Stains: de la cité-jardin à l’éco-quartier

Écrit par Michal Bleibtreu-Neeman, Epoch Times
09.03.2013
  • Le projet d’éco-quartier à la gare de Stains. (CLIC Architecture)

La ville de Stains a une longue histoire de logements liés aux espaces verts. Déjà au début du XXe siècle, Stains était parmi les quelques villes, uniques en France, ayant lancé le projet de la cité-jardin. Une nouvelle formule dans l’histoire de l’urbanisme, inspirée des quartiers anglais conçus par Ebenezer Howard en 1898.

«Il s’agit des logements sociaux construits entre les deux guerres qui permettaient d’avoir des maisons de qualité (logement plus jardin) pour les ouvriers», raconte Arnaud Costes, le chargé des projets d’aménagement urbain de Plaine Commune.

La cité-jardin de Stains a été réalisée entre 1921 et 1933 par les architectes Eugène Gonnot et Georges Albenque pour accueillir les familles des ouvriers qui travaillaient dans les usines de proximité.

Le concept de cette formule urbaine opposait la cité-jardin à la ville industrielle sans pour autant passer à la campagne. L’esthétique de l’aménagement ne comptait pas moins que le confort.

Aujourd’hui, il reste une dizaine de cités-jardins dans la région parisienne toutes classées comme patrimoine historique.

Depuis 2006, la cité-jardin à Stains bénéficie d’un renouvellement et s’inscrit dans un programme global. Le travail se fait tant au niveau de l’espace public – ouverture de grands axes de circulation et ravalement des façades –, qu’au niveau de la mise aux normes de l’habitat qui date des années 1930.

Aujourd’hui les travaux continuent et la cité-jardin, qui se trouve dans la partie ouest de la ville, fait partie de la constitution du futur centre ville de Stains. La ville profite de sa valeur touristique et des visites guidées y sont organisées.

Les jardins familiaux

Après la création de la cité en 1933, plus précisément dans la partie est de la ville, se développent les jardins familiaux. Aujourd’hui, on compte 700 parcelles de jardins familiaux à Stains.

Ces jardins sont censés fournir non seulement des espaces de repos et de rencontres, mais également une source d’alimentation saine et durable qui suit les saisons.

Les potagers permettent aussi aux habitants de Stains de s’approprier leur territoire.

Mais, de nos jours, Stains est coupée par la voie ferrée ainsi que par la route départementale et les zones urbaines ne sont pas forcément liées aux espaces verts comme, par exemple, le parc de la Courneuve.

Le projet Effets de Serres

Dans cette idée du développement de Stains, où la nature prend une place importante dans une zone urbaine dense et fracturée, la ville a été inscrite au concours Europan «pour pouvoir relier ses parties», nous dit Arnaud Costes.

L’objectif de l’Europan, concours européen qui se déroule tous les deux ans, est de permettre aux jeunes architectes de proposer leurs idées et de les intégrer dans les nouveaux projets urbains en Europe. L’avantage de ce concours, selon Emmanuelle Klinger, se trouve surtout dans le fait qu’on peut laisser libre cours à ses idées sans avoir à se freiner par les contingences. Une fois primés, les projets sont souvent réalisés – un autre avantage de ce concours. Malheureusement en France, le projet lauréat doit passer par plusieurs étapes: il doit être voté et réétudié avant d’être approuvé pour pouvoir enfin être concrétisé.

Trois projets ont été retenus par le jury. Le groupe CLIC, composé de cinq jeunes architectes Adèle Catherine, Aurélie François, Laura Giuliani, Emmanuelle Klinger et Pierre-Emmanuel Limondin, a remporté le premier prix avec son projet Effets de Serres.

«On s’intéressait aux serres car il y a une véritable histoire de rapport au jardin à Stains», nous explique Emmanuelle Klinger. Les serres étaient donc une réponse architecturale aux problématiques posées par le site et son programme.

Le projet lauréat Effets de Serres se compose de deux parties. Une première partie contient des logements et des serres. Elle est intégrée dans le site des jardins ouvriers en respectant l’existant. Une seconde partie, nommée La Lentille, comprend la zone de la gare où, dans le futur, passeront d’un coté la ligne de Tangentielle Nord, et de l’autre le terminus de la ligne 13 du métro. Cette zone est basée également sur le principe des serres modulaires.

  • Place Marcel Pointet, cité-jardin de Stains. (Unité territoriale rénovation urbaine)

«Comme cela a eu lieu après l’accident nucléaire de Fukushima, nous avons pensé, naturellement, à la question d’énergie. Comment les gens vont-ils se déplacer s’il n’y a plus de pétrole ? Comment feront-ils pour transporter les aliments? Comment vont-ils se chauffer? Les serres sont donc devenues le fil conducteur du projet.»

Dans la proposition, les serres seront liées à des cheminées solaires dans lesquelles circulera l’air chaud accumulé dans les serres. Grâce à cet air chaud, des turbines contribueront à la fabrication de l’électricité. Ces techniques sont assez simples et réalisables sans faire appel à des dispositifs trop sophistiqués.

«L’avantage des serres tient à leur caractère modulaire et économique», explique Emmanuelle Klinger.

En effet, les serres pourront servir de gymnase, de commerce, de jardins et changer de fonction selon les besoins.

La gare a un rôle important dans le projet, comme dans la future ville. En tant que tel, le groupe d’architectes tenait à ce que le passage entre la ville et la gare se fasse de manière très douce, voire inaperçue. La continuité se fera selon plusieurs moyens: pente douce, serre botanique, taux de vide obligatoire, etc. L’idée était de transformer le concept que l’on a du transport et de la gare et d’en faire « un temps de la vie et non pas un temps perdu », précise Emmanuelle Klinger.

L’un des principes de ce projet était le travail sur la quatrième dimension – la temporalité. Les serres permettent de refléter le changement et l’évolution du temps par les saisons, aussi bien dans le site d’implantation des logements que dans la zone de la gare.

Si l’objectif de la cité-jardin était de faire opposition à la ville industrielle polluée tout en restant en ville, «le propos d’Effets de serres consiste à associer au rythme accéléré de la ville, le rythme lent des saisons et de la culture de la terre».

Ainsi, la personne qui cultive son jardin ici peut être un homme d’affaires à la Défense ou même à l’étranger. C’est cela qui est intéressant dans la métropole.

Et où en est le projet?

Il faudrait déjà prendre en compte que le train en est à sa première phase. La mise en service est repoussée de 2014 à 2017.Pour le terminus de la ligne 13 on parle de 2025.

Quant aux logements, en raison de la proximité de l’aéroport du Bourget, a été figuré un cône dans lequel la construction a été bannie pour des questions de nuisance sonore. Avec l’évolution du plan d’exposition aux bruits PEB, un document d’urbanisme fixant les conditions d’utilisation des sols exposés aux nuisances dues au bruit des avions, bloque la constructibilité, notamment celle de logements.

«Une des composantes fortes du concours était au niveau de la création de logements et c’est vrai qu’aujourd’hui on est un peu embêté puisqu’il y a eu des évolutions fortes depuis ce concours», nous dit Arnaud Costes, tout en nous assurant que «cette dimension va être retravaillée et va évoluer… on a encore le temps de réfléchir sur les nouvelles données, l’évolution et la programmation…», poursuit-il.

Le projet n’est donc pas abandonné.

Pour en savoir plus: Boutique Mémoires de Cité-Jardin. 28, avenue Paul-Vaillant-Couturier – 93240 Stains. Tél. : 01 58 69 77 93

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