La problématique Rom au cœur de l’agenda gouvernemental de la rentrée

Écrit par Ivo Paulovic, Epoch Times
29.08.2012
  • Des Roms participant à la manifestation du 22 août 2012 en face de l’hôtel de ville de Roubaix. Le Gouvernement français leur cherche à trouver une solution de relogement décent et d’accès au travail. (Philippe Huguen/AFP/GettyImages)

Fin août s’est réuni le conseil des ministres du gouvernement de Jean Marc Ayrault autour des dossiers importants de la rentrée dont la question des Roms. Les expulsions des populations d’appartenance ethnique Rom, d’origine Roumaine et Bulgare suivies de reconduite à la frontière, ainsi que le démantèlement des camps sauvages ont repris début août au grand dam des élus locaux et de l’opinion publique. Particulièrement concernés, le Ministère de l’Intérieur Manuel Valls et la Ministre du Logement Cécile Duflot ont souligné la nécessité de lever les mesures transitoires de gestion de l’immigration et de mettre en place un plan de relogement de ces populations. Ces mesures transitoires en vigueur depuis l’entrée de la Roumanie et de la Bulgarie dans l’Union Européenne prennent fin en 2013 et sont censées limiter l’accès au travail en France aux ressortissants romains et bulgares. Malgré cela la question Rom ne peut se résoudre aussi facilement, tant l’histoire et la culture de ce peuple nomade leur a appris à vivre à l’écart de la société.

L’histoire tourmentée d’un peuple indo-européen

Des recherches en linguistique et génétique de l’université d’Australie-Occidentale ont fait remonter les origines du peuple Rom aux régions de l’Inde quelques siècles après JC. Leur migration aurait commencé au 10ème siècle vers la Perse et la Syrie puis aurait continué vers l’Egypte d’un côté et vers l’Europe de l’autre. En l’an 1100 la chronique de l’abbaye du mont Athos en Grèce mentionne des nomades nommés Athsinganos (signifiant «celui qui ne veut pas toucher ni être touché», et qui donnera plus tard le terme tsigane). L’histoire officielle des Roms en Europe commence au 14ème siècle lorsque des documents officiels mentionnent des peuples nomades dans les Balkans, la Grèce, la Hongrie et la Bohème (région d’Europe centrale appartenant aujourd’hui à la République Tchèque). Appelés par la suite Manouches, Égyptiens et Bohémiens (venant de la Bohème), ils sont traités en général avec bienveillance et obtiennent les protections des vassaux ainsi que des dignitaires de l’Église. Ils sont alors musiciens, forgerons, commerçants ambulants, fabricants artisanaux, travailleurs saisonniers et exercent toutes sortes de métiers artistiques.

La situation change à partir du 15ème siècle, notamment lorsque l’archevêque de Paris excommunie de l’Église en 1427 une centaine de nomades égyptiens pratiquant la chiromancie. Des décrets sont émis exigeants la sédentarisation des nomades partout en Europe, culminant avec le décret de Louis XIV en 1666 qui, voulant limiter le vagabondage, décide d’envoyer aux galères les Bohémiens de sexe masculin. Leur volonté culturelle de rester à l’écart de la société est alors un facteur de marginalisation supplémentaire dans une société française en pleine évolution au cours du siècle des lumières et de la révolution industrielle. Le 20ème siècle fut le plus éprouvant pour la population Rom obligée de porter un «carnet anthropométrique d’identité», un livret de circulation existant encore aujourd’hui. Ils ont alors subi une sédentarisation forcée en Suisse et en Suède accompagnée de placements d’enfants et de stérilisations forcées. Subissant les théories eugéniques de l’époque, ils sont les victimes de déportations systématiques durant le génocide de la Seconde Guerre Mondiale.

Après la guerre, les Roms sont privés de leurs ressources et de leurs modes de vies et entassés dans de véritables ghettos insalubres par les régimes communistes et socialistes des pays de l’Europe de l’Est. En 1971 à Londres, ils parviennent à garder leur identité en se réunissant au sein de l’Union Romani Internationale. Ils choisissent alors officiellement le nom de Rom pour leur communauté, signifiant «faisant partie d’un groupe de voyageurs des Gitans ou Tsiganes». Aujourd’hui les Roms sont la plus grande minorité ethnique européenne comptant 10 à 12 millions d’individus. Leur situation reste difficile dans de nombreux pays, notamment en France où les Roms ressortissant de Roumanie et de Bulgarie sont expulsés depuis 2003 à raison de 8 000 expulsions par an.

Nouvelle politique du gouvernement

Fin août 2012, les décisions du gouvernement Ayrault donnant aux Roms l’accès au travail et à un minimum de logements sociaux et de terrains, tendent à améliorer leur situation. «Nous recensons les terrains et locaux disponibles immédiatement dans les départements qui sont en premier lieu concernés: Seine-Saint-Denis, Paris, Nord, Rhône et Bouches-du-Rhône», a indiqué la ministre du Logement Cécile Duflot.

Le gouvernement roumain a félicité «la manière constructive avec laquelle le gouvernement français aborde la question de l’intégration des Roms» et la Commission européenne a émis un avis favorable face à ces mesures, en encourageant la France à «lever l’ensemble des restrictions encore en vigueur dès que possible». Amnesty International quant à elle estime que le gouvernement français «doit s’engager à mettre un terme aux expulsions forcées de Roms».