Les tribus d’Amazonie à l’écart de la modernité, une question de choix

Écrit par Ticiane Rossi, Epoch Times
25.02.2013
  • Des Indigènes d’une tribu isolée d’Amazonie vivant le long de la frontière entre le Pérou et le Brésil, filmés depuis un avion en 2011. (© Gleison Miranda/FUNAI/Survival /UncontactedTribes.org/BrazilPhotos)

ITATIBA, Brésil – Les images stupéfiantes d’une tribu brésilienne isolée, prises depuis un avion il y a quelques années ont fasciné de nombreuses personnes.

Certains ont été surpris d’apprendre qu’à l’heure où la NASA envoyait des sondes vers d’autres planètes dans l’espoir d’y trouver un signe de vie, il existe encore sur notre Terre elle-même de petites communautés d’individus totalement coupés du reste du monde.

Diverses tribus isolées subsistent aujourd’hui dans des zones forestières impénétrables en Amérique du Sud mais aussi en Asie et Océanie.

Selon Glenn Shepard, anthropologue au Musée Goeldi à Belém, Brésil, la plupart des groupes isolés de la forêt amazonienne vivent le long des frontières séparant le Pérou, le Brésil, la Bolivie et la Colombie.

Il est difficile de savoir exactement quel mode de vie mènent ces Indigènes puisqu’ils fuient tout contact avec le monde extérieur. Néanmoins, il est possible d’étudier les traces de leurs déplacements dans la forêt.

S’isoler pour épargner sa vie

M. Shepard a 25 ans d’expérience de travail avec différentes tribus indigènes au Pérou, au Brésil et au Mexique. Elle affirme que pour la plupart des communautés indigènes demeurer isolées a été un choix afin d’échapper aux exterminations systématiques à l’époque du boom du caoutchouc au début du XXe siècle.

«Les conditions de travail inhumaines et les punitions cruelles des travailleurs indigènes par les saigneurs d’hévéas (récolteurs de caoutchouc) dans le Putomayo, région à cheval sur le Pérou et la Colombie, ont été dénoncées par le Congrès américain et le gouvernement britannique en 1913», rappelle M. Shepard.

Beaucoup d’Indigènes ont péri dans ces conditions et de nombreux autres se sont assimilés à la population. D’autres, cependant, ont décidé de vivre à l’écart du monde extérieur, nous apprend M. Shepard.

«Certains en demeurent toujours isolés».

Revirement politique

Dans les premiers temps de la colonisation, la politique du gouvernement brésilien vis-à-vis des populations indigènes consistait à les approcher et entrer en contact avec eux en vue de les intégrer dans la société. Mais, selon la fondation nationale brésilienne pour les peuples autochtones (FUNAI), une organisation gouvernementale, le bilan dressé avec le temps a laissé transparaître que cette politique-là plaçait les Indigènes dans des conditions de vie défavorables voire causait leur mort.

À partir de l’adoption de la nouvelle constitution dans les années 1980, on a vu la politique indigène brésilienne passer de l’objectif «intégration» à celui de «reconnaissance» des traditions, langues, croyances et droits à la terre des peuples indigènes.

«La politique adoptée vis-à-vis des peuples isolés est passée de la version du contact forcé à celle qui défend et protège leurs droits», affirme un porte-parole de la FUNAI.

«Cela veut dire que l’on devrait respecter davantage le désir de ces gens de demeurer isolés, et que c’est à l’État de pourvoir à ce que cela se fasse ainsi.»

Aujourd’hui, la FUNAI surveille le territoire des tribus isolées pour éviter tout risque d’ingérence.

«Il existe 32 tribus indigènes isolées et d’autres en sont encore en phase d’étude. On dispose déjà d’informations en grande quantité sur chaque groupe, et leurs territoires sont surveillés en permanence et gardés intacts», assure le représentant de la FUNAI.

Tout contact peut être fatal

Si les tribus sont gardées isolées aujourd’hui c’est parce que tout contact proche peut exposer leurs membres au risque de contracter diverses maladies infectieuses, comme ç’a été fréquemment le cas dans le passé où chaque rencontre se soldait malheureusement par une mortalité accrue au sein des tribus.

Une autre raison pour empêcher tout contact est l’hostilité que les Indigènes isolés sont susceptibles de manifester s’il apercevait des intrus sur leur territoire.

M. Shepard, auteur d’ouvrages et films documentaires sur les peuples d’Amérique du Sud, a lui-même failli perdre la vie au contact avec les Indigènes de la communauté isolée nomade de Mashco-Piro. Probablement effrayés par l’un des amis Indigènes de M. Shepard, alors qu’il pensait faire bien en aidant le chercheur à établir le contact, les Mashco-Piro l’ont tué.

Les Mashco-Piro, explique M. Shepard, se sont isolés et ont renoncé à l’agriculture après se faire trucidés par les saigneurs d’hévéas.

«Il est important de comprendre que garantir leur isolement revient à garantir [le] droit à la survie [des Indigènes]», souligne M. Shepard.

«Il y a des touristes obsédés par l’envie de voir des Indigènes primitifs, tout nus et ‘purs,’ comme dans une sorte de «Jurassic Park» [référence au film de Steven Spielberg]. Ce dont certains ne se rendent pas compte, est que ces gens ne veulent qu’une chose: qu’on ne les dérange pas. Ne pas respecter ce souhait peut entraîner un grand danger», met-il en garde.

Version anglaise: Uncontacted Tribes in the Amazon: Isolated by Choice

Epoch Times est publié en 21 langues et dans 36 pays.