Les révélations sur le programme de surveillance américain profiteraient à Pékin

Il n'y a aucune équivalence morale entre l'espionnage américain et l'espionnage chinois, selon certains observateurs

Écrit par Carol Wickenkamp, Epoch Times
24.06.2013
  • Le directeur de la National Security Agency (NSA), le général Keith Alexander, a témoigné devant un comité du Congrès le 18 juin 2013 au sujet du programme de surveillance PRISM. (Saul Loeb/AFP/Getty Images)

Les révélations d'Edward Snowden sur le programme de surveillance américain sont de plus en plus perçues par certains comme un cadeau pour le régime chinois, lui qui possède son propre programme colossal de surveillance intérieure et étrangère.

Les effets négatifs des révélations sont à la fois pratiques et rhétoriques, affirment les critiques. En démontrant comment les agences de renseignements américaines opèrent, notamment comment elles pénètrent les réseaux informatiques en Chine, Snowden a compromis la sécurité nationale des États-Unis.

Snowden a également offert sur un plateau d'argent un gros coup de propagande au Parti communiste chinois (PCC), affirment certains observateurs, en détournant l'attention sur le cyberespionnage industriel de Pékin vers les activités de surveillance de Washington.

Les révélations de Snowden sont apparues dans les médias alors que le président américain, Barack Obama, s'apprêtait à rencontrer en Californie le chef du PCC, Xi Jinping. Un des points importants à l'ordre du jour était la tenue d'une discussion franche sur le pillage des secrets d'entreprises américaines par l'espionnage informatique chinois.

Ce vol technologique est commis de manière systématique et sur une échelle astronomique par l'armée chinoise et d'autres organes officiels, et cela a causé le «plus grand transfert de richesse dans l'histoire», selon le directeur de la National Security Agency (NSA), le général Keith B. Alexander.

Le cas Snowden a eu l'effet de créer une «équivalence morale» entre les activités cybernétiques du Parti communiste et celles des États-Unis, affirme John Bolton, un chercheur à l'American Enterprise Institute.

«Maintenant, la Chine peut se présenter comme une victime, assaillie par les États-Unis, essayant simplement de se défendre», remarque-t-il. «En élevant incorrectement Pékin à l'équivalence morale avec Washington, Snowden a embrouillé cette distinction essentielle, offrant à la Chine un abri politique.»

Le moment des révélations de Snowden et la manière avec laquelle elles ont été faites ont eu l'effet de regrouper les motivations et les fondations politiques des efforts cybernétiques respectifs des deux pays, affirment les critiques.

Cependant, les différences sont fondamentales. La Chine est un régime autoritaire qui espionne sa population pour restreindre la liberté d'expression ou pour voler les secrets d'entreprise des pays étrangers, alors que la surveillance effectuée par les États-Unis et son gouvernement élu démocratiquement est soumise à plusieurs niveaux de supervision et cible principalement les terroristes.

«La tragédie, et l'absurdité, de tout ça est que les États-Unis sont maintenant considérés un État orwellien comme la Chine», écrit Peter Navarro, coauteur du livre Death by China. «En vérité, l'objectif principal du programme de surveillance de l'administration Obama est d'empêcher des groupes terroristes comme Al-Qaïda de tuer des Américains.»

Le président Obama a cherché à tracer la ligne entre le vol de propriété intellectuelle par le régime chinois et les activités «normales» des pays qui s'espionnent entre eux pour obtenir des secrets politiques ou militaires.

Après être sorti de sa cachette pour s'adresser brièvement aux médias, Edward Snowden a tenté de convaincre Hong Kong de refuser toute demande d'extradition des États-Unis. Il a également montré au quotidien South China Morning Post (SCMP) des documents qui démontrent que la NSA a compromis des ordinateurs à Hong Kong, dont ceux de la Chinese University of Hong Kong, de responsables, d'entreprises et d'étudiants.

Hong Kong, un territoire chinois, a ses raisons pour compliquer toute demande d'extradition de Snowden. Selon les médias officiels, «l'image de Hong Kong serait ternie à jamais» s'il était extradé aux États-Unis, a rapporté le SCMP, indiquant que ce serait «une “trahison” de sa confiance et Pékin “perdrait la face”».

Selon un sondage mené par le China Post de Taiwan, près de 50 % des résidents de Hong Kong s'opposent à l'extradition.

Aux États-Unis, Snowden a subi les salves de l'ex-vice-président Dick Cheney sur les ondes de Fox News. «Je crois qu'il est un traître. Je crois qu'il a commis des crimes en violant les ententes relatives au poste qu'il occupait.»

«C'était un employé à forfait, mais il avait évidemment obtenu une cote de sécurité très secrète. De mémoire, je crois qu'il s'agit d'un des pires cas où quelqu'un avec accès à des informations classifiées a causé un tort énorme à la sécurité nationale des États-Unis», a ajouté Cheney.

Le congressiste républicain de New York Peter King a de son côté demandé le 14 juin si Snowden espionnait pour le compte de la Chine. Il a dit que Snowden avait transféré de l'argent en Chine et qu'il avait étudié la langue. Il a également émis des doutes sur le choix de Snowden de s'enfuir en Chine. Selon Peter King, une enquête était en cours pour déterminer si Snowden travaillait pour la Chine, soulignant que les révélations avaient coïncidé avec la rencontre entre les présidents américain et chinois.

Le ministère chinois des Affaires étrangères a qualifié «d'absurdités totales» les affirmations selon lesquelles Snowden serait de mèche avec Pékin.

Edward Snowden n'a pas été ébranlé par les accusations venant des États-Unis. «Se faire traiter de traître par Dick Cheney est le plus grand honneur que l'on peut donner à un Américain», s'est-il vanté.

Snowden a participé le 17 juin à une séance de questions et réponses organisées par le quotidien The Guardian à partir d'un lieu secret à Hong Kong.

Il a nié avoir été en contact avec les Chinois ou leur avoir donné des informations classifiées, affirmant que «tout comme avec le Guardian et le Washington Post, je ne travaille qu'avec des journalistes».

Lorsqu’on lui a demandé spécifiquement s'il avait fourni ou pourrait fournir «des informations américaines classifiées à la Chine ou à d'autres gouvernements en échange de l'asile politique», Snowden a répondu en lançant des questions hypothétiques aux participants plutôt que de répondre directement.

Snowden est maintenant accusé d'espionnage par les États-Unis.

Version originale : Snowden’s Disclosures Tar US With Beijing’s Brush