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Les déboires de l'ACDI en Chine

Écrit par Matthew Little, Epoch Times
03.04.2013
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  • Bien que les tribunaux chinois se soient modernisés, les défenseurs de la démocratie affirment qu'ils sont encore utilisés comme un outil de répression contre les dissidents.(China Photos/Getty Images)

L'aide internationale canadienne qui visait à améliorer le système judiciaire chinois était vouée à l'échec, affirme un avocat canadien ayant pratiqué en Chine. Cependant, les récentes luttes de pouvoir au sein du Parti communiste chinois (PCC) pourraient ouvrir la porte au changement.

Cette aide, de même que toute forme d'aide destinée à la Chine, sera annulée alors que l'Agence canadienne de développement international (ACDI) effectue des compressions de l'ordre de 377 millions de dollars d'ici 2015. Cette décision survient au moment où les conservateurs tentent de retrouver l'équilibre budgétaire et elle répond également à un souhait de plusieurs députés du parti au pouvoir de réduire l'aide octroyée au régime communiste.

Le gouvernement aurait dû depuis longtemps couper l'aide destinée à des projets visant à améliorer le système judiciaire chinois, selon Clive Ansley, lui qui a pratiqué en Chine pendant 15 ans et qui est un des rares avocats canadiens à avoir fait face aux tribunaux chinois. Tant et aussi longtemps que le PCC contrôlera les tribunaux – un fait que l'ACDI et ses partenaires ignorent souvent – les réformes sont impossibles, explique-t-il.

«Tout ce que les [projets de l'ACDI] faisaient était de créer une fausse impression parmi les gens de ce côté de l'océan que la Chine est sérieuse à propos de réformer son système judiciaire», ajoute Me Ansley.

Tant que le régime va nommer et congédier les juges à souhait, qu'il va envoyer en prison les avocats qui défendent les groupes opprimés et qu'il va maintenir le contrôle du Parti sur le judiciaire, les réformes ne seront qu'une farce, déplore-t-il.

«Ça ne prend pas la tête à Papineau pour réaliser que le système légal en entier, y compris tous les juges, est entièrement contrôlé par le Parti.»

Les abus généralisés dans le système judiciaire chinois transforment souvent les tribunaux en outils de répression du PCC, alors que les directives du Parti ont la suprématie sur les lois telles qu'elles apparaissent sur papier.

Le régime chinois est la tête de file mondiale en matière d'exécutions et les dissidents et les prisonniers de conscience sont souvent victimes des camps de travail forcé, où ils sont incarcérés pour avoir exercé leurs droits fondamentaux et sans avoir subi de procès.

Le Canada a dépensé près d'un milliard de dollars en aide destinée à la Chine depuis 2000, avec 571 millions de dollars en dépenses multilatérales et 426 millions de dollars en aide bilatérale. Les dépenses sont passées à 142,7 millions de dollars en 2008-2009 après le séisme dans la province du Sichuan et ont depuis diminué, avec 34,2 millions de dollars dépensés en 2011-2012.

Avec les réductions annoncées, un des derniers projets que l'ACDI va financer en Chine est celui de l'Association du barreau canadien (ABC) qui vise à améliorer les services d'aide juridique offerts aux groupes marginalisés, particulièrement les minorités ethniques. L'ACDI va dépenser un maximum de 10 millions de dollars pour le projet.

Les efforts pour développer la gouvernance démocratique, comme le projet de l'ABC, constituaient une priorité pour les dépenses de l'ACDI en Chine. Un rapport de l'ACDI en 2005 offre un survol de ses efforts visant la gouvernance en Chine, dont des programmes pour instaurer la primauté du droit, la démocratie et la société civile. Le rapport fait également état de différentes réformes mises en place par le régime chinois afin de se rapprocher des normes internationales.

Les détracteurs du régime considèrent plutôt que ces réformes sont essentiellement esthétiques et qu'elles visent à contrer les critiques et faire croire aux optimistes que le PCC est prêt à relâcher son emprise sur le pouvoir et à se soumettre à la primauté du droit ou à des élections multipartites.

L'éléphant dans la pièce

L'ACDI et ses partenaires qui offrent des programmes en Chine tiennent rarement compte du PCC. Par exemple, le rapport de 2005 ne mentionne pas le PCC une seule fois.

Il s'agit d'une incroyable omission.

Ce n'est pas une tâche facile que d'ignorer le rôle du PCC dans la gouvernance en Chine. Dans chaque bureau gouvernemental, chaque grande entreprise ou autre organisation, il y a une structure du PCC qui y est rattachée, s'assurant que les activités servent les intérêts du Parti.

Dans la pratique, cela signifie qu'il y a une position de secrétaire du Parti derrière pratiquement tout poste important, que ce soit celui d'un PDG, d'un maire ou d'un président d'université.

Parfois, le fonctionnaire gouvernemental est aussi le responsable du Parti, comme c'est le cas dans les plus hauts échelons. L'actuel dirigeant, Xi Jinping, est à la tête de l'État en tant que président et le chef du PCC en tant que secrétaire général. On retrouve le même modèle dans les entreprises étatiques comme CNOOC, alors que Wang Yilin préside le conseil d'administration et qu'il est aussi secrétaire du Parti chez CNOOC.

Certains récipiendaires du financement de l'ACDI reconnaissent le contrôle que le PCC exerce sur les tribunaux, mais ils font exception dans les rapports publiés.

L'International Centre for Criminal Law Reform (ICCLR) de l'Université de Colombie-Britannique a reçu des fonds de l'ACDI pour travailler avec le Parquet populaire suprême chinois, qui pourrait se comparer à la Cour suprême du Canada, excepté qu'il est contrôlé par le PCC.

Dans son rapport de 2008 sur ce projet, l'ICCLR vante les réformes du système judiciaire chinois, mais il n'aborde pas le contrôle des tribunaux par le Parti. Cependant, dans une collection d'articles de 2002 sur le programme Chine de l'organisation, Dr Vincent Yang souligne :

«Une différence fondamentale entre le système de parquet chinois et son homologue occidental réside dans le fait qu'il est sujet au leadership d'un parti politique, soit le Parti communiste chinois.»

Dans une admission obtuse de l'absence d'un système judiciaire indépendant, Dr Yang écrit que la loi chinoise protège les tribunaux de l'interférence des «organes administratifs, des associations sociales et des individus», mais que cette provision ne s'applique pas au PCC.

Le PCC est l'éléphant dans la pièce en ce qui a trait aux efforts pour améliorer la gouvernance, puisque bien qu'il soit la source suprême d'autorité, il est intouchable et souvent ignoré. Ainsi les efforts de l'ACDI pour réformer la Chine sont sapés à la racine.

Liens avec le Canada

Ce dernier point est mis en lumière par des procédures se déroulant dans un tribunal de Toronto.

Dans les prochaines semaines, la plaignante Jin Rong va tenter de faire avancer sa poursuite contre Bo Xilai, l'ex-membre disgracié du Politburo reconnu comme un des alliés les plus sanguinaires de l'ex-dirigeant Jiang Zemin.

Bo avait été désigné par Jiang pour finalement diriger le Parti et il était un des plus jeunes acolytes de Jiang ayant participé à la persécution de la méditation Falun Gong lancée en 1999. En s'assurant qu'un de ses alliés allait diriger le PCC, Jiang espérait ainsi que les crimes qu'il a commis n'allaient pas être utilisés contre lui par ses adversaires politiques.

La seule chose qui permet à Bo de ne pas perdre ce procès est la All China Lawyers Association (ACLA), un groupe qui se présente comme l'équivalent de l'Association du barreau canadien (ABC). L'ACLA affirme que Bo possède l'immunité étatique pour son rôle dans l'emprisonnement de Jin Rong parce qu'elle pratique le Falun Gong.

Du coup, l'ACLA est un bénéficiaire direct de l'argent de l'ACDI, ayant demandé à l'ABC de demander des fonds à l'ACDI pour l'aider à améliorer les compétences de ses avocats en droit criminel.

Argent contre argent

Mais tandis que l'ABC est un regroupement administratif indépendant d'avocats, l'ACLA est un outil par lequel le PCC contrôle les avocats en Chine.

Yu Ning est le président de l'ACLA et un membre du PCC, alors que Deng Jiaming est son secrétaire général. Ils ont ensemble œuvré à réprimer les avocats qui questionnent le Parti en procédant, entre autres, à la révocation des licences.

Des affidavits déposés auprès de la Cour supérieure de l'Ontario, qui a reçu la poursuite de Jin Rong, expliquent le rôle de l'ACLA dans la répression de la primauté du droit en Chine. L'ACLA est contrôlée par le ministère de la Justice et est entièrement sous les ordres du Parti. L'ACLA détermine comment ses branches doivent traiter certains cas, notamment la poursuite des dissidents.

Un des affidavits a été écrit par Han Guangsheng, qui a fait défection au Canada en 2001. Il a été auparavant le chef adjoint du Bureau de la sécurité publique de Shenyang (1982-1996) et il a occupé des postes importants jusqu'à 2001, comme chef du Bureau judiciaire de Shenyang, président honoraire de l'Association des avocats de Shenyang, secrétaire général du Comité du Parti communiste chinois du Bureau judiciaire de Shenyang, etc.

M. Han a déclaré que l'ACLA constituait le sixième doigt de la dictature du PCC, accompagné du poing formé par cinq départements principaux, soit le Bureau de la sécurité publique, le parquet, les tribunaux, le ministère de la Justice et le ministère de la Sécurité de l'État.

M. Han a fourni une perspective de l'interne sur la façon dont l'ACLA dirige les avocats à mener le genre de répression que l'ABC tente d'enrayer avec son projet financé par l'ACDI.

Bombes constitutionnelles

Tandis que les millions de dollars du Canada ne peuvent aller bien loin en Chine, une nouvelle génération de dirigeants semble contempler les réformes judiciaires afin de contrer ses adversaires politiques.

La Chine possède une constitution, mais très rarement s'y réfère-t-on. Clive Ansley affirme que la totalité du système judiciaire chinois représente essentiellement un effort visant à apaiser les investisseurs étrangers qui voulaient un moyen de se protéger contre les fonctionnaires corrompus et les partenaires d'affaires louches. Les lois sur papier permettent également au régime de repousser les critiques de la communauté internationale.

Mais, récemment, le nouveau dirigeant Xi Jinping et ses alliés ont prononcé un gros mot – constitution – d'une telle manière que certains analystes se demandent si la dissolution du contrôle du Parti pourrait survenir plus tôt qu'on ne le pense.

Le nouveau premier ministre, Li Keqiang, a déclaré le 17 mars en conférence de presse : «Nous allons être loyaux à la Constitution.»

Cette phrase anodine est à des milles du serment habituel : «Nous allons être loyaux envers le peuple.» Contrairement à ce «peuple» nébuleux et ses intérêts divergents, la Constitution chinoise peut servir de référence. Bien qu'elle soit largement ignorée, outre l'aspect qui donne au PCC l'autorité suprême, certains espèrent quand même du changement.

Xi Jinping a aussi fait référence à la Constitution dans ses discours. Cependant, en guise de signe potentiel de la difficulté d'apporter un changement, ses remarques ont été retirées de l'Internet chinois, semble-t-il par l'allié de Jiang Zemin, Liu Yunshan, qui contrôle le ministère de la Propagande.

Si ces paroles au sujet de la Constitution sont plus qu'un éloge stérile, il est possible qu'une faction au sein du PCC commence à considérer que la primauté du droit pourrait aider la Chine à régler certains de ses problèmes colossaux. Des analystes d'Epoch Times estiment que la faction de Xi Jinping pourrait voir dans les réformes légales une manière de damer le pion à la faction conservatrice de Jiang Zemin.

Époque Times a demandé à l'ACDI, à l'ABC et à l'ICCLR de commenter ce reportage. L'ACDI a répondu en fournissant certains chiffres sur le financement, mais aucune organisation n'a voulu discuter des défis inhérents à la réforme judiciaire en Chine.

Version anglaise  : Canadian International Development Agency’s China Misadventure

 

Plus de 204 718 434 personnes ont démissionné du PCC et de ses organisations.