Photowatt sauvé par la campagne électorale

Écrit par Charles Callewaert, The Epoch Times
16.02.2012

  • Une technicienne chez Photowatt, fabriquant français des panneaux photovoltaïques, à Bourgoin-Jaillieu. (Staff: JEAN-PHILIPPE KSIAZEK / 2012 AFP)

Après le sauvetage de Lejaby, l’un des derniers fabricants nationaux de lingerie, par un fournisseur de LVMH, voici celui d’un autre fleuron industriel français, Photowatt, sauvé in extremis par EDF-ENR (Energies Nouvelles Réparties), une filiale d’EDF ! Dans son offre, EDF s’engage à reprendre 345 salariés au sein de Photowatt et à reclasser les 85 autres en interne, selon une source proche de l’administrateur judiciaire.

À l’annonce de la nouvelle ce vendredi soir, le maire de Bourgoin-Jallieu, Alain Cottalorda, s’est félicité: «C’est une bonne nouvelle, c’est évident», a-t-il annoncé, tout en ajoutant: «Je me réjouis que le gouvernement ait pris conscience des enjeux, un peu tard quand même, et ait fait ce qu'il fallait pour éviter l'irrémédiable».

Le pionnier français de l’électricité photovoltaïque

Il faut en effet se rappeler que Photowatt n’est autre que le pionnier français de l’électricité photovoltaïque et le seul fabricant à maîtriser l’intégralité du process, depuis les cellules de silicium jusqu’à la mise en œuvre des panneaux. Créée en 1979 peu après le premier choc pétrolier, dans un contexte national résolument pro-nucléaire et très défavorable à l’énergie solaire, l’entreprise avait toujours cru en l’avenir du solaire photovoltaïque et su développer un savoir-faire unique en France. L’arrivée en 1997 d’un actionnaire canadien, ATS, lui permet de développer sa capacité de production et d’accroître ses parts de marché au début des années 2000, jusqu’à devenir un moment le cinquième fabricant mondial. Reconnue à l’étranger pour ses panneaux haut de gamme et la qualité de sa recherche, Photowatt exporte la quasi totalité de sa production (70 Mégawatt) et réalise un chiffre d’affaires de 160 millions d’euros en 2010.

Victime de la concurrence chinoise et des incohérences gouvernementales

En 2007, grâce à la politique de soutien à l’électricité photovoltaïque via des tarifs de rachat élevés, le Grenelle de l’Environnement lui avait un temps permis de rêver à un avenir radieux dans le sillon des géants allemands et américains. Mais la volte-face gouvernementale de 2010 sur le photovoltaïque, qui s’est soldée par un gel des raccordements puis une baisse très importante des tarifs de rachat, a déstabilisé l’ensemble de la profession, au premier rang de laquelle se trouvait Photowatt. Parallèlement, le ralentissement des investissements occidentaux dans le photovoltaïque, provoqué par la crise économique, et la surcapacité de production qui s’en suivit, en particulier en Chine, a déclenché en 2011 une féroce guerre des prix dans le monde entier et provoqué de nombreux dépôts de bilan, dont celui de Photowatt le 7 novembre 2011.

L’offre d’EDF sur fond de candidature à la présidentielle

Deux autres offres qualifiées de «sérieuses» ont été déposées auprès de l’administrateur judiciaire, lequel tranchera en principe le 21 février prochain. L’une émane d’ECM, un fabricant de fours qui s’est engagé à reprendre 379 salariés, et l’autre d’un consortium industriel composé notamment de Solarezo, un assembleur lyonnais de modules photovoltaïques.

Cependant, comment ne pas reconnaître la manœuvre de Nicolas Sarkozy derrière l’offre d’EDF, dont le PDG Henri Proglio est un de ses proches. Le président n’en fait d’ailleurs pas un mystère, puisqu’il a profité de son déplacement à la centrale nucléaire de Fessenheim jeudi 9 février pour annoncer sa venue mardi 14 février chez Photowatt pour présenter aux salariés une «formule» de reprise industrielle «grâce à EDF».

  • Le système des panneaux photovoltaiques.(Stringer: AFP / 2012 AFP)

On ne peut que se réjouir pour les salariés de Photowatt qui voient ainsi leur avenir mieux assuré, mais comment ne pas rester dubitatif sur celui de l’énergie solaire en France. En effet, ce rachat est contradictoire avec les multiples déclarations de ces derniers mois sur la prolongation des centrales nucléaires existantes et le développement des EPR. Photowatt mérite un meilleur avenir que celui de verdir le rapport annuel du champion nucléaire français.