Énergies renouvelables, entre désirs et réalité

Écrit par David Vives, Epoch Times
24.08.2012
  • La quatrième plus grande hydrolienne au monde, à Plouézec, en France. Le mouvement des marées, capté par d’immenses turbines, fournit de l’électricité à 3.000 foyers. Selon Hervé Majastre, ingénieur à Hydrohélix, les courants bretons et normands pourraient fournir une puissance de trois gigawatts, soit l’équivalent de trois réacteurs nucléaires. (AFP PHOTO/Fred Tanneau)

Alors que les problèmes liés au dérèglement climatique se multiplient, le besoin de transition vers un modèle écologiquement responsable se fait de plus en plus sentir. Récemment, les investissements mondiaux en matières d’énergies renouvelables ont atteint 200 milliards de dollars – 95% des pays concernés font partie du G20. En France, l’investissement a été de cinq milliards, contre 30 pour l’Allemagne et 48 pour les États-Unis. Aujourd’hui, les énergies renouvelables dépassent de plus de la moitié le nucléaire. Cependant, de nombreuses difficultés et contradictions émergent quand on aborde le fond du problème.

L’Allemagne, un bon élève avec quelques difficultés

Le vendredi 25 mai, la production d’énergie solaire a dépassé 20 gigawatts, un record mondial d’après l’institut spécialisé IWR. Récemment, le PDG de la banque KFW a déclaré vouloir investir cent milliards d’euros sur cinq ans pour aider à cet objectif, et aider à concrétiser la sortie du nucléaire pour 2022. On compte à ce jour 367.400 emplois dans le secteur des énergies vertes, soit trois fois plus que dans le nucléaire.

Malgré ce fort dynamisme, quelques zones d’ombres subsistent. Angela Merkel et le président de l’Agence fédérale des réseaux sont d’accord sur un point: le développement des infrastructures et des réseaux est trop lent. Le processus de renouvellement nécessite, entre autre, la construction de nouvelles centrales à gaz et des lignes électriques.

L’Allemagne et son programme intégré sur l’énergie et le climat restent à ce jour un modèle à suivre. Cette exemplarité en matière de transition vers la production d’énergies renouvelable est le résultat d’un consensus général sur la politique énergétique, qui s’accompagne d’un effort soutenu au niveau national et dans le secteur privé.

La France, terre de contradictions

En France, la situation est toute différente. Les avancées concernant les énergies renouvelables existent bel et bien, mais elles sont loin de faire le poids à grande échelle et elles restent localisées.

Le nucléaire couvre 75% de la production d’électricité. La question est donc de savoir comment en sortir. François Hollande a très tôt marqué sa volonté de rattraper le «retard en matière d’énergies renouvelables» du pays.

Le président a déclaré vouloir ramener la part du nucléaire en France de 75% à 50%. Un objectif long terme, a-t-il déclaré en novembre dernier dans une tribune au Monde: «Cette mutation prendra du temps – trois quinquennats – et supposera des étapes d’évaluation en fonction des progrès de la science et des prix relatifs de chaque source d’énergie. L’industrie nucléaire, loin d’être affaiblie, sera à plusieurs titres sollicitée et donc renforcée. Elle aura à intervenir sur les centrales les plus anciennes, à être exemplaire en matière de démantèlement et à poursuivre les recherches sur les énergies de demain, tout en garantissant la sécurité absolue de chaque site de production».

L’idée de complémentarité énergétique entre le nucléaire, qui se retirera petit à petit, et les énergies renouvelables en plein essor, est séduisante. Encore faut-il compter avec certains facteurs d’instabilité. Le contexte économique difficile peut être un frein puissant, car le projet a un prix: à compter de 2012, 4,3 milliards d’euros par an seront à débourser par les consommateurs, et 6,7 milliards en 2017. Cet argent servira à financer les projets en cours de construction, comme les éoliennes.

Le gouvernement aurait à débourser un total de 30 milliards pour mener à terme cette transition. D’après le magazine Challenges, «c’est plus que l’ensemble des mesures nouvelles annoncées par ailleurs, estimées à vingt milliards d’euros».

Sachant que le coût de l’électricité va augmenter de 30% pour les consommateurs d’ici à 2016, le plan du gouvernement se transforme en jeu d’équilibriste. Par ailleurs, selon Christian Gérondeau, polytechnicien et expert indépendant, «il faut aussi construire des nouvelles centrales à gaz "en doublure" pour pallier aux défaillances dans le temps des énergies renouvelables. Plus on développe les énergies renouvelables, plus on émet incidemment de CO2, ce qui est à l’opposé du but affiché».

Une marge de manoeuvre très réduite

À l’heure où les ressources s’épuisent, de nouvelles solutions sont envisagées, comme le gaz de schiste. L’idée de son exploitation, qui a provoqué une levée de boucliers dans notre pays, refait surface. Les méthodes d’extraction, peu évoluées, consistent à fracturer des roches allant de 3.000 à 4.000 mètres de profondeur. Ces dernières soulèvent des questions problématiques, comme la pollution des nappes phréatiques avec des produits chimiques, la libération d’éléments tel le radium, le benzène, le toluène qui remonterait à la surface lors de l’extraction... certains parlent également de risques sismiques. Ce qui n’empêche pas des sociétés américaines, françaises ou suédoises de cultiver l’ambiguïté: détentrice d’un «permis visant à la recherche d’hydrocarbures liquides ou gazeux», elles sillonnent des régions françaises, attendant une évolution de la législation française.

Jean-Marc Ayrault et Arnaud Montebourg ont récemment appelé à un débat sur l’exploitation et la production du gaz de schiste. L’inflation grimpante des tarifs énergétiques demande des réponses rapides de la part du gouvernement. L’exploitation pourrait donner un second souffle à l’industrie française, actuellement mise à mal par les plans de restructuration.

Le gouvernement doit donc faire face aux besoins industriels, à la flambée des prix de l’essence et bientôt de l’électricité. Avec la crise économique en arrière plan, quelles sont les options du gouvernement? La prudence est de mise. Les énergies renouvelables sont encore loin d’offrir un contrepoids à l’échelle nationale. Elles  n’en sont pas moins attrayantes. Génératrices d’emploi, elles stimulent l’innovation technologique et sont parfois très rentable. EDF a rapporté une hausse de son chiffre d’affaires depuis le début de l’année, dû en partie aux énergies renouvelables.

Le gouvernement organise les 14 et 15 septembre une conférence environnementale, au cours de laquelle seront évoquées la transition énergétique et la préservation de la biodiversité. Cinq ans après le Grenelle de l’environnement, cette conférence rassemblera des ONG, des syndicats, des élus locaux et des parlementaires. L’occasion de définir des cadres législatifs pour les filières «vertes», et pourquoi pas, d’apporter de nouvelles orientations dans ce domaine.