Décontracté comme s'il passait une entrevue de routine, Luc Leclerc, ingénieur de la Ville de Montréal retraité depuis 2009, continuait à répondre à son interrogatoire devant la Commission Charbonneau lors de cette dernière journée précédant une pause d’une semaine. À travers un lot de révélations, maintes références ont été faites sur son service «cinq étoiles» destiné aux entrepreneurs.

Avant sa retraite, M. Leclerc était responsable de la surveillance des travaux d’asphaltage et d’égouts pour la Ville de Montréal. Bien apprécié dans le domaine de la construction, notamment pour son côté sympathique, il avait de quoi pour satisfaire bien des entrepreneurs. Questionné par la méticuleuse Me Sonia Lebel, l’ex-fonctionnaire a dû élaborer sur les raisons qui expliquaient la grande confiance qu’avaient les entrepreneurs à son égard.

Selon ses propres dires, c'était la vitesse élevée avec laquelle les contrats étaient exécutés qui le distinguait. «Ce n'est pas pour rien que je faisais plus de contrats que mes confrères», raconte-t-il. En tirant les ficelles pour faciliter les travaux (en activant rapidement le règlement de facture à la Ville, en aménageant adéquatement les chantiers, etc.), chaque contrat se bouclait plus tôt que prévu, ce qui donnait la possibilité à M. Leclerc et à l'entrepreneur de mettre l'argent inutilisé dans leurs poches. En outre, l'augmentation de la valeur réelle des travaux constituait une autre partie de ses «petits extras».

Il ne se souvient pas avoir touché plus de 25 000 $ de profit illégal par contrat octroyé. Durant ses 15 dernières années à la Ville, M. Leclerc croit avoir amassé près de 500 000 $, somme qu'il a qualifiée de cadeau empoisonné. «On va vous donner 500 000 $, puis essayez de le dépenser sans vous faire remarquer, vous allez voir que c'est plus difficile qu'on peut penser», déclare-t-il. 

Dans les derniers jours, il a rendu la somme de 90 000 $ à la Commission, en spécifiant qu'il souhaiterait qu’elle puisse retourner à la Ville de Montréal.