Les eaux souterraines en Afrique et l’alimentation des zones aquifères

Écrit par Héloïse Roc, The Epoch Times
16.05.2012

  • L’Afrique manque cruellement d’eau, pourtant de nombreux fleuves, rivières, lacs agrémentent le paysage du continent.(攝影: / 大紀元)

Le continent africain manque cruellement d’eau. Cependant, d’après une enquête géologique du groupe britannique British Geological Survey, les eaux souterraines du continent africain seraient conséquentes. Les résultats de cette étude ont été estimés à 0,66 million de km3 d’eau souterraine, selon les publications faites dans la revue Environment Research Letters. L’Afrique dormirait sur des réserves d’eau souterraine importantes, enfouies dans les profondeurs des terres, elles peuvent compter jusqu’à 100 fois la quantité d’eau disponible à la surface du continent. Dans cette étude, les zones aquifères africaines ont été cartographiées par les chercheurs du groupe britannique de géologie. Les quantités d’eau contenues dans les sols ont ainsi été repérées. L’étude indique également que les plus grandes réserves d’eaux souterraines du continent africain se trouveraient dans les zones les plus sèches, comme le Sahara. Elle montre également l’importance des grands aquifères sédimentaires d’Afrique du Nord, notamment en Lybie, en Algérie, en Egypte et au Soudan.

Selon l’ONU la disparité de l’eau entraînerait des inégalités économiques

Lors de la journée mondiale de l’eau, l’ONU dans son rapport annuel, mettait en relief les pressions sur l’eau disant qu’elles iront en s’exacerbant. L’ONU soulignait que la disparité de l’eau entraînerait des inégalités économiques entre les pays, mais aussi entre les différents secteurs et régions à l’intérieur des pays. Et cette évolution se fera au détriment des plus pauvres. Si l’eau ne tient pas une place plus importante dans les projets de développement, des milliards de personnes, notamment dans les pays en développement, pourraient être confrontées à une réduction de leurs moyens de subsistance et de leurs chances de réussite. Une meilleure gouvernance des ressources en eau est nécessaire, notamment des investissements des secteurs privés et publics dans les infrastructures.

L’importance de cette recherche sur les eaux souterraines

La recherche faite sur les eaux souterraines permet d’atténuer les effets négatifs du changement climatique en Afrique et ainsi, on devrait être à même de mettre cette préoccupation au centre des stratégies d’adaptation. Selon les chercheurs, les eaux souterraines réagissent plus lentement aux conditions météorologiques que l’eau de surface, elles représentent une variable d’ajustement importante face au changement climatique.

Bien que toutes les sources d’eau ne soient pas exploitables, l’étude qui vient d’être publiée montre que dans de nombreuses régions d’Afrique, l’eau souterraine est suffisamment importante pour alimenter en eau potable la population locale. L’alimentation locale se ferait grâce à des pompes manuelles avec un débit allant de 0,1 et 0,3 litre par seconde. Selon les données actuelles, les possibilités de mettre en place des puits de forage d’un débit supérieur à 5 litres par seconde, pour une exploitation commerciale, ne sont pas envisageables. «Des puits de forage bien placés et à faible rendement pour l’approvisionnement rural et des pompes manuelles seront probablement efficaces face au changement climatique», a déclaré Alan MacDonald, principal auteur de l’étude.

  • L’ONU souligne que la disparité de l’eau entraînerait des inégalités économiques entre les pays.(攝影: / 大紀元)

L’eau souterraine n’est pas une panacée, mais une stratégie d’avenir

Aujourd’hui, des estimations indiquent que le nombre d’Africains sans accès à une eau potable propre est de plus de 300 millions, et que seulement 5% des terres arables sont irriguées. De plus la FAO estime que 25% des terres sont désormais «dans un état extrême de dégradation» dû à l’érosion des sols, à la dégradation de l’eau et à la perte de biodiversité. Elle estime aussi que 8% des terres sont modérément dégradées tandis que 36% des terres sont stables ou légèrement dégradées. La FAO estime que seulement 10% des terres sont dans un état d’amélioration.

Ainsi, l’eau souterraine n’est pas une panacée pour les pénuries d’eau de l’Afrique, mais elle pourrait cependant représenter une partie importante d’une stratégie pour gérer une augmentation importante de la demande en eau, alors que la population du continent augmente. «Ce n’est pas aussi simple que de forer de gros trous et de regarder les champs de riz fleurir de partout», a déclaré le Dr Stephen Foster, à Reuters: Stephen Foster est conseillé pour le groupe Global Water Parnership, et expert sur les questions d’eau souterraine.

La formation des eaux souterraines selon une étude du CNRS

Les eaux souterraines proviennent de l’infiltration des eaux de pluie dans le sol. Celles-ci s’insinuent par gravité dans les pores, les microfissures et les fissures des roches, humidifiant des couches de plus en plus profondes, jusqu’à rencontrer une couche imperméable. Là, elles s’accumulent, remplissant le moindre vide, saturant d’humidité le sous-sol, formant ainsi un réservoir d’eau souterraine appelé aquifère. La nappe chemine en sous-sol sur la couche imperméable, en suivant les pentes, parfois pendant des dizaines voire des centaines de kilomètres, avant de ressortir à l’air libre, alimentant une source ou un cours d’eau. Les nappes souterraines fournissent ainsi presque le tiers du débit total de tous les cours d’eau de la planète, soit environ 12.000 km3 d’eau par an.

Deux types de nappes d’eau souterraine

Les nappes d’eaux souterraines peuvent être de deux types, selon qu’elles circulent sous une couche perméable ou non. Les nappes situées sous un sol perméable sont dites libres. Au-dessus de la nappe en effet, les pores du terrain perméable ne sont que partiellement remplis d’eau, le sol n’est pas saturé, et les eaux de pluie peuvent toujours l’imprégner davantage. Aussi, le niveau de la nappe peut-il monter ou baisser à son aise. De telles nappes peuvent donc contenir des volumes d’eau variables. C’est le cas notamment des nappes d’accompagnement des rivières.

En revanche, les nappes situées entre deux couches imperméables sont dites captives car leur niveau ne peut monter, l’eau ne pouvant s’insinuer dans un sol imperméable. Ces nappes n’ont qu’un lien ténu avec la surface par où elles sont alimentées et qui correspond à la zone où la couche perméable affleure. De telles nappes se renouvellent donc plus lentement que les nappes libres. Elles sont en général profondes, quelques centaines de mètres et plus, et si leur pente est forte, l’eau y est sous pression. La pression est même parfois suffisante pour que le creusement d’un puits permette à l’eau de jaillir en surface: une telle nappe est alors dite artésienne. Un exemple typique en France est celui de la nappe captive des Sables-Verts de l’Albien, qui se situe à environ six cents mètres de profondeur sous Paris.

La circulation des eaux souterraines

D’après une étude du CNRS, Les eaux souterraines cheminent à des vitesses très différentes qui dépendent de la nature des sols: plus la taille des porosités du sol est grande, plus la vitesse est rapide. Ainsi, dans les régions calcaires, les eaux de pluie s’engouffrent rapidement par les fissures et les avens et circulent à grande vitesse dans les galeries souterraines, jusqu’à quelques centaines de mètres par heure. Les eaux souterraines forment alors de véritables lacs et rivières souterrains, les lacs pouvant avoir jusqu’à 100 mètres de long et les rivières peuvent parcourir jusqu’à 10 kilomètres en souterrain.

Mais le plus souvent, le périple souterrain des eaux de pluie prend du temps: dans les régions constituées de calcaire ou de granite peu fissuré, de craie, de sable ou d’alluvions, leur infiltration est lente: quelques mètres par an dans les sables fins. L’eau remplit progressivement les moindres interstices, les pores de la craie, les petites fissures des granites ou des calcaires durs, ou encore les vides laissés entre les grains de sable ou de graviers. Les nappes ainsi formées ne sont jamais des étendues d’eau libre, mais des couches de terrain saturées d’eau. Leur écoulement est paresseux et les distances parcourues peuvent être très longues. Ce lent voyage permet au flux de l’eau de se régulariser, et aux nappes d’alimenter de manière régulière les cours d’eau, malgré le caractère discontinu des pluies. Même en période de sécheresse, elles peuvent parfois continuer à ravitailler les cours d’eau pendant des années. Les eaux souterraines ont donc un rôle de régulation extrêmement important. Ce sont elles qui alimentent ce que l’on appelle le «&» des cours d’eau ou débit de palier. Mais toutes les nappes ne sont pas d’aussi bonnes régulatrices du débit d’eau: les nappes libres en sont d’excellentes, contrairement aux nappes captives.

Eviter un épuisement irréversible des nappes

Il est possible d’exploiter cette ressource en puisant l’eau directement dans les nappes. Mais si l’on veut conserver l’aptitude de ces eaux à réguler les flux, il faut prêter attention à ne pas prélever plus d’eau que l’écoulement naturel ne peut en offrir. Il n’est donc pas recommandé de puiser dans une nappe sans en connaître au préalable le comportement, si l’on ne veut pas risquer un épuisement irréversible.

Aujourd’hui, certaines nappes ne sont plus du tout approvisionnées en eau: leur exploitation, comme celle de n’importe quel gisement fossile (pétrole, charbon, gaz…), ne peut donc que conduire à leur assèchement progressif. C’est le cas par exemple des nappes profondes et captives de certains bassins sédimentaires qui ne sont quasiment plus en relation avec le réseau hydrologique superficiel et que les eaux de pluie ne peuvent atteindre. C’est aussi le cas de certaines nappes libres des régions désertiques, comme celles des grès nubiens du nord de l’Afrique ou celle de l’Altiplano en Bolivie: ces nappes se sont formées alors que ces régions bénéficiaient d’un climat plus clément mais aujourd’hui les pluies sont trop rares pour pouvoir les alimenter.