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Déboires et espoirs pour l’immigration en Europe

Écrit par David Vives, Epoch Times
02.11.2012
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  • Le ministre de l’Intérieur Manuel Valls fait un discours dans le cadre d’une cérémonie de naturalisation le 18 octobre 2012, à Toulouse. Valls a assoupli les critères d’acquisition de la nationalité française dans une circulaire qui permet aux employés ayant des contrats temporaires et aux diplômés de l’enseignement supérieur d’avoir accès à la procédure de naturalisation. (AFP PHOTO/Eric Cabanis)

Un pas en avant, un pas en arrière… c’est ainsi que l’on pourrait décrire la politique européenne de l’immigration. À ce propos, Claire Rodier, juriste au Gisti, le Groupe d’information et de soutien des immigrés, déclarait récemment dans Libération: «Chaque nouveau dispositif de contrôle [semble] n’avoir pour utilité que de révéler les failles et les lacunes des précédents, et pour finalité de justifier les suivants»…

Effectivement, vus à la loupe, les détails des politiques au niveau français et européen recèlent bien des surprises. Le traitement de certaines questions concrètes ramène à penser que le sujet de l’immigration est une patate chaude. La bonne volonté de certains décideurs politiques est bien réelle, encore faut-il dépasser les situations dues à des maladresses et à des clichés.

L’Europe et les fausses bonnes idées

Le message envoyé par l’Europe n’est pas toujours celui qu’elle reflète dans les actes. Par exemple, lors du printemps arabe, on applaudissait des deux mains ces peuples ayant eu le courage de renverser les dictateurs et d’instaurer la démocratie. Pourtant, la commissaire européenne aux Affaires intérieures, Cécilia Malmström, indique dans une interview donnée au Monde: «Qu’avons-nous dit à des gens qui s’inspiraient de nos valeurs? que nous étions en crise et que nous avions peur de «vagues bibliques» d’immigrés... Notez que 4% seulement de ceux qui ont fui la Libye se sont dirigés vers l’Europe!»

Le contrôle des flux migratoires regroupe plusieurs réalités complexes. Par exemple, la gestion des frontières. Celle-ci est reportée sur des pays limitrophes (Maghreb, Europe de l’Est), qui sont priés de se charger des questions de déportations et de détentions, enlevant une douloureuse épine du pied européen. De même, la question de savoir qui accueille qui et où, lors d’arrestations de bateaux clandestins, est parfois un labyrinthe pour les gouvernements.

Un autre exemple frappant porte sur les futurs projets présentés pour renforcer la surveillance aux frontières. Le premier est baptisé Eurosur. Il s’agit d’établir une surveillance permanente, notamment à l’aide de drones, et de la création d’un centre «qui coordonne l’ensemble des activités de surveillance des frontières menées par la police, les douanes et la marine», selon Erik Berglund, directeur chargé du renforcement des capacités au sein de Frontex, l’agence européenne qui gère la coopération opérationnelle aux frontières extérieures.

Cependant, en y regardant de plus près, il s’avère que personne sinon Frontex ne s’est penché sur les détails techniques et la mise en pratique de ce projet, qui devrait pourtant débuter dans un an. Le coût de 340 millions d’euros, initialement prévu, pourrait être facilement multiplié par trois, d’après les analyses de Mathias Vermeulen, spécialiste de l’Institut universitaire européen de Florence.

Un autre projet, les «frontières intelligentes», un système d’entrée et sortie enregistrant les migrants, pouvant par la suite déterminer ceux qui restent dans l’illégalité. Seulement voilà, cela diminue l’utilité des patrouilles déjà en place et pose un certain nombre de questions logistiques : en cas de décès, de soins hospitaliers, que faire?.

 

Un tel système est déjà en place aux États-Unis, il a coûté 1,5 milliard de dollars et a permis l’arrestation de 1.300 clandestins, soit un million de dollar par clandestin.

L’évolution de la technologie laisse suggérer une approche différente de la question migratoire et les avancées sont synonymes de nouvelles possibilités. Mais dans les faits, le caractère novateur n’est pas forcément synonyme d’efficacité. L’idée de création d’un méga-système  de surveillance s’appuyant sur ces progrès n’est pas attrayante financièrement et ne s’encombre pas outre mesure des droits humains et du respect des personnes.

Un passé lourd à digérer

Les restrictions et mesures de régularisation des sans-papiers se succèdent dans notre pays, mais à en juger par la récurrence du thème de l’immigration, certaines difficultés demeurent depuis les années 80. L’immigration n’est pas un problème en soi, mais la précarité, le chômage, ainsi que les difficultés d’intégration sont de lourds fardeaux pour cette partie de la population.

Plusieurs forces sont en jeu. Les immigrants eux-mêmes, ainsi que les associations comme la Cimade, SOS Rascisme, n’ont de cesse de dénoncer la situation de «ghettoïsation», la discrimination à l’emploi, ainsi que les mauvaises conditions de vie des populations immigrées. La deuxième force? les politiques qui tirent parti de cette question, en faisant de l’immigration elle-même un problème qui devient dès lors un enjeu électoral. La troisième force est constituée des politiques en place, qui décident bien souvent de mesures d’appoint, comme le durcissement des conditions d’accès, ou une régularisation partielle.

Depuis 2007, l’idée d’ «immigration sélective» a fait son chemin. Le Gouvernement décide de critères, comme la maîtrise de la langue française. À ce sujet, François Hollande n’a pas touché aux critères de maîtrise de la langue exigés par la réforme de 2007. Au discours de Dakar, il a réitéré la valeur des échanges culturels et a souhaité renforcer l’accès au travail, notamment par la délivrance des permis de travail.

Changer les mentalités, le premier pas

En France, la politique du gouvernement sur l’immigration n’est pas passée inaperçue. Le démantèlement du camp de Roms à Lille, ainsi que les nombreux autres qui ont suivi, renvoient aux Français une image familière du traitement de la question. Cependant, la rupture initiée par le nouveau gouvernement est évidente, malgré le manque de concertation dénoncé par certaines associations, dont France Terre d’Asile.

François Hollande, dans son discours à Dakar le 12 octobre, a précisé son plan pour l’immigration: «Je souhaite que les procédures administratives soient simplifiées pour les étudiants, dès lors qu’ils sont motivés, talentueux, capables de subvenir à leurs besoins, mais aussi pour les artistes et les créateurs.»

Manuel Valls a récemment annoncé sa volonté de rouvrir l’accès à la nationalité française, déclarant à ce sujet: «C’est le moteur du sentiment d’appartenance à notre nation», justifiant ainsi le changement de cap. La voie de la naturalisation avait effectivement été durcie lors du passage de Claude Guéant, entre 2010 et 2011. Manuel Valls a donc assoupli certains critères qui motivaient dans le passé des refus systématiques de nationalisation de catégories sociales pourtant assimilables : jeunes nés à l’étranger résidant en France, seniors parlant mal le français, étudiants étrangers…  tout en gardant l’exigence d’un «niveau de troisième» pour la maîtrise du français.

Un rapport récent de l’institut national d’études démographiques jette une nouvelle base, brisant cinq clichés concernant l’immigration: «Non, l’immigration n’est pas massive, elle n’est pas majoritairement clandestine, elle n’est ni prolifique ni misérable, et pas davantage insaisissable. Elle reste encore largement à découvrir.»

L’idée qu’accueillir l’immigration revient à accueillir la «misère du monde» est largement démontée. Le rapport précise que les migrants sont généralement au-dessus de la moyenne, dans l’échelle sociale de leur pays. «Dans l’ensemble, les migrants représentent par rapport aux non-migrants de la société d’origine une population sélectionnée: en meilleure santé, plus instruite, plus entreprenante, dotée d’un minimum de ressources pour payer le voyage et les frais d’installation», précise-t-il.

L’immigration, «facteur de croissance»

Ce point a souvent été un défouloir pour certains de nos hommes politiques en recherche d’électeurs, ou pour justifier certaines mesures. L’effet est global en Europe, et des questions comme l’islamisme radical ajoutent souvent à la confusion qui, dans un débat, commence à peine à s’éclaircir.

Si certains clichés construisent des murs, d’autres réalités ouvrent une vision différente. Cécilia Malmström rappelle que l’immigration sera un «facteur de croissance» nécessaire, «étant donné l’évolution de la démographie dans la plupart de nos pays. On estime qu’en 2030, sans nouvelle immigration, la population européenne en âge de travailler aura diminué de 12% dans les pays européens».

La commissaire européenne aux Affaires intérieures souligne également le besoin d’intégration et de formation des populations immigrées, souvent victimes d’une «ghettoïsation» dans les grandes villes. L’idée de tirer vers le haut ces populations pourrait également «faciliter une nouvelle immigration légale  – ce qui est d’ailleurs aussi une manière de lutter contre l’immigration illégale».

Le rapport pointe également un besoin de «contrôle raisonnable des flux, luttes contre les discriminations et travail d’intégration réciproque». Dans le dossier de l’immigration, la reconnaissance de ces réalités semble être une avancée optimiste. Peut-être l’opportunité de créer un nouvel équilibre, basé sur la situation actuelle.

Plus de 204 718 434 personnes ont démissionné du PCC et de ses organisations.