L’épée à double tranchant d’une union bancaire européenne

Écrit par Ilya Rzhevskiy, The Epoch Times
23.06.2012

  • La chancelière allemande Angela Merkel et le Premier ministre britannique, David Cameron (à droite) lors d’une réunion le 7 juin à Berlin. Merkel a présenté une union bancaire européenne comme une option pour alléger la crise actuelle de l’euro.(Staff: Sean Gallup / 2012 Getty Images)

MUNICH – La crise de la zone euro s’accentue et la confiance des investisseurs est en chute alors que les marchés mondiaux attendent nerveusement le sort de la devise euro.

Tous les yeux convergent sur l’Allemagne et en particulier sur la chancelière Angela Merkel, qui doit encore proposer une stratégie claire sur l’euro. Des discussions sur une union bancaire (une assurance-dépôt au niveau européen, une capitalisation jointe des banques défaillantes, un système de supervision des banques et des obligations d’Etat européens sont parmi les aspects discutés) deviennent de plus en plus puissantes. Les politiques le considèrent comme le moyen de sauver l’euro. Les programmes d’austérité draconiens semblent ne pas être le seul ingrédient nécessaire pour apporter la stabilité et remettre l’économie européenne, dans son intégralité, sur pieds.

Un moyen pour sauver l’euro?

L’idée d’une union bancaire est une épée à double tranchant. D’une part, cela ajoutera une agilité, une puissance et une flexibilité énorme au système bancaire européen. Si quelques banques chutent, les autres renfloueront immédiatement la perte avec des liquidités fraiches, rééquilibrant ainsi le système bancaire européen dans son intégralité. Emprunter de l’argent serait tout aussi facile pour les banques en faillite que pour celles qui ont les meilleurs taux. Des crises qui frappent la Grèce, le Portugal, l’Irlande et l’Espagne pourraient être évitées ou plus facilement empêchées avant que cela ne devienne trop grave.

D’autre part, une union bancaire pourrait diminuer la responsabilité et la discipline des banques et des pays en déroute, puisque les conséquences dramatiques des banqueroutes auraient disparu. Les programmes d’austérité ne seraient pas considérés sérieusement, et il serait plus aisé d’emprunter seulement «un peu plus d’argent» dans le cas d’un déficit budgétaire important. Cela pourrait affaiblir la compétition au sein de l’Union Européenne et indirectement entraîner la corruption, puisque les banques et les gouvernements ne seraient pas aussi responsables et étroitement surveillés par le reste du monde, dans le cas où ils ne seraient pas à la hauteur.

Le risque d’affaiblissement de la compétition au sein de l’UE

Afin d’éviter les effets négatifs d’une union bancaire, un mécanisme de sécurité nécessaire devrait être mis en place pour surveiller toutes les activités bancaires et s’assurer que toutes les banques sont alignées dans leurs opérations financières et fonctionneraient selon la stratégie. L’union bancaire devrait former un mécanisme de transparence financière à l’échelle européenne et un contrôle des taxes pour chaque Etat membre afin d’éviter des cas d’évasions fiscales comme celles vécues en Grèce.

«Nous avons besoin de plus d’Europe – non seulement une union monétaire, mais aussi d’une union fiscale, en d’autres termes, davantage de politique budgétaire conjointe », a déclaré Angela Merkel, lors d’un récent discours. «Et, par-dessus tout, nous avons besoin d’une union politique, ce qui signifie que nous devons graduellement donner des compétences à l’Europe et donner le contrôle à l’Europe».

 

Merkel est d’avis que l’union bancaire devrait apporter plus de pouvoir à la Commission européenne «sans quoi une union monétaire ne pourrait fonctionner», a-t-elle déclaré. Former l’union bancaire pourrait aussi entraîner une meilleure intégration politique, selon Merkel. En d’autres termes, ce serait comme les Etats-Unis – un pays avec divers états, mais un gouvernement, une constitution, une banque centrale et un système de banques se rapportant à un ensemble de régulateurs.

Angela Merkel éprouve plus de facilités à proposer l’idée de l’union bancaire aux non-Allemands que dans son pays. La plupart des Allemands sont opposés à l’idée d’une union bancaire, parce qu’ils devraient porter le reste de l’Union européenne sur leurs épaules.

«Si chacun est responsable pour tous les autres, cela mènera à la négligence», a cité le journal populaire allemand Bild. «Et finalement, quelqu’un devra payer la note – dans le scénario actuel: les banques allemandes et pour finir, les épargnants allemands». L’idée d’une union bancaire rappelle à de nombreux Allemands un grand état de bien-être social, dans lequel les Allemands laborieux et surtaxés soutiennent les pays retardataires.

En plus des Allemands, la Grande-Bretagne, qui n’est pas membre de la zone euro, est aussi farouchement opposée à une union bancaire et à toutes transactions financières supplémentaires. Elle est réticente à toutes restrictions et taxes dans son vaste secteur financier, qui constitue 10% du PIB du Royaume-Uni. «Je n’ai aucun doute sur le fait que les pays de la zone euro veulent une plus grande intégration», a déclaré le Premier ministre britannique David Cameron, à Berlin, la semaine dernière lors sa réunion avec Merkel. «Pour autant, les Britanniques ne veulent pas participer à cette intégration».

 

Mais, dans son discours de la semaine dernière, la chancelière allemande était déterminée à faire avancer le plan.  «Nous avons déjà, dans certains domaines… quasiment une Europe à deux vitesses», a-t-elle déclaré dans un entretien avec «La télévision du petit déjeuner allemand», se référant à l’espace Schengen, sans frontière et au bloc de la monnaie unique. «Cela devrait s’intensifier. Tous ceux qui sont dans une union monétaire devront se mouvoir plus étroitement ensemble. Nous devons être ouverts sur ce point, et le rendre possible pour tous les participants, mais nous ne pouvons rester là, tranquilles, juste parce qu’un pays ou un autre ne veut pas suivre le mouvement», a-t-elle ajouté.

Les réflexions sur une union bancaire pourraient être poursuivies au sommet européen des 28 et 29 juin.