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Pourquoi les élections allemandes nous concernent-elles, même si rien ne change?

Écrit par Henri Stanek
24.09.2013
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  • La chancelière allemande Angela Merkel et le président américain Barack Obama se préparent pour poser lors de la photo de famille à la fin du sommet du G-20, le 6 septembre 2013, à Saint-Pétersbourg, en Russie. (Kirill Kudryavtsev/AFP/Getty Images)

Au-delà des frontières hermétiques de la blogosphère des spécialistes de l’euro, les prochaines élections législatives en Allemagne n'ont pas suscité beaucoup d'intérêt. La probabilité qu’Angela Merkel soit réélue ne fait aucun doute, même parmi ses détracteurs, et la grande question semble être de savoir si elle se séparera de son actuel partenaire de coalition.

Cependant, l'Allemagne a de l’importance, et les positions de Merkel sur l'Union européenne, le commerce et la sécurité internationale méritent d'être examinés de plus près. L'Allemagne est de facto le leader de l'Europe et aura très probablement à jouer un rôle plus important sur la scène mondiale dans les années à venir.

Malgré le tumulte économique et financier chronique qui depuis longtemps a fait tomber beaucoup de ses homologues (pensez à Nicolas Sarkozy en France et Silvio Berlusconi en Italie), Mme Merkel a réussi à maintenir une emprise impressionnante sur l'opinion publique et semble prête à maintenir son avance dans les sondages jusqu'aux élections législatives du 22 septembre.

Merkel «Über Alles» (intro et fin du premier couplet du chant national allemand)

Le parti de centre-droit Union chrétienne-démocrate (CDU) de Mme Merkel avec son parti bavarois adjoint, l'Union chrétienne-sociale (CSU), maintient une solide avance dans les sondages avec environ 40 % des voix. La seule question restant à débattre actuellement pour les experts semble être, si oui ou non, la chancelière lâchera son partenaire de coalition, le Parti libéral démocratique libre (FDP) comme compagnon de lit plutôt tumultueux ou alors si elle formera une grande coalition avec le parti (SPD), le Parti social-démocrate de centre-gauche.

Malgré sa tendance à garder profil bas au-delà des frontières de l'Europe, la chancelière a acquis un statut de célébrité en tant que première femme et première personne de l’Est à occuper ce poste. Moins flatteur, elle s’est également vue attribuer, en Europe, un nom familier en lien avec sa manifeste intransigeance lors de la crise de l'euro. Les journaux grecs l’ont représentée en Hitler sur leurs photos de couverture et les médias français l’ont surnommée «Madame Non». En Allemagne, cependant, la majorité des Allemands ont appris à apprécier son comportement rassurant et le pragmatisme dont elle fait preuve.

Ainsi, pour la plupart des observateurs résignés à l'inévitable, les élections risquent de ne faire l’objet que d’une faible couverture critique dans les médias à l'étranger. Elles méritent pourtant une analyse plus approfondie.

Tout d'abord, l'Allemagne est devenue de facto le chef de file au sein de l'UE et elle a joué un rôle central décisionnel au cours des dernières années, qui aura un impact important sur la trajectoire de l'intégration européenne future. Au-delà de l'Europe, du moins par le biais de Washington, on espère que l’Allemagne gagnera également un rôle croissant dans les affaires internationales.

Destinée commune

Au plus fort de la crise de l'euro, la spéculation clamait une Allemagne qui avait «tourné le dos» à l'Europe, car les observateurs politiques estimaient que le pays avait nouvellement renforcé la défense de ses intérêts nationaux. La vérité est que les Allemands sont autant fidèlement attachés à la destinée commune du continent qu’à une éthique sans compromis envers leurs responsabilités financières.

Qu’on le veuille ou non, l'Allemagne est parvenue à exercer un rôle de premier plan en Europe, et Mme Merkel, si elle est réélue, aura beaucoup à dire sur la façon dont l'intégration se poursuivra au cours de la prochaine décennie, que ce soit sur la crise de l'euro ou sur d'autres sujets de l’agenda politique européen tel le futur accord d'association avec l'Ukraine.

Lors du Sommet de Vilnius en novembre, où les dirigeants européens devraient signer des accords d'association avec l'Ukraine, Mme Merkel aura l’opportunité de se positionner fermement contre la forte augmentation de la dominance russe dans son arrière-cour. C'est en grande partie l’indécision de l'Allemagne concernant l'accord qui a jeté le doute sur le sort de l'Ukraine.

L’insistance de Washington a plus de responsabilité

Même s'il n’existe pas de questions pressantes à l'ordre du jour politique entre les deux pays, de nombreux sujets secondaires devront être traités par le nouveau gouvernement. Les relations d'après-guerre entre les États-Unis et l'Allemagne ont toujours été historiquement fortes, bien que parfois tumultueuses.

Améliorer les relations germano-américaines après l'opposition allemande à la guerre en Irak en 2003 a été une priorité de Mme Merkel, et le récent scandale de la NSA ne devrait hérisser que quelques plumes à Berlin. Cependant, les analystes américains pointent du doigt le fossé entre le leadership mondial de l'Allemagne et sa stature économique.

Dès qu'un nouveau gouvernement sera établi, l'administration Obama se préoccupera de traiter quelques questions urgentes. La première ligne de l’ordre du jour concerne les pourparlers sur un accord américano-européen. Les États-Unis espèrent trouver en l’Allemagne un partenaire conséquent pour faire avancer les pourparlers. De même, Obama poussera Merkel à prendre un rôle plus actif dans la crise de l'euro. Les États-Unis espèrent que Mme Merkel adoptera une approche plus nuancée concernant les mesures d'austérité envers les économies en difficulté.

Enfin, l'Allemagne a pris des mesures hautement symboliques en faveur de la redéfinition de son rôle dans la sécurité internationale (par exemple, l'envoi de troupes allemandes en dehors de son territoire), mais le géant économique reste obstinément un nain diplomatique, préférant rester en retrait dans la plupart des crises liées aux relations internationales.

Henry Stanek est un consultant indépendant basé à Paris, spécialisé dans les affaires de l'UE.

Version originale : Why German Elections Matter—Even if Nothing Changes

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