L'ex-chef de la sécurité chinois a-t-il été arrêté?

Écrit par Stephen Gregory, Epoch Times
10.12.2013
  • Zhou Yongkang, ex-chef de la sécurité chinois (Liu Jin/AFP/GettyImages)

Des quotidiens de Taïwan et de Hong Kong ont indépendamment rapporté que Zhou Yongkang, autrefois un des hommes les plus puissants au sein du régime chinois, avait été arrêté. Pékin n'a pas commenté le sujet, mais des experts affirment que si M. Zhou n'a pas été arrêté, ce n'est qu'une question de temps avant qu'il le soit.

Les articles du 2 décembre dans le United Daily News de Taïwan et du 3 décembre dans le Sing Tao Daily de Hong Kong font partie des plus récentes allégations selon lesquelles le Parti communiste chinois (PCC) vise à neutraliser Zhou Yongkang, qui a trôné au sommet de l'appareil de sécurité chinois pendant cinq ans.

En mars 2012, le Financial Times avait rapporté que Zhou Yongkang était «déjà sous un certain niveau de contrôle». En mai 2012, des sources avaient indiqué à Époque Times qu'une enquête avait été ouverte sur M. Zhou. En septembre 2013, le site Daily Beast a rapporté que Zhou avait été placé en détention à domicile. En octobre 2013, le Mingjing News de Hong Kong avait rapporté que Zhou faisait l’objet d’une enquête.

«L'arrestation de Zhou Yongkang n'est qu'une question de synchronisme. Cela implique tellement de questions compliquées pour le PCC qu'un geste brusque pourrait causer des remous politiques», affirme Shi Changshan, un analyste de la politique chinoise basé à Washington, D.C.

Selon M. Shi, le Parti veut que les rumeurs, quant à l'arrestation de Zhou, circulent pendant quelques jours afin de tester l'opinion publique. La diffusion de l'information au compte-gouttes permet aussi de minimiser l'effet de la nouvelle lorsqu'elle sera finalement confirmée, estime l'analyste.

Les anciennes fonctions de Zhou

Zhou Yongkang a dirigé la Commission des Affaires politiques et légales (CAPL) de 2007 à 2012, l'organe du Parti qui contrôle pratiquement toutes les facettes de l'application de la loi, dont la police, la Police armée populaire, les tribunaux, les avocats, le parquet, les camps de travail forcé et les prisons.

Zhou avait un budget de plus de 100 milliards de dollars, soit plus que le budget militaire officiel; avec la Police armée populaire, il commandait une force de 1,1 million de troupes. Avant de diriger la CAPL, Zhou a été son sous-directeur pendant cinq ans tout en dirigeant le ministère de la Sécurité publique.

De 2007 à 2012, Zhou a été membre du Comité permanent du Politburo, soit le groupe de neuf hommes qui dirigeaient le Parti.

En occupant le poste de chef de la CAPL et celui de membre du Comité permanent, Zhou avait formé un deuxième pôle de pouvoir au sein du PCC. Il était presque indépendant de l'ex-secrétaire général Hu Jintao et représentait une menace pour les autres dirigeants.

Au cours de ses dix années à proximité ou au sommet de l'appareil de sécurité, Zhou Yongkang a utilisé la persécution de la discipline spirituelle Falun Gong pour augmenter son budget ainsi que son pouvoir et pour repousser les limites imposées par le système judiciaire chinois, selon le chroniqueur d'Époque Times Heng He.

Avant d'occuper des postes importants dans l'appareil de sécurité, Zhou était le secrétaire du PCC dans la province du Sichuan et avait mis sur pied à cet endroit un réseau de fonctionnaires qui lui étaient loyaux.

Plus tôt dans sa carrière, il avait dirigé la société d'État China National Petroleum Corporation. On l'appelait le parrain de l'industrie pétrolière, puisqu'il s'était assuré que ses acolytes étaient responsables des secteurs importants sur les plans financier et politique.

Abattre un tigre

Dans un discours en janvier 2013, le dirigeant chinois Xi Jinping avait déclaré que le PCC devait être assez téméraire dans sa campagne anticorruption pour s'en prendre aux «tigres», soit les hauts fonctionnaires. Si Zhou est arrêté, ce sera la prise d'un gros tigre.

Depuis mars 2012, quand l'allié de Zhou et ex-membre du Politburo Bo Xilai a été arrêté, Zhou a vu ses pouvoirs systématiquement réduits.

Selon une source bien placée à Pékin, en mars 2013 un ancien haut responsable de la CAPL a présenté un rapport aux dirigeants du PCC indiquant que 452 fonctionnaires de la CAPL avaient été arrêtés dans les trois mois précédents. De plus, 12 anciens hauts placés de la CAPL s'étaient enlevé la vie.

Parmi ceux qui auraient pu être arrêtés : les acolytes et ex-subordonnés de Zhou dans l'industrie pétrolière et dans la province du Sichuan; le blanchisseur de fonds de la famille Zhou, Wu Bing; et le fils de Zhou Yongkang, Zhou Bin.

Protocole

Selon l'article du 3 décembre dans le Sing Tao, un document circule parmi les hauts dirigeants du Parti qui explique les raisons de l'arrestation de Zhou.

Selon Heng He, l'arrestation d'une figure aussi importante du Parti doit suivre un certain protocole.

«L'annonce officielle de l'arrestation de Zhou ne peut être faite avant qu'il soit complètement sous contrôle», explique Heng He. «Ainsi, les hauts dirigeants sont informés, ensuite les cadres intermédiaires, et le public à la toute fin.»

La situation est très sensible dans le cas de Zhou, car en tant qu'ex-chef de la sécurité, il doit connaître tous les secrets des membres du Parti. Du mouvement sur Internet en Chine semblait préparer la population à d'éventuelles révélations-chocs.

Le 2 décembre quand le United Daily News a rapporté l'arrestation de Zhou, les recherches pour «Zhou Yongkang» sur l'Internet chinois étaient bloquées. Plus tard, un message a commencé à circuler indiquant que, puisque Zhou avait été à la tête des agents secrets en Chine, de l'information au sujet d'autres dirigeants du Parti allait maintenant être révélée.

Raisons

Selon Heng He, si Zhou a été ou devait être arrêté, cela briserait une règle non écrite très stricte. Selon celle-ci, les membres du Comité permanent du Politburo ont une carte éternelle «sortez de prison sans frais» et ne peuvent être arrêtés. En arrêtant Zhou, le PCC s'engagerait en territoire inconnu.

Les accusations portées contre Zhou ne vont probablement pas refléter l'importance de son arrestation, explique Heng He. L'allié de Zhou, Bo Xilai, a été accusé de subornation, corruption et abus de pouvoir, plutôt que d'autres crimes plus graves.

Zhou sera probablement traité de la même manière, quoique Heng He suggère qu'il pourrait aussi être accusé d'avoir tué des membres du Parti.

La vraie raison pour laquelle Zhou doit être neutralisé est le plan qu'il avait avec Bo Xilai d'évincer du pouvoir Xi Jinping, selon Heng He. Les hauts dirigeants ne peuvent permettre que cette tentative de coup d'État demeure impunie.

Selon Heng He, les pouvoirs extraordinaires que Zhou a accumulés dans la persécution du Falun Gong lui ont fait croire qu'il serait en mesure de détrôner Xi Jinping. Sa crainte d'être tenu pour responsable des violations des droits de la personne à grande échelle, commises contre le Falun Gong, l'a convaincu qu'un coup d'État était nécessaire.

Version originale : Was Zhou Yongkang, China’s Former Domestic Security Czar, Arrested?