiste et la Fédération des femmes couvrent largement la société, et sont des relais de transmission très efficaces pour endoctriner les masses avec la politique du Parti, le PCC n’était pas en mesure de toucher les coins et les recoins – les coins étant les femmes au foyer et les enfants, les recoins étant les colporteurs et les chômeurs – alors les Comités de résidents ont été mis en place.

C’est le niveau le plus détaillé de l’organisation du PCC, touchant directement le voisinage de chaque citoyen. Dans les années 1950, ils ont été utilisés pour aider dans les campagnes telles que «Résister à l’Amérique –Aider la Corée» et la «Répression des contre-révolutionnaires».

Maintenant, ces comités sont utilisés de façon efficace pour repérer les pratiquants de Falun Gong et les remettre à la police pour «transformer leur pensée». Qui a dit que plus les choses changent, plus elles sont pareilles?

Version anglaise: Participation Required: How Communism Changed China