« C'est contraire à la morale, à l'éthique et aux valeurs universelles »

Interviews lors de la conférence sur le trafic d’organes du 27 novembre 2013 à l’Assemblée nationale

Écrit par Laurent Gey, Epoch Times
03.12.2013

  • Noël Mamère, député écologiste EELV de la 3e circonscription de Gironde (NTD Télévision)

En marge de la conférence-débat sur le trafic d’organes et le tourisme de transplantation qui a eu lieu le 27 novembre à l’Assemblée nationale, les équipes de NTD Télévision ont rencontré trois personnalités politiques et publiques françaises : le député de l’Ain, Xavier Breton ; l’ancien président du Conseil consultatif national sur l’éthique Didier Sicard et le député de la 3e circonscription de Gironde, Noël Mamère. Ils leur ont posé deux questions.

Noël Mamère, député écologiste EELV de la 3e circonscription de Gironde

Epoch Times : Des prélèvements d'organes forcés continuent d’avoir lieu en Chine, est ce que vous pensez que c’est acceptable?

« Bien sûr que non ! Et cela fait longtemps que nous sommes contraints à nous battre contre les méthodes du régime chinois, pas simplement contre l'utilisation des travailleurs dans les laogai mais aussi les prélèvements d'organes sur des êtres vivants. En Chine, on fait même payer la balle à la famille de la personne exécutée, c’est intolérable.

Ces pratiques sont donc des pratiques barbares, des pratiques sauvages qui devraient être condamnées par la communauté internationale et par les tribunaux chinois - qui pourtant restent muets et complices de ces méthodes. C'est une atteinte à l'intégrité de la personne humaine et c'est contraire à toutes les lois qui peuvent régir la dignité humaine. Je pense que d'autres pays devraient réclamer à l'Organisation des Nations Unis le bannissement de la Chine pour ces pratiques et lui imposer des sanctions.

Mais aujourd'hui le commerce avec la Chine prime sur tout le reste et toutes les exigences que l’on peut avoir concernant le respect des droits de l'homme, on les oublie afin de pouvoir faire du commerce avec les Chinois».

Est-ce que l’on devrait voter en France une législation afin de mettre fin à ces crimes?

« Les députés d'autres pays que la Chine peuvent voter des lois mais elle n’auront que peu d'influence sur la Chine elle même. Il faudrait qu'en France on vote une loi qui interdise de commercer avec les Chinois tant qu'ils pratiquent le trafic d'organe ou tant qu'ils maintiendront des populations dans des camps de travaux forcés. Il faudrait que nos gouvernants - qui n'ont pas été jusqu'à présent courageux - disent de manière ferme aux autorités chinoises : « Nous ne poursuivrons nos relations commerciales avec vous qu'à la condition que vous arrêtiez le trafic d'organes ou que vous arrêtiez d'enfermer votre peuple. ». C'est une évidence, c'est une barbarie qui doit être éradiquée. C'est contraire à la morale, c'est contraire à l'éthique, c'est contraire aux principes de la dignité humaine, c'est contraire aux valeurs universelles. »

Xavier Breton, député UMP de l’Ain

Epoch Times : Des prélèvements d'organes forcés continuent d’avoir lieu en Chine, est ce que vous pensez que c’est acceptable?

« Il est important d'être sensibilisé à ce trafic et à ce qu’il représente. La première chose est donc d’avoir accès à cette information. Cette conférence m’a permis de mieux comprendre la réalité tragique de ce qui se passe en Chine. Le dialogue entre les professionnels de la santé en France est important pour ne pas rester sur des principes et agir concrètement. Il y a aussi notre devoir de politique de voter une loi rappelant notre exigence éthique. La France a un message unique concernant le respect du corps humain, pour ses citoyens aussi bien que pour les autres pays, et nous devons continuer à porter ce message à l'attention de l'ensemble du monde. »

Est-ce que l’on devrait voter en France une législation afin de mettre fin à ces crimes?

« Oui il faut d'abord légiférer à l'intérieur de la France, c'est important. Et puis il faut qu'on soit un moteur au niveau international et au niveau européen - mais là on sait qu'il y a beaucoup de travail parce que les cultures sont différentes entre l'Europe du nord qui est plus utilitariste et l'Europe du sud qui s'inspire de philosophies différentes. Entre les deux, la France a un message particulier, comme on l'a vu avec les lois de bioéthique. Nous avons quelque chose à apporter en rapport à notre histoire, en rapport avec notre manière de concevoir la société.  Nous devons le dire au niveau du parlement français si nous en avons l'occasion, c'est pourquoi j'avais cosigné la proposition de loi auprès de Valérie Boyer. Nous devons travailler aux côtés des médecins et des professionnels de la santé, ceux qui sont en contact avec les autres pays.

Nous attendons aussi de voir au niveau international quels vont être les orientations à la fois juridiques et éthiques, pour ensuite adapter dans le droit, la défense de nos valeurs. Je crois qu’il est important de ne pas se renfermer et notre parole au niveau de la France doit être une parole d'ouverture. On a la chance d'avoir une éthique du don d’organes qui est respectée, je pense notamment au comité consultatif national d'éthique que beaucoup de pays nous envient. On a la chance d'avoir des lois sur lesquelles se baser et au niveau ministériel l'agence de la biomédecine avec laquelle nous pouvons travailler concrètement. Donc il faut que nous soyons à la fois attentif à ce qui va être dit au niveau international en continuant à cultiver ce qui fait notre spécificité. »

Professeur Didier Sicard, ancien président du Comité consultatif national sur l’éthique

Epoch Times : Des prélèvements d'organes forcés continuent d’avoir lieu en Chine, est ce que vous pensez que c’est acceptable?

« La Chine est un grand pays qui a des concepts très partagés entre : des conduites qui associent des hôpitaux et des policiers avec des médecins qui sont complices d'utiliser des organes de condamnés à mort et des chirurgiens en Chine qui réfléchissent et qui ont un sentiment d’éthique. Je crois qu'il faut aider ceux qui résistent. Il faut aider la Chine à prendre conscience que dans le futur, l'usage des condamnés à mort sera très délétère pour le prélèvement d'organes. En effet, la société chinoise pourrait finir par assimiler la greffe d'organe aux condamnés à mort, alors que dans la plupart des pays du monde, le don d'organes est une solidarité et non pas un prélèvement fait sur des êtres sans défense. »

Est-ce que l’on devrait voter en France une législation afin de mettre fin à ces crimes?

« Effectivement les informations que nous avons sont inquiétantes, la condamnation à mort comme source quasiment exclusive pour les greffes d'organes pose une question éthique majeure. Le problème est de savoir comment les autres pays peuvent aider les Chinois plutôt que les diaboliser. Pour arrêter ces prélèvements d'organes, les étrangers doivent savoir qu'ils ne doivent pas être complices de ces pratiques, car la situation est éthiquement discutable. Je pense que c'est une affaire de la responsabilité internationale plutôt que la responsabilité des Chinois. Les Chinois peuvent faire ce qu'ils veulent dans leur pays. Le problème, c’est qu’il ne faut pas que les étrangers participent à ce trafic d'organes. »